titre_lefil
Elanco & Proplan

22 mars 2023

L'âge optimal pour initier un dépistage de cancer chez les chiens varie selon la race, le sexe et le poids

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Distribution de l'âge (en années) à la détection d'un cancer pour les 43 races canines représentées par au moins 10 cas dans une population de 3 452 chiens diagnostiqués avec un cancer aux USA (Rafalko et coll., 2023).
Distribution de l'âge (en années) à la détection d'un cancer pour les 43 races canines représentées par au moins 10 cas dans une population de 3 452 chiens diagnostiqués avec un cancer aux USA (Rafalko et coll., 2023).
 

Pas la peine de suspecter un cancer sur un bichon frisé avant 5 ans ; c'est très improbable. Inversement, une néoplasie peut apparaître avant un an sur des Greyhound, Golden retriever ou boxer… Avec l'identification de marqueurs sanguins des cancers, « la question du comment réaliser un criblage des chiens » pour pouvoir les détecter (et traiter) le plus précocement possible « s'est changée en quand réaliser ce criblage », indiquent des épidémiologistes et cliniciens de la société PetDx, aux USA. Et ils espèrent apporter au moins une partie de la réponse dans une volumineuse publication détaillant les âges de survenue de cancers de 3 452 chiens, de plus de 120 races.

De < 1 à 20 ans

Pour obtenir ces données, les auteurs ont fusionné les informations relatives aux sujets inclus dans trois cohortes.

  • une première de 663 chiens, enrôlés chacun pour un traitement anticancéreux entre 2019 et 2021 ;
  • une seconde, qui avait été constituée dès 2006 à partir de 1 888 cas de 7 types de cancers canins (avec banque de tissus néoplasiques) ;
  • la troisième cohorte est constituée de 901 cas de cancers diagnostiqués à l'hôpital universitaire d'UC Davis, sur 15 ans jusqu'en 2020.

Les données démographiques et de cancer (type, stade, grade) étaient disponibles pour chaque sujet, ce qui a permis aux auteurs de décrire les âges de détection des cancers, par race (si plus de 10 sujets les représentaient), mais aussi pour l'ensemble de l'effectif et pour les croisés. Le chien le plus âgé au moment du diagnostic avait 20 ans. Le plus jeune moins d'un an. Sur la totalité de l'effectif, l'âge moyen au diagnostic du cancer était de 8,5 ans. Le poids était aussi disponible : le chien cancéreux le plus léger pesait 2,5 kg et le plus lourd 98 kg. Les lymphomes représentent plus du quart des cancers de cette population (28 %), devant les ostéosarcomes (19 %), les mastocytomes (16 %), les hémangiosarcomes (8,5 %), etc.

Grandes races précoces

Sans surprise, l'âge moyen au diagnostic était plus jeune pour les 2 537 chiens de race pure (8,2 ans) que pour les 915 croisés (9,2 ans, p<0,0001). Sur la totalité de l'effectif, 122 races étaient représentées, dont 43 par plus de 10 sujets. C'est pour ces dernières que les auteurs présentent des données sur les âges de détection du cancer. Sans réelle surprise non plus, les grandes races figurent parmi celles pour lesquelles le diagnostic de cancer survient le plus jeune (voir l'illustration principale) : Mastiff (médiane à 5 ans), Saint-Bernard, Danois, Bouledogues (médiane à 6 ans), Irish Wolfhounds (6,1 ans), Boxers (6,2 ans),  Vizslas et bouviers Bernois (6,2 ans). À l'autre extrémité du spectre figure le bichon frisé (médiane à 11,5 ans).

Les facteurs poids et sexe

Les auteurs observent aussi que, « en général, plus le poids du chien augmente, plus l'âge médian au moment du diagnostic du cancer diminue ». Ils calculent même un coefficient de régression hautement significatif (p<0,0001). À titre d'exemple : « les chiens pesant de 2,5 à 5 kg avaient un âge médian au moment du diagnostic du cancer de 11 ans, contre 5 ans pour les chiens pesant plus de 75 kg ». Ils observent aussi un net effet sexe : à l'échelle de l'ensemble de la population, il y a une différence significative de l'âge au diagnostic en fonction du sexe, de 4 mois plus précoce pour les mâles (p<0,0001). Toutefois, il n'y a pas de différence entre sexes pour les sujets entiers. La différence provient de la stérilisation : les mâles castrés ont été diagnostiqués avec un cancer à un âge plus jeune que les femelles stérilisées (moyennes de 8,5 vs. 8,9 ans ; p=0,0002). Et dans chaque sexe, la stérilisation retarde significativement l'âge à la détection du cancer.

Dépistage annuel ?

Pour les cancers les plus fréquents, les auteurs observent que l'âge moyen à la détection est plus faible : 7,6 ans pour les lymphomes, leucémies et mastocytomes, 8,1 an pour les ostéosarcomes, 9,4 ans pour les ostéochondrosarcomes. Pour les autres cancers, la détection est après 9,5 ans (jusque 11 ans pour les mélanomes malins et les cancers vésicaux). Les auteurs mettent au point une équation qui permet de calculer à partir du poids d'un chien l'âge moyen auquel survient un diagnostic. Dans une optique de médecine préventive, ils proposent de l'utiliser pour établir la date de dépistage recommandée pour ces animaux (en particulier ceux dont la race ne figure pas dans le tableau récapitulatif, ou pour les croisés). Cette équation ne fonctionne pas pour certaines races (bouledogue français, Viszla, boxer), qui présentent un âge moyen de 2 ans plus jeune que celui calculé à partir du poids. Il reste que « les cancers mettent du temps à se développer, et que la phase préclinique du cancer chez les chiens peut s'étendre sur plusieurs années ». Les auteurs proposent donc « d'instaurer un dépistage annuel du cancer chez les chiens à partir de deux ans avant l'âge médian du diagnostic de cancer pour les chiens de race ou de poids similaires », d'où le tableau présentant leurs données compilées. Pour la population dans son ensemble, la médiane étant à 8,8 ans ils proposent d'instaurer un tel dépistage à partir de 7 ans. « Pour les races dont l'âge médian de détection est plus jeune, [un tel dépistage] pourrait être mis en place à partir de 4 ans ». Dans la déclaration de conflit d'intérêt des auteurs de la publication, il est précisé qu'ils sont « tous employés par PetDx et détiennent des actions dans cette société », qui propose« la détection précoce des cancers par une prise de sang ». Toutefois, la présente publication porte sur des cas de cancers détectés et confirmés par d'autres méthodes, plus conventionnelles, qui peuvent être mises en œuvre lors d'une consultation pour dépistage précoce.