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15 janvier 2020

Que change le brexit pour les vétos ? Rien ou presque. Le spectre du chaos annoncé disparaît en 2020, mais…

par Eric Vandaële

Temps de lecture  5 min

UK aligné sur l'UE en 2020
Avec le deal, le Royaume-Uni reste accroché à l'UE jusqu'à fin 2020. Le spectre du chaos annoncé pour le 30 mars 2019 disparaît… au moins jusqu'au 1er janvier 2021.  Illustration insidehighered.com
UK aligné sur l'UE en 2020
Avec le deal, le Royaume-Uni reste accroché à l'UE jusqu'à fin 2020. Le spectre du chaos annoncé pour le 30 mars 2019 disparaît… au moins jusqu'au 1er janvier 2021.  Illustration insidehighered.com
 

Dans 15 jours, le samedi 1er février au matin, le Royaume-Uni quittera l'Union Européenne, très probablement avec l'accord de retrait négocié depuis trois ans et demi… Si cet accord est bien définitivement adopté avant le 31 janvier, qu'est-ce que cela changera ? Finalement rien ou… presque rien.

Le chaos annoncé en cas de « no deal » n'aura donc pas lieu. Tant mieux ! Le spectre des contrôles interminables aux frontières d'un pays tiers qui créerait des embouteillages immenses des deux côtés de la Manche a disparu. Car l'accord de retrait de 184 pages — le fameux deal — prévoit de conserver, sans contrôle douanier supplémentaire, la libre circulation des personnes, des marchandises et des animaux de compagnie ou d'élevage.

Le pet travel scheme n'est pas modifié au moins pour 2020

Pour les voyages des chiens et des chats sous la Manche, le pet travel scheme reste donc inchangé à partir du 1er février et pendant toute la période de transition, au moins jusqu'au 31 décembre 2020. Les seules obligations sont toujours :

  • Comme pour tout voyage dans l'UE, le passeport européen, valable des deux côtés de la Manche, avec un animal identifié par un transpondeur et valablement vacciné contre la rage
  • Et, pour un chien, le traitement par le praziquantel certifié par un vétérinaire dans le passeport entre 24 et 120 heures avant l'entrée du chien au Royaume-Uni. Cette obligation est celle aussi applicable pour l'entrée d'un chien en Irlande, à Malte ou en Finlande.

Les passeports délivrés au Royaume-Uni restent aussi valables pour les mouvements des pets britanniques vers la France et l'UE27 avec leurs propriétaires.

Pas de pénurie de médicaments ou d'autres produits

L'accord de retrait du Royaume-Uni avec l'UE conduit à ne rien changer (ou presque) au 1er février 2020 sur la libre circulation des marchandises comme les médicaments, les aliments, les biocides, les animaux, les produits animaux etc. Le passage de la frontière entre l'UE-UK ne devrait donc pas poser de difficultés importantes, ni créer de pénuries.

Aucune suspension d'AMM de médicaments n'est à prévoir dans l'immédiat. Alors que cela aurait sans doute été le cas en l'absence de deal. Le contrôle de la libération des lots peut continuer à être réalisé au Royaume-Uni pendant la période de transition.

Le Royaume-Uni « ne pourra plus jouer le rôle d'État chef de file » dans les procédures européennes d'évaluation des risques notamment pour les médicaments, les LMR (limites maximales) les produits biocides, les aliments, les OGM, la lutte contre les maladies animales ou les zoonoses.

Post-brexit, le droit européen prime sur le droit britannique en 2020

Car, durant la période de la transition, l'accord de retrait prévoit que le Royaume-Uni, devenu pays tiers, continuera néanmoins à respecter l'intégralité des « acquis de l'Union, [c'est-à-dire]l'ensemble des directives, règlements, normes et standards de l'UE » (art. 4).

Le Royaume-Uni aura donc les mêmes obligations réglementaires qu'un État membre mais sans pouvoir participer aux institutions de l'UE ni être associé aux processus décisionnels. Même les modifications de la réglementation pendant la période de transition s'appliqueront au Royaume-Uni, alors que les Britanniques n'auront pas pu participer à l'élaboration de ces textes. La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne s'appliquera aussi au Royaume-Uni durant toute cette période de transition. L'accord indique même explicitement que le droit européen prime sur le droit britannique qui serait ou deviendrait incompatible ou contraire au droit européen.

En contrepartie de cet alignement réglementaire contraignant, le Royaume-Uni continue à bénéficier d'un accès pour tous ses produits au marché intérieur de l'Union Européenne (et réciproquement).

En d'autres termes, le Royaume-Uni devient un pays tiers qui bénéficie de la libre circulation de ses produits comme s'il s'agissait d'un État membre mais, sans avoir de pouvoir décisionnel pour faire évoluer les normes qu'il a l'obligation d'appliquer.

Et après la période de transition, stop ou encore ?

La période de transition est destinée à préparer un accord de libre-échange ou de « partenariat proche » entre l'UE et le Royaume-Uni. L'objectif recherché par les Britanniques est toujours d'avoir accès au marché de l'UE27 pour ses produits, sans en avoir les obligations. La crainte des Européens est évidemment que la république d'Irlande et l'Irlande du Nord, qui devrait s'aligner sur le long terme sur la réglementation européenne, servent de cheval de Troie à tout le Royaume-Uni pour avoir un accès au marché de l'UE sans en avoir les obligations comme État membre ni contribuer au budget européen.

L'accord prévoit que la période de transition s'achève le 31 décembre 2020. Il n'envisage qu'une seule prolongation possible d'un an (fin 2021) ou de deux ans (fin 2022). Mais, contrairement au « deal du retrait » prolongé à plusieurs reprises à quelques jours de l'échéance, l'unique demande de prolongation devrait être décidée avant le 1er juillet 2020 (article 132). Pour le moment, les Britanniques affichent leur volonté de conclure ce nouvel accord de libre-échange ou de partenariat avant la fin 2020. Même si cela semble « mission impossible » pour les Européens. Si l'accord de transition était prolongé en 2021 et 2022, les Britanniques seraient aussi dans l'obligation de continuer à contribuer au budget européen.

Le chaos du « no deal » n'est pas écarté pour 2021…

Si aucun accord de libre-échange n'est adopté avant la fin de la période de transition, prolongée ou pas, cela sera à nouveau l'hypothèse d'un « hard brexit » qui sera évoqué avec la nécessité de renforcer les contrôles aux frontières des produits entre l'UE et le Royaume-Uni.

Bref, le chaos du brexit « no deal » annoncé pour 2019 n'aura pas lieu en 2020. Mais, il n'est pas encore écarté pour 2021… L'incertitude demeure.