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4 mars 2020
Fin 2021, les éleveurs pourront, devront ?, injecter la procaïne en anesthésie locale ou la xylazine ou...
Chose promise, chose due. Le ministre de l'agriculture, Didier Guillaume l'avait promis en conférence de presse le 28 janvier dernier (voir LeFil du 30 janvier 2019). Promesse tenue un mois plus tard. Le 27 février, le Journal officiel a publié deux arrêtés signés du 24 février.
Ces deux mesures — inscrites au plan bien-être animal de Didier Guillaume — n'entreront en vigueur que le 31 décembre 2021.
Cela fait longtemps que la Commission européenne milite pour l'interdiction de la castration à vif — sans anesthésie ni analgésie — des porcelets mêmes âgés de moins de 7 jours. Depuis avril 2011, elle encourage les professionnels de la filière porcine à s'engager, à titre volontaire, dans l'arrêt de la castration des porcelets en deux étapes (voir ce lien).
Le comité régional de porcin de Bretagne, des experts de l'INRA et de l'IFIP (institut français du porc) se sont engagés à soutenir cet abandon.
Avec le nouvel arrêté applicable au 1er janvier 2022, la France rend donc obligatoire le recours à l'anesthésie et à l'analgésie avec dix ans de retard par rapport à la recommandation (non contraignante) de la Commission européenne.
À compter du 31 décembre 2021, l'usage par les éleveurs (ou leurs salariés) « d'un analgésique ou d'un anesthésique local pour atténuer ou supprimer la douleur » de leurs animaux ne pourra pas être considéré comme un exercice illégal de la médecine vétérinaire susceptible d'être poursuivi et sanctionné. Car cet usage sera, à cette date, inscrit dans la liste des actes dits vétérinaires qui peuvent, par dérogation, être pratiqués par des éleveurs en toute légalité.
Tous les éleveurs professionnels diplômés, formés ou, à défaut, avec un an d'expérience, pourront en bénéficier pour soulager ou prévenir la douleur de leurs propres animaux dans toutes les filières de production animale, chevaux inclus, même s'ils sont exclus de la consommation humaine. En revanche, les éleveurs ne peuvent faire ces actes vétérinaires sur d'autres animaux que ceux qu'ils détiennent.
Jusqu'à présent, en fait depuis la publication de l'arrêté 5 octobre 2011, les éleveurs ou leurs salariés peuvent déjà réaliser sur leurs propres animaux, entre autres :
Certains de ces actes nécessitent à l'évidence une anesthésie et/ou une analgésie. Même si, parfois, ces actes sont matériellement réalisables sur des très jeunes animaux nouveau-nés qu'il est possible de contenir par la force sans anesthésie.
Le fait de permettre, depuis 2011, la réalisation de ces actes chirurgicaux douloureux par les éleveurs nécessite aussi d'accepter que ces éleveurs puissent avoir accès à certains anesthésiques et analgésiques afin d'éviter des souffrances inutiles à leurs animaux (même s'ils sont très jeunes).
C'est pour cette raison et, à la demande du ministère de l'agriculture, que, début 2012, la xylazine (Rompun° 2 % entre autres) — le chef de file historique des alpha2-agonistes sédatifs analgésiques — a été maintenue comme pouvant être délivrée sur ordonnance aux éleveurs au dosage le plus faible (20 mg/ml). À l'inverse, tous les autres alpha2agonistes injectables ont alors été classés par l'ANMV comme à « délivrance interdite » aux éleveurs et réservés à une « administration vétérinaire exclusive » (vet only).
Le fait que depuis 2011 les éleveurs puissent déjà réaliser « tout traitement par voie parentérale (injectable) à visée préventive ou curative » ne leur interdit sans doute pas d'utiliser des anesthésiques et des analgésiques injectables. Mais, à l'inverse, il peut aussi être argumenté que l'anesthésie, même tronculaire ou locorégionale, constitue à elle seule, un acte vétérinaire difficile qui n'est pas listé comme permis aux éleveurs dans l'arrêté du 5 octobre 2011. Il serait alors interdit à un éleveur de réaliser une anesthésie locale. D'autant qu'elle nécessite une formation assez pointue pour certaines anesthésies locales, comme celle du nerf cornual pour l'écornage des veaux. En médecine humaine, les anesthésies locales ne peuvent pas être réalisées par des infirmières sans une spécialisation.
Les nouveaux arrêtés tranchent définitivement cette controverse en autorisant le recours aux anesthésiques locaux et aux analgésiques aux éleveurs, voire en les rendant obligatoire pour la castration des porcelets de moins de 7 jours .
Pour les équidés, le fait que les détenteurs professionnels d'équidés puissent réaliser un traitement analgésique ou anesthésique local ne doit pas évidemment pas conduire à réaliser ces traitements pour faire faire courir un cheval « boiteux » ou « douloureux » dans une course hippique ou une compétition équestre. Les dispositions sur le dopage interdisent évidemment de faire courir des chevaux ayant reçu des analgésiques ! En outre, contrairement aux autres espèces, la castration des poulains ne peut pas être réalisée par un éleveur, mais seulement par un vétérinaire.
Tableau des anesthésiques locaux et analgésiques injectables utilisables (ou pas) par les éleveurs (indications des espèces cibles selon les RCP)
* Non (hors RCP) : usage envisageable seulement « hors RCP » dans le cadre de la cascade
** Vet-Only, mention d'étiquetage : « délivrance interdite au public, usage vétérinaire exclusif ». Nota. Le gel buccal Domosedan° pour chevaux peut être délivré sur prescription et utilisé par les détenteurs d'équidés.
