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17 juin 2019

L'hémobartonellose se transmet bien in utero

par Agnès Faessel

Temps de lecture  3 min

La femelle gestante est une chienne beagle de 2 ans, abandonnée en refuge par son propriétaire (cliché Pixabay).
La femelle gestante est une chienne beagle de 2 ans, abandonnée en refuge par son propriétaire (cliché Pixabay).
 

Mycoplasma haemocanis, principal agent de l'hémobartonellose (dite mycoplasmose hémotrope aujourd'hui), est responsable d'une anémie hémolytique chez le chien. Le mode de contamination n'est pas connu avec certitude. L'implication d'arthropodes vecteurs est fortement suspectée (puces, tiques) ; une contamination par transfusion de sang est également décrite.

Un cas d'infection in utero vient de confirmer sa possible transmission par voie verticale, une voie évoquée au stade d'hypothèse jusque là. Il fait l'objet d'une publication (en libre accès) dans le JVIM.

1 chiot contaminé sur les 6

Abandonnée en refuge, une chienne gestante de race beagle âgée de deux ans est en effet trouvée infectée par analyse PCR par Mycoplasma haemocanis et Ehrichia ewingii. Une occasion en or pour évaluer la transmission périnatale de ces pathogènes. La chienne était fortement infestée de puces et de tiques (et a suivi un programme de traitement antiparasitaire conséquent).

La portée née a compté 6 chiots, dont l'un est mort dans les 24h. Les 5 survivants ont fait l'objet d'un suivi mensuel pendant 5 mois (PCR et sérologies sur prélèvements de sang). Les résultats montrent que l'un d'entre eux est infecté par le mycoplasme hémotrope, et le demeure (durant le temps du suivi au moins). Les autres sont négatifs. Le placenta d'un chiot avait également été prélevé à la mise-bas pour PCR, mais pas celui de l'individu trouvé ensuite infecté : l'analyse révèle toutefois un résultat positif pour Mycoplasma haemocanis.

La voie transplacentaire la plus probable

La chienne a aussi été suivie pendant 5 mois. Un suivi qui montre la persistance des infections. Et les analyses PCR effectuées sur des échantillons de tissu ovarien et utérin prélevés au moment de sa stérilisation (2 mois après la mise-bas) ont confirmé encore la présence du mycoplasme.

Toutes ces observations permettent de conclure que l'hypothèse la plus probable est une contamination in utero, transplacentaire, de l'un des chiots de la portée, attestant donc la possibilité d'une transmission verticale de la bactérie.

En effet, l'exposition des chiots aux puces et aux tiques, parasites vecteurs, a été surveillée et jugée absente par les auteurs de la publication : des américains de la faculté vétérinaire de l'université de Caroline du Nord (Raleigh University). Selon ces derniers toutefois, d'autres voies de transmission périnatale, transvaginale, par contact direct avec le sang de la mère au moment du part, ou mammaire notamment, ne peuvent pas être totalement écartées ici.

Pas de transmission de l'ehrichiose

Les analyses PCR menées chez les chiots n'ont pas montré la présence de la seconde bactérie, Ehrichia ewingii. Les sérologies effectuées montrent en revanche la circulation d'anticorps maternels anti-Ehrlichia, présents chez chacun d'entre eux à l'âge d'un mois mais plus ensuite.

Chez la chienne, la présence d'Eewingii a encore été montrée par PCR sur sang au moment de la stérilisation, mais plus aux analyses ultérieures. L'animal reste séropositive en revanche toute la durée du suivi. La bactérie n'a pas été identifiée par PCR sur les échantillons utérins et ovariens prélevés lors de l'ovario-hystérectomie.

Dans l'espèce canine, l'ehrichiose se transmet surtout par voie vectorielle (morsures de tiques). Les résultats observés ici ne confirment pas la possibilité d'une transmission verticale. Ils restent toutefois insuffisants pour en écarter définitivement l'hypothèse.

Aucun signe clinique

La chienne a été adoptée 6 semaines après la mise-bas, et stérilisée par son propriétaire (2 semaines plus tard). Son suivi après un an montre qu'elle conserve un bon état de santé. Les 5 chiots ont également été adoptés après le sevrage (6 semaines) ; leur état général, évalué après un an, reste également bon. Le chiot infecté par Mycoplasma haemocanis n'a pas développé de signes cliniques.

Ces deux maladies, ehrlichiose et mycoplasmose hémotrope, sont des zoonoses, ce qui renforce l'importance d'une bonne connaissance de leurs modalités de transmission dans l'espèce canine. Le chien peut en effet être considéré comme un hôte réservoir des agents en cause.