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Elanco & Proplan

28 août 2025

Maladie rénale chronique : des signes de constipation précocement détectables chez le chat

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Résultats de la détection automatique des défécations chez les 18 chats de l'étude
*** : différence significative. D'après George et al., JFMS, 2025.
Résultats de la détection automatique des défécations chez les 18 chats de l'étude
*** : différence significative. D'après George et al., JFMS, 2025.
 

La maladie rénale chronique (MRC), ça constipe ! Face à ce risque, et pour l'exploiter, des chercheurs américains (école vétérinaire de l'État de l'Ohio à Colombus) ont mené une étude consistant à mesurer en temps réel le rythme de défécation de chats atteints. Ils publient leurs résultats en libre accès dans le JFMS.

Une litière connectée

La constipation secondaire à une MRC est documentée chez l'homme également. Elle est d'origine multifactorielle, découlant de la déshydratation, d'anomalies électrolytiques (hypokaliémie), de troubles digestifs, mais aussi des traitements mis en place (chélateurs de phosphate, changements alimentaires).

Pour les chats, le propriétaire n'est pas toujours en capacité de déceler une modification du rythme de défécation de son animal, qui peut être d'abord discrète ou difficilement détectable selon les habitudes de nettoyage de la ou des litières, le nombre de chats au domicile, etc. Les chercheurs ont donc recouru à un système connecté utilisé dans le cadre de la recherche (Petivity Smart Litter Box Monitor System). Il permet de mesurer en temps réel les activités de miction et de défécation des chats, en détectant lorsqu'ils utilisent leur litière (il identifie l'animal, et mesure également son poids).

Dans cette étude, 18 chats ont été recrutés : 9 atteints de MRC (confirmée, stabilisée, au stade 2 à 4 de la classification IRIS) et 9 témoins non atteints. Tous ces chats étaient en bonne santé par ailleurs, et sans trouble de la défécation rapporté par leur propriétaire. Les éventuels traitements de la MRC étaient maintenus. En revanche, l'administration de médicaments susceptibles de modifier la motilité intestinale était un critère d'exclusion (laxatifs, anxiolytiques…).

Seuls des chats maintenus par leur propriétaire en intérieur étaient inclus, et aucun ne présentait d'historique de malpropreté, afin ne pas biaiser les mesures. Le dispositif a été installé dans les litières habituelles, afin de ne pas modifier l'environnement de vie des chats. Le mode d'alimentation ou de nettoyage des litières est également resté inchangé tout au long des 30 jours d'étude. Une période de test et réglage du système (1 à 2 semaines) a précédé les mesures.

Altération du rythme de défécation lors de MRC

Les chats étaient de diverses races. Ils étaient significativement plus âgés dans le groupe MRC (près de 12 ans en médiane contre 3 ans), et sans surprise, leur créatininémie était supérieure à celle des témoins. Pris individuellement, leur poids n'a pas varié de manière significative durant la période d'étude (ils pesaient tous entre 5 et 7 kg).

L'analyse des données récoltées confirme la tendance à la constipation des chats atteints de MRC. Ainsi, le cumul du nombre de jours sans épisode de défécation (sans être nécessairement consécutifs) est significativement plus élevé dans ce groupe par comparaison aux témoins :

  • le total est de 5 jours en médiane contre 0 après 14 jours,
  • il atteint 7 jours contre 2 après 21 jours,
  • et il s'établit enfin à 10 jours contre 2 à l'issue de la période d'étude (30 jours, voir aussi figure en illustration principale).

De même, le nombre moyen de défécations quotidiennes calculé sur la période entière est de 0,86 chez les chats atteints de MRC versus 1,07 pour les chats témoins (la différence est significative).

Par ailleurs, le dispositif détectant également les mictions, les données montrent qu'elles sont plus fréquentes lors de MRC (nombre moyen par jour de 3,86 contre 2,47).

À la fin des 30 jours, les propriétaires évaluaient aussi l'aspect des crottes émises (score moyen sur la période), sans mettre en évidence de différence significative entre les groupes.

Quelle application pratique ?

L'apparition d'une constipation est une complication avérée de la MRC, qui peut être directement délétère, avec un risque d'obstruction digestive par exemple, mais aussi entraîner une déstabilisation de l'insuffisance rénale. Elle peut être tardivement observée par le propriétaire, et la détection précoce d'une diminution de la fréquence de la défécation pourrait alors se révéler intéressante afin de prévenir l'aggravation. Sa surveillance pourrait aussi être utile dans le suivi des mesures mises en place. En particulier, l'hydratation de l'animal, son alimentation et les traitements, susceptibles de favoriser une réduction de la motilité intestinale sont à considérer.

Une diminution de la fréquence de défécation peut aussi découler d'autres causes, notamment une réduction de la mobilité ou une altération de la fonction digestive (liée à l'âge, à une arthrose…). Et il reste nécessaire dans tous les cas de déterminer la fréquence normale de défécation du chat (ici, les chats du groupe MRC, bien que présentant une fréquence diminuée, étaient en bon état de santé général).

Cette étude montre par ailleurs l'intérêt du dispositif connecté utilisé, qui a répondu à l'objectif recherché. Indépendamment de la maladie rénale, ce type de suivi pourrait être élargi à d'autres situations à risque de constipation. Avec une limite importante toutefois : les mesures demeureraient incomplètes chez les chats ayant accès à l'extérieur.