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12 mars 2019
Règlement médicament (3). Un ayant droit pourra-t-il acheter ses médicaments ailleurs en Europe ? Oui mais
La question est fréquente. Avec le nouveau règlement européen, le vétérinaire pourra-t-il acheter les médicaments dont il a besoin ailleurs dans un autre pays de l'Union européenne à partir du 28 janvier 2022 ? La réponse est évidemment oui. Sinon, cela serait le principe même de la libre circulation des produits dans l'Union européenne qui serait remise en cause.
Ce Fil détaille cette question de l'approvisionnement des vétérinaires auprès de grossistes européens. Il est le troisième de notre série sur le nouveau règlement médicament vétérinaire 2019/6 publié le 7 janvier 2019 (voir LeFil du 8 janvier) applicable à compter du 28 janvier 2022. Les deux premiers Fil de cette série étaient consacrés à la prescription, à la rédaction des ordonnances (voir LeFil du 21 février) et aux nouveaux critères de prescription (voir LeFil du 25 février).
Dans ce règlement, la Commission européenne a souhaité favoriser un marché unique en étendant explicitement le territoire potentiel de livraison des grossistes à toute l'UE. Et pour encourager le recours à des grossistes d'autres pays de l'UE, la base de données européennes qui recense déjà tous les fabricants européens de médicaments vétérinaires (voir ce lien) sera élargie aux distributeurs en gros. Il sera donc facile, à l'avenir, de vérifier l'autorisation d'un grossiste enregistré dans cette base.
Mais le Parlement et, dans une moindre mesure, le Conseil européen ont freiné les ardeurs de la Commission en encadrant davantage que prévu initialement cette distribution en gros au sein de l'UE. Une partie des règles strictes qui s'appliquent déjà aujourd'hui aux centrales françaises devraient aussi s'étendre aux grossistes des autres pays de l'Union Européenne. La concurrence entre grossistes européens ne devrait pas être (trop) déloyale entre les grossistes des différents pays.
Un grossiste européen ne peut vendre en France que des médicaments français ! Les médicaments livrés à un ayant droit basé en France sont conformes aux exigences Françaises. Même si le grossiste est basé dans un autre pays de l'UE, les médicaments livrés en France sont non seulement dotés d'une AMM valable en France, mais avec un étiquetage et une notice en Français conformes aux exigences des autorités nationales.
En d'autres termes, un grossiste espagnol ne peut pas vendre à un ayant droit basé en France un médicament « espagnol », même s'il est strictement identique en tous points, y compris sur son fabricant et sur son nom commercial, à celui qui à l'AMM en France.
Les grossistes basés en France sont autorisés, contrôlés et inspectés par l'Agence française du médicament vétérinaire (Anses-ANMV). Cette autorisation nationale est valable dans l'UE [art. 99]. Avec l'autorisation délivrée par l'agence française, Alcyon, Centravet, Coveto et d'autres distributeurs en gros, pourront livrer des médicaments belges en Belgique, néerlandais aux Pays-Bas, germaniques en Allemagne, italiens en Italie… sans y être autorisés par les autorités nationales de ces pays de destination.
La réciproque est évidemment vraie. Les grossistes autorisés en Espagne, en Italie, en Belgique, aux Pays-Bas ou en Pologne… pourront aussi livrer les ayants droit basés en France sans être autorisés, contrôlés ou inspectés par l'Agence française.
Le nouveau règlement européen exige que les grossistes soient basés et autorisés dans un pays de l'Union Européenne pour livrer des ayants droit basés dans les autres pays de l'UE. Un grossiste basé dans un pays tiers ne peut pas livrer de médicaments à un ayant droit en Europe.
Avec le brexit, les grossistes britanniques ne devraient donc pas pouvoir pas livrer de médicaments vétérinaires à un ayant droit basé en France. Même si les packagings multinationaux conservent un étiquetage conforme à la fois aux exigences des autorités françaises et britanniques.
Pour éviter de trop grandes divergences entre les États membres, le règlement fixe des exigences communes à tous les grossistes [art. 99 à 101].
Les plus précises ne sont pas encore connues. Elles seront publiées avant le 28 janvier 2022 par la Commission européenne sous la forme de « bonnes pratiques de distribution en gros ». En France, des bonnes pratiques de distribution en gros sont déjà en vigueur au moins depuis 2005 et ont été actualisées en 2015. Les centrales françaises répondent déjà à des exigences bien plus élevées que celles de la plupart des autres pays européens. La France est aussi un des rares grands pays de l'Union européenne où les médicaments sont livrés en quasi-totalité par des grossistes avec très peu de livraisons en direct par les laboratoires.
Le règlement énonce aussi quelques obligations générales qui, en France, sont déjà appliquées depuis longtemps [art. 101].
Comme pour la quasi-totalité des textes européens, le contrôle est laissé à la charge des autorités nationales du territoire où elles sont établies [art. 123]. En d'autres termes, les grossistes néerlandais qui viendraient concurrencer les centrales françaises auprès des vétérinaires de l'hexagone ne pourront pas être inspectés par l'agence française, mais par les inspecteurs des Pays-Bas. Néanmoins, s'il est constaté en France que ce distributeur hollandais ne livre pas des médicaments « français », les autorités françaises pourront le signaler aux inspecteurs des Pays-Bas afin qu'ils procèdent à un contrôle et éventuellement le sanctionnent si l'infraction est confirmée.
Le règlement prévoit la suspension (provisoire) ou le retrait (définitif) des autorisations des grossistes en l'absence d'un responsable pharmaceutique [art. 131]. En cas de non-respect des autres obligations, l'autorité nationale peut suspendre ou retirer l'autorisation de distribution en gros pour toute ou partie des médicaments livrés. Les procédures et le régime des sanctions pénales ou administratives restent dans le droit national [art. 135].
Pour les seuls médicaments qu'ils fabriquent, les fabricants peuvent les distribuer en gros soit auprès des grossistes, soit — ce n'est pas interdit — auprès des ayants droit de l'Union européenne [art. 99]. Ils devraient, dans ce cas, respecter les mêmes règles que les distributeurs en gros et ne livrer en Espagne que des médicaments avec AMM espagnole et en France que des médicaments avec AMM française. Le tarif « fabricant » d'un médicament espagnol pourra donc rester différent du tarif fabricant du même médicament français.
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