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2 octobre 2019

L'épisode de diarrhée hémorragique canine aiguë en passe de s'éteindre en Norvège, sur une piste étiologique

par Vincent Dedet

Temps de lecture  5 min

Courbe épidémique des cas de diarrhée hémorragique canine sévère en Norvège, par date d'apparition des signes cliniques : les cas semblent s'être étalés sur 6 semaines, selon ces données arrêtées au 20 septembre (source : Mattilsynet).
Courbe épidémique des cas de diarrhée hémorragique canine sévère en Norvège, par date d'apparition des signes cliniques : les cas semblent s'être étalés sur 6 semaines, selon ces données arrêtées au 20 septembre (source : Mattilsynet).
 

A moins que Providencia alcalifaciens ne vienne à être confirmée comme agent étiologique de l'épisode de diarrhées hémorragiques sévères sur des chiens en Norvège, la courbe épidémique de ce phénomène sanitaire inédit laisse à penser que ce Fil.vet est le dernier sur le sujet. Dans un communiqué du 26 septembre, les autorités vétérinaires norvégiennes (Mattilsynet) indiquent « recevoir moins de déclarations de chiens à diarrhée hémorragique de la part des vétérinaires ». Elles lèvent aussi leur recommandation d'éviter le contact direct entre chiens de foyers différents, et clôturent le recueil de prélèvements de cas suspects transmis par les praticiens.

Pas de définition des cas

En effet, les premières données épidémiologiques issues de l'appel à déclaration de cas auprès les cliniques vétérinaires ont été présentées au comité permanent de la santé animale à Bruxelles les 24 et 25 septembre, par le représentant des services vétérinaires norvégiens. Pour l'occasion, l'affection a été rebaptisée « gastro-entérite hémorragique canine ». Car il est « difficile de fournir une définition spécifique de ces cas », tant « les signes cliniques sont relativement banals », mais aussi « parce qu'il est difficile de quantifier le sang dans les fèces ».

Célérité

Si les autorités sanitaires norvégiennes ont été averties par un hôpital vétérinaire le 4 septembre de cas groupés (région d'Oslo), elles ont informé les chefs des services vétérinaires des autres pays nordiques dès le lendemain et ont communiqué sur le sujet dès le 6. Le lendemain, l'Islande fermait ses frontières aux chiens norvégiens, et les sociétés canines de Suède, du Danemark et de Finlande refusaient toute participation de chiens norvégiens à des rassemblements dans leur pays respectif. Le 10 septembre, tous les chers de services vétérinaires en Europe ont été informés, ainsi que la Commission européenne. Le 20 septembre, le site web initialement construit en anglais pour relayer les informations sur cette affection était traduit dans « plusieurs langues de l'UE ».

Létalité proche de 25 %

Suite à l'enquête épidémiologique et à l'appel aux vétérinaires dans l'ensemble du pays, les autorités ont pu en deux semaines de temps rassembler – « sous une forte attention médiatique » – un ensemble de données qui reste pour l'essentiel à valoriser. Ainsi, au 20 septembre, elles recensaient « 184 déclarations de cas », pour l'essentiel par le biais des structures vétérinaires, dont « 43 décès ». Ce qui fournit un taux de létalité de 23,4 %, mais ce chiffre n'est pas exact du fait de la difficulté à définir les cas. « Toutes les classes d'âge sont représentées » parmi les chiens affectés, de « 90 races différentes », croisés inclus. Plusieurs « aliments et friandises à mâcher » sont inclus dans ces enquêtes, et « aucun élément commun n'apparaît évident jusqu'à présent ».

Pas de zoonose

Dix-huit chiens ont été autopsiés et ont fourni un ensemble de prélèvements pour analyses. De plus des échantillons de fèces ont été collectés sur 196 chiens malades et 40 chiens indemnes pour recherche d'agents infectieux. Car la courbe épidémique est comparable à celle de la diffusion d'un agent infectieux dans une population naïve. Toutefois, les investigations ont exclu les principales causes connues de gastroentérite hémorragique, intoxications comprises. L'affection « apparaît ne pas avoir une infectiosité élevée » et aucun propriétaire d'animal malade n'ayant signalé de signes cliniques, « il n'y a pas de preuve en faveur d'un risque de transmission à l'Homme ». Les cas ont été signalés dans tout le pays (voir la carte ci-dessous), mais pas dans les pays voisin. A une exception près, selon un journal suédois : un chien suédois de retour de Norvège serait tombé malade chez lui et aurait succombé à l'affection. Toutefois, les investigations ont infirmé cette possibilité attestant que le chien « est mort de maladie chronique et ne peut être rattaché aux cas norvégiens », selon les autorités de ce dernier pays.

La majorité des cas de gastroentérite hémorragique canine signalés aux autorités norvégiennes (ici à la date du 13 septembre) sont situées dans le Sud-Est du pays. Toutefois, cette région est aussi celle de plus forte densité canine du pays. Fin septembre, des cas avaient été signalés dans la totalité des départements norvégiens (source : Mattilsynet).

 

Séquençage du génome

La seule piste infectieuse reste le duo Providencia alcalifaciens et Clostridium perfringens. La première a été mise en évidence « chez environ 50 cas » en quantités élevées, chez des convalescents et chez « quelques chiens » indemnes « mais en plus faible quantité ». Le séquençage de la totalité du génome de plusieurs souches est en cours, entre autres pour comparer celles issues de cas décédés, convalescents et de témoins indemnes. Dans une mise à jour du 27 septembre, il est précisé que « 14 des chiens atteints présentaient une souche génétiquement quasi-identique », pointant vers « une source commune », d'autant qu'ils proviennent « tous de la même région du centre-sud ». L'échantillon comprenait au total 22 souches. Ces 8 autres sont génétiquement différentes de celle identifiée dans ces cas groupés, mais il n'est pas précisé si elles constituent un autre groupe, seulement qu'elles « appartiennent à d'autres types génétiques ». Il y a donc bien « une relation entre [cette] bactérie et [au moins un partie d]es cas observés ». Les investigateurs vont à présent rechercher des facteurs de risque communs entre les 14 cas ayant fourni la même souche.