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16 octobre 2019

En 2017, la France a progressé d'un rang, mais fait toujours partie de la moitié des pays européens les plus consommateurs d'antibiotiques

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Classement des 30 (en 2016) et 31 (en 2017) pays européens pour leurs ventes d'antibiotiques en productions animales. Malte est le nouvel entrant de 2017 ; le Portugal n'occupe probablement pas sa place réelle car « des sous-déclarations ont été identifiées » sur 2017 (LeFil, d'après ESVAC 2019).
Classement des 30 (en 2016) et 31 (en 2017) pays européens pour leurs ventes d'antibiotiques en productions animales. Malte est le nouvel entrant de 2017 ; le Portugal n'occupe probablement pas sa place réelle car « des sous-déclarations ont été identifiées » sur 2017 (LeFil, d'après ESVAC 2019).
 

18e sur 31 et non plus 19e sur 30. Telle est la progression de la France dans le classement des pays européens pour leur consommation d'antibiotiques vétérinaires en productions animales, entre 2016 et 2017. Une autre façon de présenter le progrès est que la France s'est rapprochée de deux places de la médiane européenne (voir l'illustration principale).

Les Britanniques dans le club des 5

L'arrivée d'un nouveau pays dans le panel ESVAC en 2019, Malte, aurait dû faire gagner automatiquement un rang à la France. Puisque, pour les données de 2017, qui viennent d'être publiées par l'Agence européenne du médicament (EMA), la république insulaire entre à la 23e place pour l'exposition aux antibiotiques en 2017 (avec seulement 1,8 t de matière active consommée), derrière la France. Mais un grand nombre de pays européens avait, comme la France, déjà lancé leur propre programme de réduction des usages antibiotiques, en ont récolté les fruits en 2017. Au final, les consommations ont aussi reculé dans 23 autres pays. Ce qui a limité les progressions dans le classement, avec trois exceptions notables :

  • le Royaume-Uni (à 32,5 mg/PCU en 2017 soit un recul de 17,3 % en un an), qui intègre le quinté de tête européen, en ayant progressé de 7 places en un an ;
  • l'Espagne, qui troque sa place d'avant dernier avec l'Italie, grâce à une réduction de 36,5 % de l'exposition en un an (à 230,3 mg/PCU), contre -7,7 % pour l'Italie. Ce sont les progrès de ces gros consommateurs qui expliquent l'essentiel du recul de la moyenne européenne : Italie et Espagne sont les seuls pays à avoir utilisé plus de 1 000 t de matière active en 2017…
  • et la Pologne, actuel champion européen des productions animales, et dont, à l'inverse des autres pays, l'exposition augmente de 27,7 % en un an. Ce résultat est d'autant plus impressionnant que la biomasse de productions animales a augmenté de plus de 10 % depuis 2010 en Pologne, indiquant que le recours aux antibiotiques n'y est pas bridé…

-14,1 % sur “toute l'Europe”

Sur l'ensemble des 31 pays, en 2017, l'exposition moyenne était de 107,0 mg/PCU et la médiane à 61,9 mg/PCU, contre 124,6 et 57,0 mg/PCU en 2016, respectivement. Cette moyenne a donc reculé de 14,1 % en un an. Le pays ayant la plus faible exposition reste la Norvège (3,1 mg/PCU, contre 2,9 en 2016), et les quatre premiers restent, inchangés, des pays scandinaves. Chypre (423,1 mg/PCU), malgré là aussi une forte réduction de l'exposition (-6,7 % en un an), est lanterne rouge. Ce qui explique, au final que la France (avec 68,6 mg/PCU) reste du côté des gros consommateurs (au-dessus de la médiane) malgré une exposition sous la moyenne européenne.

Fort recul des “critiques”

Sur 2017, les trois principales classes d'antibiotiques représentent deux tiers de l'exposition : tétracyclines (30,4 %), pénicillines (26,9 %) et sulfamides (9,2 %). Les antibiotiques critiques ensemble représentent 5,8 % de l'exposition totale (fluoroquinolones : 2,2 %, colistine : 3,4 % et céphalosporines de 3e et 4e générations : 0,2 %). C'est un net recul en un an : en 2016, ces mêmes antibiotiques critiques représentaient 15,9 % de l'exposition totale. Malte détrône la Pologne comme pays ayant l'exposition la plus élevée aux fluoroquinolones, à 14,3 et 11,1 mg/PCU, respectivement (la France est à 0,2). L'Estonie est celui ayant l'exposition la plus élevée aux C3/C4G (à 0,8 mg/PCU, la France est à 0,02). La Hongrie domine sur la colistine (14,9 mg/PCU), suivie du Portugal (10,9) et de Chypre (10,4) ; la France est à 2,2 mg/PCU. A l'échelle des 25 pays ayant suivi leurs consommations depuis 2011, la réduction d'exposition moyenne (en 6 ans) est de 66,4 % pour la colistine, 20,9 % pour les C3/C4G et de 10,3 % pour les fluoroquinolones).

Comparaison de la consommation d'antibiotiques critiques dans les 31 pays du projet ESVAC en 2017, par classe d'antibiotiques. Les “autres quinolones” sont mentionnées bien qu'elles ne fassent pas partie des antibiotiques critiques définis par l'EMA (ESVAC, 2019).

 

Peu d'informations sur la canine

Pour les formes pharmaceutiques, les solutions orales ont représenté en 2017 50,7 % de l'exposition, les prémélanges 28,8 % et les poudres orales 9,9 %. Les injectables sont à 9,7 % et les intramammaires à 0,5 %. Les rapporteurs évaluent l'importance des antibiotiques délivrés en médecine canine au travers de la proportion de comprimés ramenée au volume total de matière active, par pays. Ainsi, Malte est le pays où le “poids” de la canine est le plus important : la vente de comprimés représente 12,1 % des 2 tonnes de matière active vendues en 2017, devant la Finlande (11 % des 11 t) et la Suède (7,7 % des 10,3 t). La France, avec 3 %, est au-dessus de la moyenne européenne (1 %). Le rapport cite « des données non publiées du Danemark et de France de 2016 montrant qu'approximativement 1,1 et 0,8 % respectivement des spécialités antibiotiques injectables vendues étaient utilisées chez les chiens et les chats ». Pour les topiques et les « préparations pour organes sensoriels » (pommades oculaires), « en 2016 ces formes pharmaceutiques ont représenté 0,2 % du volume total de matière active vendue au Danemark, 0,4 % en Tchéquie, 0,52 % en France, 0,7 % au Royaume-Uni et 0,002 % en Norvège ».

Comme les autres années, l'unité dans laquelle est exprimée l'exposition aux antibiotiques des animaux de rente terrestres est rapportée à une unité arbitraire de biomasse (PCU pour population correction unit).