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2 août 2022

Les races brachycéphales sont aussi les premières victimes de dermatite des plis

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

Une cohorte britannique de plus de 900 000 chiens éclaircit les facteurs de risque de la dermatite des plis : à nouveau, les races brachycéphales sont aux premières loges (cliché : Vetcompass).
Une cohorte britannique de plus de 900 000 chiens éclaircit les facteurs de risque de la dermatite des plis : à nouveau, les races brachycéphales sont aux premières loges (cliché : Vetcompass).
 

Encore eux ! Bouledogues français, anglais et le carlin sont à nouveau en tête des races prédisposées à une pathologie… cette fois-ci, il s'agit de la dermatite des plis (intertrigo). Les résultats sont sans appel, puisqu'ils sont issus de la cohorte Vetcompass, pour laquelle les fichiers médicaux électroniques (anonymisés) de plus de 900 000 consultations généralistes réalisées en 2016 dans près de 900 structures vétérinaires britanniques ont été partagés.

Bouledogues anglais très ridés

De la base de données, les auteurs ont extrait les dossiers médicaux comportant comme diagnostic final une “dermatite des plis”, un “intertrigo” ou une “pyodermite des plis”, ainsi que les localisations les plus fréquentes de  l'affection (face, babines, cou, vulve…). Les races n'ont été prises en compte qu'à partir du 5e cas de dermatite des plis. Des 905 553 dossiers individuels, les auteurs ont retiré 11 375 cas, dont ils ont manuellement contrôlé plus du quart (n=3 307). Ce qui leur permet d'estimer que la dermatite des plis représente 0,37 % des consultations généralistes sur une année – ce qui est probablement une sous-estimation, d'autres études ayant montré que les maîtres de brachycéphales n'identifient pas cette affection comme un problème de santé. Dans la grande majorité des cas (87 %), cela concerne des chiens de race. Les cinq races les plus prédisposées sont le bouledogue anglais (6,1 % des diagnostics, mais 15,5 % des cas de chiens de races dans cette étude), le bouledogue français (2,7  et 12,6 %, respectivement), le carlin (2,1 et 9,7 %), le basset Hound (2,0 et < 1 %) et le cocker spaniel (1,3 et 13 %). À l'inverse, cinq races n'ont présenté aucun cas : cavachon (bichon frisé x cavalier king Charles), caniche toy, rottweiler, teckel nain et spitz nain.

10 races en sur-risque

En analyse multivariée, les auteurs obtiennent 4 facteurs de risque significativement associés à la survenue de dermatite des plis : race, statut castré ou non, âge et présence d'une assurance. Dix races présentent un sur-risque hautement significatif (p<0,001) par rapport à des chiens croisés : bouledogue anglais (x 49), bouledogue français (x 26), carlin (x 16), basset Hound (x 11), cocker spaniel (x 7,5), Shar Pei (x 6,5), boxer et cavalier king Charles (x 4,5), dogue de Bordeaux (x 3,5), et West Highland white terrier (x 3). Il n'y a que quatre races significativement protégées : le Labrador retriever (43 % de protection par rapport à un croisé), le Jack Russel terrier (47 %), le border collie (71 %) et le Yorkshire toy (86 %). Pour l'âge, par rapport à la première année de vie, toutes les autres classes d'âge présentent un sur-risque, y compris la 2e année de vie. Ce niveau de sur-risque va en augmentant avec l'âge (jusque x 4,7 à partir de 8 ans). Le fait d'être castré est un facteur de risque dans les deux sexes, mais de manière limitée (x 1,2 pour les mâles et x 1,5 pour les femelles). Ce sur-risque est plus faible que celui lié à la couverture par une assurance (x 2,0) – ce qui confirme la suspicion de sous-déclaration de la dermatite des plis.

Traitements locaux

Au plan clinique, l'essentiel des cas ne comporte qu'une localisation de dermatite (96,4 %), un seul chien en rassemblant trois. Les localisations rencontrées sont, par ordre de fréquence décroissante : les babines (36,8 %), la face (22 %), la vulve (14,2 %), le chanfrein/museau (9 %), la queue (5,8 %) et les plis péri-oculaires (3,5 %). Logiquement, les races ne sont pas affectées de la même façon : les babines sont plutôt le fait des cockers spaniels, cavaliers king Charles et West Highland white terriers ; la face, le museau/chanfrein et les yeux concernent les races brachycéphales, les autres régions du corps celles du Shar Pei et du basset Hound. Dans l'extrême majorité des cas (95,8 %), le diagnostic est établi sans examens complémentaires. L'antibiothérapie par voie générale représente plus du tiers des traitements mis en œuvre (42,3 %), ce qui, pour les auteurs, s'écarte des recommandations professionnelles. Le reste représente surtout des traitements locaux, comprenant des corticoïdes (avec shampooing antibactérien/antifungique dans 30,4 % des cas) ou pas (shampooing antibactérien avec ou sans antifungique, 39,2 %). Dans 14 % des cas, les chiens reçoivent des corticoïdes par voie générale. Enfin, « la douleur a été notée chez près d'un chien sur cinq présentant des signes cliniques, ce qui souligne l'importance de la dermatite des plis en tant qu'affection chronique » - même si cette douleur n'est pas prise en charge. Pour les auteurs, « les associations de bien-être, les associations vétérinaires et les associations de race pourraient faire davantage d'efforts pour informer le grand public que, bien que les humains puissent percevoir la peau plissée comme étant “mignonne”, cette conformation est au contraire une pathologie qui entraîne des conséquences importantes en termes de bien-être pour les races et les individus affectés ».