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6 mai 2020

Covid-19. Les praticiens ont espoir que le pire est passé

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Figure 1. Réponses des vétérinaires interrogés lors des 3 enquêtes (W1 mi-mars, W2 début avril et W3 fin avril). Source : enquêtes CM Research.
Figure 1. Réponses des vétérinaires interrogés lors des 3 enquêtes (W1 mi-mars, W2 début avril et W3 fin avril). Source : enquêtes CM Research.
 

La situation va arrêter de s'aggraver, considère désormais une majorité de vétérinaires en France, mais aussi dans la plupart des autres pays inclus par l'Institut CM Research dans sa série d'enquêtes sur l'impact de la crise du covid-19 en Europe et dans le monde. Les résultats de la troisième (wave 3) – réalisée entre le 17 et le 23 avril auprès de vétérinaires pour animaux de compagnie (112 répondants en France) – sont disponibles et comparent ceux des précédentes enquêtes, menées mi-mars puis début avril (voir LeFil du 21 avril et LeFil du 24 avril).

Une minorité de pessimistes

Et ces résultats montrent que le moral remonte : la proportion de vétérinaires craignant l'impact de la maladie sur leur activité diminue dans tous les pays inclus (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie et Espagne en Europe, USA, Australie et maintenant Canada hors Europe). En France, ainsi, les praticiens « extrêmement concernés » par le risque passent de 30 à 12 %, et les « assez concernés » de 51 à 48 %. Les autres, sauf exception, sont tout de même « légèrement concernés », voir figure 2 ci-dessous.

Figure 2. Réponses des vétérinaires interrogés lors des 3 enquêtes (W1 mi-mars, W2 début avril et W3 fin avril).

Source : enquêtes CM Research.

 

Et partout, l'évolution de la situation s'envisage plus positivement qu'auparavant. Les vétérinaires qui estiment qu'elle va empirer dans les deux semaines à venir sont devenus minoritaires, notamment en France où ils ne représentent plus que 20 % des répondants (au lieu de 87 % lors de la précédente enquête) : voir figure 1 en illustration principale).

Un plateau avant la bascule

Cette figure montre toutefois que pour beaucoup, la situation « va rester la même », ce qui n'est pas le signe d'une bascule vers le mieux. Une véritable amélioration n'est donc pas encore attendue très rapidement, sauf en France et en Italie où environ un tiers l'anticipent.

Inversement, les Français sont les seuls pour lesquels l'impact personnel de la pandémie (pour leur propre santé par exemple) est une inquiétude qui va croissante. Ils sont désormais 67 % à se sentir concernés par ce risque (contre 65 % lors de l'enquête précédente). Mais parmi eux, surtout, 20 % se disent extrêmement concernés (contre 13 % trois semaines avant).

La tendance est à la baisse, voire en chute comme en Allemagne, dans tous les autres pays interrogés. Y compris aux USA, alors que l'enquête s'est déroulée à un moment où la maladie prenait toujours de l'ampleur sur le territoire (voir figure 3 ci-dessous).

Figure 3. Situation du covid-19 dans les pays enquêtés (mortalité cumulative) lors des périodes des 3 enquêtes successives.

Source : enquêtes CM Research.

 

Plus seulement les cas d'urgence

En termes de mesures mises en place, la nouvelle enquête ne révèle pas de changement majeur. Les dispositions prises pour éviter le croisement des personnes à la clinique sont globalement renforcées, dans tous les pays :

  • Consultations sur rendez-vous après appel téléphonique (exigé désormais dans 92 % des structures en France contre 87 % avant) ;
  • Limitation du nombre de clients reçus dans la journée (en place dans 83 % des cliniques françaises vs 75 %).

En revanche, réduire son activité aux seuls cas d'urgence devient moins fréquent, partout également. La France est l'un des seuls 3 pays, avec le Royaume-Uni et le Canada, où les vétérinaires continuent de le pratiquer en majorité. Mais leur proportion a diminué de 77 % à 64 %.

L'activité reprend doucement

Les chiffres de la nouvelle enquête montrent d'ailleurs un début de reprise de l'activité, constaté dans tous les pays :

  • Davantage de vétérinaires observent une augmentation de la fréquentation de leur établissement (21 % en France, vs 1 % début avril à la 2e enquête) ;
  • Une plus grande proportion voit le nombre de rendez-vous augmenter (23 % vs 14 % en France) ;
  • Et, surtout, ils sont plus nombreux à percevoir une augmentation de leurs recettes (13 % en France).

Une nouvelle baisse de tous ces paramètres reste toutefois rapportée par une large majorité des praticiens, dans chacun des pays sauf l'Australie. Concernant les recettes en particulier, près de 8 praticiens sur 10 en France (78 %) constatent une diminution (mais ils étaient 100 % trois semaines avant). La baisse est estimée à -31 % en moyenne dans notre pays.

Cette tendance vers une évolution plutôt positive apparaît dans des proportions proches en Italie et en Espagne. Elle est moins marquée au Royaume-Uni, mais plus marquée en Allemagne (initialement moins impactée), voir figures 4 et 5.

Figure 4. Réponses des vétérinaires interrogés lors des 3 enquêtes (W1 mi-mars, W2 début avril et W3 fin avril).

Source : enquêtes CM Research.

Figure 5. Réponses des vétérinaires interrogés lors des 3 enquêtes (W1 mi-mars, W2 début avril et W3 fin avril).

Source : enquêtes CM Research.

 

De même, les résultats montrent un mieux quant à la disponibilité du personnel des cliniques.

Moins d'uniformité sur les ruptures

L'impact du covid-19 sur les livraisons et la disponibilité des produits évolue de manière plus inégale. En Europe, à l'exception de l'Italie et parfois l'Espagne, il s'amoindrit. En France notamment, seuls 45 % (contre 63 %) des vétérinaires rapportent une baisse de la disponibilité des médicaments et fournitures médicales. Cette proportion est la plus basse de tous les pays sondés.

Les attentes des praticiens vis-à-vis de leurs fournisseurs restent stables, essentiellement tournées sur la prévention des ruptures (information actualisée sur le niveau des stocks, augmentation de la production en anticipation, etc.), et un accompagnement financier (pas d'augmentation de tarifs, facilités de paiement lors de difficultés).

Des propriétaires résignés

Le comportement des propriétaires tend également à se stabiliser. Les vétérinaires observent moins de réactions telles que le stockage de produits ou d'aliments, même si elles existent toujours. L'annulation des rendez-vous est moins fréquente (ce qui est néanmoins logique après plusieurs semaines de confinement).

Bien que minoritaires, les demandes de consultations à domicile sont en augmentation (évolution de 2 à 7 % en France par exemple). Et les achats en ligne grimpent également (de 17 à 25 % en France).

Frustration, colère et impuissance

Outre l'ajout du Canada dans sa troisième enquête, CM Research complète son rapport avec une sélection de verbatim. Selon l'institut, ces citations traduisent les principaux sentiments ressentis et exprimés par les vétérinaires interrogés, qui associent frustration (vis-à-vis des clients ou des ruptures), colère (en raison du manque de soutien des autorités ou des instances professionnelles), impuissance face aux événements et inquiétude pour l'avenir (au plan personnel et professionnel, mais aussi vis-à-vis de la situation globale).