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9 mai 2016

L’apomorphine, premier vomitif pour chiens disponible en centrales

par Eric Vandaële

Temps de lecture  4 min

Lors d’intoxication récente, par une plante, un médicament, un poison ou le chocolat, faire vomir le chien est un geste d’urgence qui peut le sauver.

Après le diazépam ou la vitamine K1, TVM continue à combler les trous de l’arsenal thérapeutique vétérinaire en toxicologie avec l’apomorphine, Emedog°, le premier vomitif pour les chiens.

 
Lors d’intoxication récente, par une plante, un médicament, un poison ou le chocolat, faire vomir le chien est un geste d’urgence qui peut le sauver.
 

Le vétérinaire était jusque-là très démuni pour provoquer des vomissements chez un chien. Aucun vomitif vétérinaire n’était disponible pour cette espèce. Pourtant, faire vomir un chien ou un chiot suspecté d’avoir ingéré un médicament en grandes quantités ou un toxique est l’un des premiers gestes pour en diminuer l’absorption. Car les vomissements vident l’estomac de plus de 80 % de son contenu. Paradoxalement, alors que les intoxications sont plus rares chez les chats, la xylazine (Rompun°) permet, de longue date, de faire vomir les chats (à la dose de 0,4 à 0,5 mg/kg par voie IV ou IM), mais pas les chiens de manière aussi fiable.

Faire vomir pour moins de 2 euros

TVM vient combler ce vide thérapeutique avec Emedog° une solution injectable à 1 mg/ml d’apomorphine présentée en ampoule verre d’un ml.

Elle est indiquée à la dose de 0,1 mg/kg par voie SC soit une ampoule d’1 ml/10 kg. Les doses rapportées dans la bibliographie vont, par voie IV, de 0,02 à 0,04 mg/kg (soit une ampoule pour 25 à 50 kg), ou par voie SC (ou IM) de 0,04 à 0,1 mg/kg (soit une ampoule pour 10 à 25 kg).

La boîte de 5 ampoules est référencée en centrale à 8,50 € (prix HT). Faire vomir un chien coûterait donc moins de 2 €…

Indispensable à la toxicologie

Certes, les chiens présentés en urgence après avoir ingéré un médicament ou un toxique ne sont pas si fréquents. Néanmoins, l’apomorphine devrait devenir l’un des médicaments indispensables à la toxicologie vétérinaire. La péremption assez longue (3 ans) est compatible avec la présence d’un petit stock d’urgence, d’autant plus que son coût reste modeste. Car face à une intoxication, médicamenteuse entre autres, faire vomir le chien est l’un des premiers gestes d’urgence qui sauve… s’il en est encore temps.

Un dérivé dopaminergique de la morphine

Comme son nom l’indique, l’apomorphine est un dérivé de la morphine, mais sans activité analgésique ou addictive. Elle agit au niveau du système nerveux central en stimulant les récepteurs à la dopamine situés dans la « chemoreceptor trigger zone (CTZ) » à proximité du centre du vomissement. En médecine humaine, la même action dopaminergique conduit à l’indiquer comme traitement de la maladie de Parkinson (lors de crises sévères). L’effet émétique observé est alors considéré comme indésirable.

Ne pas répéter l’injection

Le résumé officiel des caractéristiques du produit (RCP) d’Emedog° signale qu’à doses élevées, l’apomorphine peut, à l’inverse, supprimer les vomissements en stimulant les récepteurs mu du centre du vomissement. C’est pourquoi il est recommandé de ne pas répéter l’injection.

95 % de vomissement dans les 2 à 15 minutes

La molécule lipophile franchit facilement la barrière hématoméningée pour atteindre le système nerveux central.

Son action est rapide : entre 2 et 15 minutes après l’injection, au maximum 18 minutes pour une efficacité proche de 95 % (selon une étude publiée en 2012 dans le JAVMA). Le pic plasmatique est atteint en 20 minutes. Elle est éliminée rapidement sous forme de métabolites conjugués inactifs avec une demi-vie d’élimination d’environ 26 minutes (± 4 minutes). Cela conduit à une mise en garde chez les insuffisants hépatiques qui pourraient éliminer moins rapidement l’apomorphine.

 Les contre-indications

Le RCP rappelle toutefois qu’il est parfois contre-indiqué de faire vomir un chien :

  • Lors d’ingestion d’agents caustiques (acides ou basiques), de produits moussants, de substances volatiles, de solvants organiques ou d’objets coupants (comme le verre),
  • En présence d’un risque de fausse déglutition en l’absence de réflexes pharyngés normaux, par exemple chez un animal comateux, anesthésié, en convulsions, trop faible, ataxique, ou hyperexcité ou sur un animal en état de choc…

Effets indésirables fréquents

Les effets indésirables fréquents, dits « mineurs et transitoires », sont les suivants :

  • Très fréquents (> 10 %), somnolence, salivation, modification de l’appétit, douleur à l’injection ;
  • Ou fréquents (1 à 10 %) : déshydratation légère, tachycardie puis bradycardie.

Lors de surdosage, une dépression respiratoire et/ou cardiaque, et une stimulation du système nerveux central (excitations, et convulsions) peuvent être observées. Et il peut alors être nécessaire de chercher à les réduire.

Antagoniste : le métoclopramide

Pour inverser ces effets indésirables ou des vomissements trop prolongés, le métoclopramide (Emeprid°, Ceva) est un antagoniste de la dopamine qui s’oppose donc aux effets de l’apomorphine. Le RCP cite aussi, comme antagonistes des effets indésirables sur le système nerveux central ou sur la dépression respiratoire, le maropitant (Cerenia°, Zoetis) et la naloxone.