*** AINS. Le plus souvent usage « hors RCP » par rapport aux indications approuvées.
Toutefois, très peu d'anesthésiques locaux ou d'analgésiques injectables (en dehors des AINS) sont indiqués, selon leurs RCP, dans les productions animales (ou chez les équidés).
En pratique, le seul anesthésique local avec AMM et approuvé en productions animales (bovins, ovins, porcins, équins) est la procaïne (Procamidor°, Axience). Les éleveurs équins pourraient aussi utiliser, le cas échéant, la lidocaïne. La mépivacaïne ne devrait sans doute pas être utilisée par des éleveurs. Car ses voies d'administration, intra-articulaire ou épidurale, nécessitent des compétences vétérinaires.
Du côté des analgésiques autres que les AINS, seule la xylazine (à 20 mg/ml), classée dans les sédatifs analgésiques et non dans les anesthésiques généraux, pourrait être utilisée par les éleveurs bovins (et équins). Les professionnels équins ont aussi accès depuis l'année dernière au gel buccal de détomidine (Domosedan° Gel, Orion, Zoetis). En revanche, tous les autres alpha2-agonistes sont, en France, réservés à l'usage exclusif du vétérinaire avec une mention d'étiquetage : « délivrance interdite au public ».
Tous les anesthésiques généraux restent, semble-t-il, inaccessibles aux éleveurs. Car le nouvel arrêté semble restreindre l'usage des anesthésiques par les éleveurs aux (seuls ?) anesthésiques locaux. L'isoflurane et la kétamine disposent de LMR pour autoriser leur usage en productions animales. Mais ces deux seuls anesthésiques sont « réservés à une administration vétérinaire exclusive » (ou « Vet-Only ») avec un étiquetage qui « interdit leur délivrance aux éleveurs ».
La kétamine est bien indiquée chez les ruminants, les porcs et les équins. Mais cet anesthésique dissociatif est aussi classé dans les stupéfiants, ce qui compliquerait encore davantage son emploi par les éleveurs.
Des LMR ont aussi récemment été fixées pour l'isoflurane chez les porcelets pour encourager son usage dans les castrations. Mais aucun des médicaments avec AMM à base d'isoflurane n'est pour le moment indiqué chez les porcins. Et l'usage de cet anesthésique gazeux nécessiterait des équipements qui, aujourd'hui, ne sont rencontrés que dans des cliniques vétérinaires.
Dans les analgésiques, aucun opiacé n'est indiqué dans les productions animales. Indiqués chez les équidés, le butorphanol et la buprénorphine sont « réservés à une administration vétérinaire exclusive ». Par absence de LMR, la buprénorphine est même interdite d'emploi dans les productions animales, contrairement au butorphanol.
Avec les AINS, le choix s'élargit un peu pour les éleveurs bovins, porcins et équins si on classe les cinq ou six AINS injectables parmi les analgésiques. Toutefois, ces AINS sont déjà utilisés assez couramment par les éleveurs.
Parmi ces AINS, seul le méloxicam est indiqué chez les porcins pour « soulager la douleur postopératoire après une petite chirurgie des tissus mous, telle que la castration ». Dans les autres cas, l'usage des AINS pour soulager des douleurs opératoires lors d'actes vétérinaires réalisés par des éleveurs (autres castrations, écornage…) reste un usage « hors RCP » envisageable dans le cadre de la cascade.
Pour les caprins, aucun anesthésique local, ni analgésique, ni aucun AINS Injectable n'est indiqué chez les caprins. Le recours à un usage « hors RCP » est toujours nécessaire pour les éleveurs de chèvres qui seraient amenés à réaliser des actes douloureux.
Tableau des indications des AINS injectables
Source : d'après la base de données RCP de l'Anses-ANMV.
Autoriser l'usage par les éleveurs des anesthésiques locaux et des analgésiques seulement à partir de janvier 2022 laisse évidemment sous-entendre que cet usage serait interdit avant le 31 décembre 2021. Cette question n'est pourtant pas vraiment tranchée, dans la mesure où l'éleveur peut déjà utiliser des médicaments injectables. En outre, il serait assez peu probable qu'un éleveur soit poursuivi pour avoir anticipé l'application d'une mesure de « bien-être animal ». Et cela laisse aussi presque deux ans aux vétérinaires pour former les éleveurs sur l'usage de ces molécules pour les (seuls) actes qu'ils sont autorisés à pratiquer, surtout l'écornage et les castrations.
Car cet accès aux anesthésiques locaux et aux analgésiques ne permet évidemment pas aux éleveurs de réaliser des actes de chirurgie qui ne sont pas listés dans l'arrêté du 5 octobre 2011. En d'autres termes, cet accès ne permet pas à des éleveurs bovins de réaliser eux-mêmes des césariennes ou d'autres actes de chirurgie, ni à des éleveurs de chevaux de castrer eux-mêmes leurs poulains.
Les vétérinaires pourront donc prescrire et délivrer désormais la procaïne et la xylazine à des éleveurs hors examen clinique dans le cadre du suivi sanitaire permanent (BSE, protocole de soins et visites de suivi). Toutefois, afin d'éviter un détournement d'usage sur des actes interdits aux éleveurs, il conviendrait sans doute de préciser dans les protocoles de soins, voire sur les ordonnances, pour quels actes précis seraient délivrés ces médicaments. Le registre d'élevage pourrait aussi utilement conserver la trace des formations suivies par les éleveurs pour en garantir le bon usage.
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