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Elanco & Proplan

7 janvier 2019

Une hyperfolatémie est de bon pronostic chez le chien diagnostiqué insuffisant pancréatique exocrine

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Effet des concentrations sériques en vitamine B12 (cobalaminémie, à gauche) et en vitamine B9 (folates, à droite) au moment du diagnostic sur la durée de survie des chiens atteints d'insuffisance pancréatique exocrine.  Une hypocobalaminémie (<350 ng/l) est associée à une moindre longévité ; une hyperfolatémie (>12 µg/l) est associée à une plus longue survie (figure Soetart et al. The Veterinary Journal, 2019).
Effet des concentrations sériques en vitamine B12 (cobalaminémie, à gauche) et en vitamine B9 (folates, à droite) au moment du diagnostic sur la durée de survie des chiens atteints d'insuffisance pancréatique exocrine.  Une hypocobalaminémie (<350 ng/l) est associée à une moindre longévité ; une hyperfolatémie (>12 µg/l) est associée à une plus longue survie (figure Soetart et al. The Veterinary Journal, 2019).
 

Près de 300 chiens – 299 exactement – ont été inclus dans cette étude rétrospective menée à Oniris (école vétérinaire de Nantes) sur les facteurs pronostiques de l'insuffisance pancréatique exocrine. L'objectif était de rechercher les éventuelles associations entre la durée de survie des chiens et une série de paramètres épidémiologiques, cliniques, biologiques ou thérapeutiques.

La maladie entraîne un défaut d'absorption digestive des nutriments, notamment la vitamine B12 (cobalamine). Une hypocobalaminémie est ainsi fréquente chez les individus atteints, et représente déjà un facteur connu de mauvais pronostic.

Inversement, la concentration sérique en vitamine B9 (folates), une vitamine d'origine bactérienne, peut être augmentée chez ces chiens. L'élévation des quantités présentes dans l'intestin, en lien avec les déséquilibres de la flore bactérienne digestive, favorise en effet son absorption. Celle-ci est toutefois compromise en cas de lésions digestives étendues. La valeur pronostique des concentrations en folates méritait donc, entre autres, d'être étudiée.

Des bergers allemands dans un cas sur deux

Dans cet objectif, cette équipe française a donc répertorié tous les cas d'insuffisance pancréatique exocrine diagnostiqués à Oniris sur 6 ans (2006-2012), pour lesquels un dosage sanguin de la cobalamine et des folates avait été réalisé. Le suivi du cas devait également être renseigné, en particulier le traitement initial prescrit et, si possible, son efficacité, ainsi que la date du décès le cas échéant (à partir des réponses à un questionnaire envoyé au vétérinaire habituellement en charge des soins du chien). 299 cas répondaient ainsi à ces critères.

Au plan épidémiologique, l'analyse des cas montre une sur-représentativité de trois races : berger allemand (139 chiens soit 48 % des cas), cavalier King Charles (6,8 %) et colley (3,4 %). La proportion de mâles est plus importante chez les bergers allemands (54 %) par comparaison aux autres races (37 %). Et l'âge médian au moment du diagnostic est de 4 ans, avec des signes cliniques présents depuis 3 mois en médiane. Ces données viennent confirmer de précédentes observations.

Traitement efficace à 76 %

La réponse au traitement initial était renseignée pour 224 cas. Et pour les trois quarts (76 %), l'évolution est favorable. Ce traitement repose essentiellement sur l'administration d'extraits pancréatiques, une supplémentation en vitamine B12 et une antibiothérapie.

A la fin de l'étude, 40 % des chiens étaient morts et 39 % encore en vie (le suivi des autres ayant été perdu). La durée de survie médiane est ainsi établie à un peu moins de 5 ans (4,8).

Dans 8 cas sur 10, l'origine du décès est l'euthanasie, mais dans la moitié des cas pour un autre motif que l'insuffisance pancréatique. Lorsque l'euthanasie est décidée en raison de la maladie, c'est à cause du coût de traitement ou de la persistance des symptômes malgré le traitement.

L'hypocobalaminémie est bien de mauvais pronostic

Une concentration en cobalamine inférieure à l'intervalle de normalité du laboratoire (350-850 ng/l) est observée chez 55 % des chiens. Ceux-ci sont significativement plus âgés au moment du diagnostic (4,6 ans versus 2,5 pour ceux présentant une concentration normale). Et ils sont présentés plus tardivement en consultation (signes cliniques présents depuis plus longtemps).

Mais surtout, l'hypocobalaminémie au moment du diagnostic est associée à une survie plus courte de manière significative (voir courbes en illustration principale). L'analyse multivariée effectuée (retenant les paramètres d'influence) la confirme comme étant un indicateur indépendant et très significatif de mauvais pronostic. Cela conforte vraisemblablement l'intérêt de l'administration parentérale de vitamine B12 en traitement (mais son effet n'a pas été étudié ici).

L'hyperfolatémie améliore le pronostic

Environ deux tiers de chiens (67 %) présentent des concentrations en folates supérieures aux normes (3-12 µg/l), sans différence d'âge au moment du diagnostic, mais à nouveau présentés plus tardivement que les autres. Et un tiers de l'effectif total (34 %) présente une hypocobalaminémie concomitante.

Isolée, cette hyperfolatémie apparaît associée à une meilleure durée de survie, mais sans que la différence soit significative. En revanche, dans l'analyse multivariée, cette hyperfolatémie ressort comme un facteur indépendant et significatif de meilleur pronostic, associé à une meilleure longévité (voir courbes précédentes).

Selon les auteurs de l'étude, l'augmentation des concentrations sanguines en folates pourrait en effet s'expliquer par le maintien de l'intégrité des entérocytes et des capacités d'absorption intestinale du chien.

Le dosage dans le sang des folates et de la vitamine B12 apparaît ainsi intéressant lors de suspicion d'insuffisance pancréatique exocrine chez le chien, afin d'affiner le pronostic si l'atteinte est confirmée.

La baisse d'appétit est rare mais de mauvais pronostic

Dans l'analyse univariée, les autres paramètres trouvés comme associés à une moindre durée de survie sont les suivants :

  • sexe mâle,
  • âge plus élevé,
  • signes cliniques présentés depuis plus longtemps,
  • baisse d'appétit (seul signe clinique d'effet significatif mais observé chez seulement 11 % des chiens),
  • pas d'administration d'extraits enzymatiques (mesure thérapeutique primordiale de la maladie),
  • mauvaise réponse au traitement.

Le seul paramètre associé à une meilleure longévité est la conservation du poids de l'animal.

Dans l'analyse multivariée, outre les concentrations en folates et en vitamine B12, trois paramètres restent associés de manière indépendante à un moindre pronostic (survie plus courte) : être de sexe mâle, présenter une baisse d'appétit et ne pas être traité par des extraits enzymatiques…