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Elanco & Proplan

12 avril 2022

Une bandelette urinaire sur le liquide amniotique, pour évaluer la viabilité des chiots issus de césarienne

par Vincent Dedet

Temps de lecture  5 min

Moyenne et déviation standard pour chaque paramètre de la bandelette selon le fluide fœtal et la catégorie des chiots (survivants et anormaux). Les astérisques indiquent une différence statistiquement significative pour un même fluide fœtal, selon les deux catégories de chiots. LeFil, d'après Fusi et coll., 2022.
Moyenne et déviation standard pour chaque paramètre de la bandelette selon le fluide fœtal et la catégorie des chiots (survivants et anormaux). Les astérisques indiquent une différence statistiquement significative pour un même fluide fœtal, selon les deux catégories de chiots. LeFil, d'après Fusi et coll., 2022.
 

Le travail est préliminaire, mais encourageant : des cliniciens des facultés vétérinaires de Milan et de Teramo (Italie) ont eu l'idée d'évaluer si les bandelettes urinaires utilisés sur les fluides fœtaux pouvaient être utiles à prédire la survie des chiots nés de césarienne. Cela « pourrait représenter un outil de première intention pour l'évaluation des chiots et pour l'identification rapide des chiots nécessitant une surveillance et une assistance particulières ».

Dans les 5 minutes

Les auteur sont donc réalisé une étude prospective, à partir de 37 césariennes réalisées dans leur service à l'université de Milan, sur des sujets de races de petite taille (< 10 kg, n=26) ou de taille moyenne à grande (n=11). Le motif de la césarienne était soit le risque de dystocie avéré pour la race ou l'historique de dystocies préalables. Le même protocole anesthésique, visant à minimiser le risque pour les chiots, a été respecté pour l'ensemble des chiennes. Lors de l'intervention, à l'ouverture des enveloppes fœtales, « les liquides amniotique et allantoïdien ont été prélevés séparément, de manière stérile à la seringue non montée, et placés dans un flacon chacun » et pour chaque chiot. Un intervenant réalisait le prélèvement de manière à ne pas interférer avec les soins au chiot. Chaque chiot a aussi fait l'objet d'une évaluation individuelle, comprenant examen externe, pesée et note Apgar (viabilité). Les chiots évalués anormaux dans les 5 minutes suivant la naissance (difformité, faible poids, note Apgar < 7) faisaient l'objet de soins dédiés, et leur survie à 24 h était notée.

Du glucose avant toute chose

Les flacons contenant les fluides fœtaux étaient agités jusqu'au moment de tremper la bandelette. Ensuite, le même opérateur qui avait réalisé le prélèvement lisait les résultats (après 60 secondes pour les 9 paramètres et 120 secondes pour les leucocytes). Cela a été réalisé à 137 reprises (taille moyenne de portée de 4,7 chiots). Seuls 10 chiots (7,3 %) ont été considérés comme anormaux à la naissance (1 mort-né et 9 à faible note Apgar n'ayant pas répondu aux soins de réanimation). Les auteurs ont obtenu des prélèvements pour 8 d'entre eux. Les 127 autres chiots étaient vivants à 24 h et 7 jours de vie. Les auteurs ont obtenu 113 prélèvements de liquide amniotique et 107 de fluide allantoïdien. Les paramètres différents au plan statistique entre chiots vivants et décédés concernent avant tout (voir l'illustration principale) le glucose pour le liquide amniotique, avec des valeurs significativement plus faibles (p<0,05) chez les chiots qui n'ont pas survécu malgré les soins de réanimation. Ce qui « confirme l'importance de la disponibilité énergétique pour la survie du nouveau-né ». Les auteurs restent prudents, en particulier du fait du faible nombre de non survivants. Mais ils espèrent que « dans des conditions pratiques, les bandelettes du commerce pourraient représenter un outil utile, complémentaire de l'examen clinique du nouveau-né immédiatement après la naissance, permettant une assistance néonatale plus ciblée ».

Moins de détox

La teneur en protéines du liquide amniotique est significativement plus élevée chez les non survivants par rapport aux autres chiots, « ce qui suggère un métabolisme protéique moins efficace chez les chiots dont la survie n'est pas assurée [et/ou] une excrétion accrue depuis le compartiment fœtal ». Ils observent aussi une étendue de valeurs plus resserrée pour les protéines dans le fluide allantoïdien chez les chiots survivants, pouvant « indiquer qu'elles peuvent être absentes dans ce compartiment chez les chiots en bonne santé ». Pourtant, à la différence de l'espèce humaine, chez le chien, les urines fœtales s'accumulent dans le sac allantoïdien, qui persiste jusqu'à la naissance, et « une protéinurie du chiot été décrite comme normale du fait de l'immaturité rénale à la naissance ». Pour les auteurs, il ne faut donc pas attribuer à la seule fonction rénale la présence de protéines dans les fluides fœtaux, mais probablement « à un système de détoxification moins efficace chez les nouveau-nés qui ne survivront pas ».

Altération hépatorénale

Sur les nitrites, les différences entre les deux groupes de chiots portent sur les deux fluides fœtaux, non tant sur les valeurs mesurées que sur la proportion de sujets positifs : un chiot anormal sur quatre, contre 0 à 3 % chez les chiots normaux. Ceux-ci sont toujours négatifs sur fluide allantoïdien. Le fait que la concentration en urobilinogène est significativement plus élevée pour les chiots non survivants dans le fluide allantoïdien est, en cohérence avec les protéines, « un indicateur probable d'une altération de la fonction hépatique ou rénale ». D'autant que, là aussi, les proportions sont différentes (5 % des chiots survivants à concentration élevée, contre 13 % chez les non survivants). La présence accrue de bilirubine dans le liquide amniotique des chiots non survivants serait la témoin de la même altération, avec le même déséquilibre dans la proportion de sujets à réaction élevée (4 et 25 %, respectivement).

 Question de taille ?

Les auteurs soulignent le besoin de validation de ces indicateurs, d'autant que « des niveaux de glucose significativement plus élevés ont été trouvés dans les deux fluides fœtaux des races moyennes/grandes par rapport aux races de petite taille », et inversement pour les protéines. Comme un nombre important de races était représenté dans leur échantillon, ils préfèrent « conduire de prochaines études par race », pour évaluer si des conduites à tenir spécifiques peuvent être proposées dans l'interprétation des résultats sur bandelettes. Ils n'ont cependant pas « détecté d'effets significatifs liés au sexe du nouveau-né, à l'âge ou la parité de la lisse, ni à la note Apgar sur tous les paramètres étudiés dans les fluides fœtaux ». Les auteurs estiment cependant que ce travail « a démontré l'utilité des bandelettes urinaires du commerce pour l'évaluation rapide des fluides fœtaux chez les chiots lors d'une césarienne » et seulement pour cela.