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Elanco & Proplan

19 mai 2025

Poules de compagnie : quand la médecine aviaire devient individuelle

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Une étude rétrospective sur plus de 400 poules et coqs de compagnie présentés en consultation en 10 ans à la faculté vétérinaire de Vienne (Autriche) montre qu'il n'y a pas une mais quatre dominantes pathologiques. D'après Konicek et coll., 2025.
Une étude rétrospective sur plus de 400 poules et coqs de compagnie présentés en consultation en 10 ans à la faculté vétérinaire de Vienne (Autriche) montre qu'il n'y a pas une mais quatre dominantes pathologiques. D'après Konicek et coll., 2025.
 

Hospitalisations, scanners, interventions chirurgicales… Une étude rétrospective sur un peu plus de 10 ans des volailles ayant consulté au service de médecine aviaire de la faculté vétérinaire de Vienne (Autriche) montre que la prise en charge des poules relève de la médecine individuelle – avec un niveau de soins qui n'a rien à envier à celui des autres animaux de compagnie.

Consentement éclairé

Les dossiers électroniques des patients ayant fréquenté la clinique aviaire et herpétologique de la faculté vétérinaire entre le 1er mai 2009 et le 30 avril 2019 a fourni 419 individus de l'espèce Gallus gallus domesticus (poulets ou poules) : en moyenne 39 par an (de 8 à 72), âgés en moyenne de 1,5 an (du poussin d'un jour à la poule de plus de 7 ans). Dans la majorité des cas (84 %) il s'agit de poules. Il y a 13 % de coqs (et 3 % de sujets au sexe non déterminé). Les races de poules ne sont précisées que dans 23 % des cas (alors en majorité des Bantam). Lors de la consultation, et en cas de nécessité d'hospitalisation, « les propriétaires sont informés des coûts des procédures de diagnostic nécessaires et des options de traitement. En outre, ils doivent signer un formulaire de consentement reconnaissant que leurs poulets seront traités comme des animaux de compagnie. En cas d'utilisation de médicaments non autorisés pour les animaux de rente, ils sont aussi informés qu'ils ne devront plus consommer les œufs et la viande issus de leurs oiseaux ». Ces enseignants-chercheurs, pour l'essentiel cliniciens, évaluent les dominantes de l'analyse de ces dossiers.

Surtout des signes aspécifiques

Plus d'un cas sur quatre est présenté à la consultation en urgence (28 %), mais près de deux tiers des cas au total (63 %) ont nécessité une hospitalisation. Les auteurs précisent que dans 80 % des cas, les causes identifiées sont d'ordre individuel (le restant étant une affection « du troupeau »). Les signes et motifs notés à l'admission (386 des 419 cas) étaient aspécifiques dans plus de la moitié des cas (57 %) : léthargie (30 %), anorexie (11 %), distension cœlomique (9 %) et émaciation (4 %). Suivaient les affections respiratoires (18 %), locomotrices (16 %) et cutanées (y compris plumes, 16 %), juste devant les troubles gastro-intestinaux (15%). Les signes nerveux ou oculaires (8 %) et urogénitaux (5 %) étaient plus rares. Lorsqu'ils confrontent ces éléments aux données diagnostiques, les auteurs observent qu'il n'y a pas de réelle dominante pathologique : affections respiratoires, digestives, reproductrices et cutanées sont en proportions comparables, autour de 15 % des cas (voir l'illustration principale).

Parasitologie et microbiologie

Les affections digestives sont dominées par la parasitologie : 150 oiseaux ont ainsi été prélevés, et les deux tiers (66 %) ont fourni un résultat positif, le plus souvent pour un seul parasite (coccidies, Capillaria ou Ascaridia). Seuls 31 % des sujets positifs présentaient des signes (en général léthargie et anorexie) attribuables à la parasitose. Les autres causes d'affections digestives sont liées au gésier et en particulier à la présence de bézoars. Des analyses bactériologiques ont été réalisées sur 87 sujets (prélèvements du bec, des conjonctives, choanes, pharynx, gésier, cloaque…). Dans 47 % des cas, les auteurs obtiennent des E. coli, mais Pasteurella multocida est également fréquente (un quart des isolements). Dans 18 des 35 cas pour lesquels une recherche de mycoplasme a été réalisée (signes respiratoires), elle était positive (M. synoviae et M. gallisepticum dominent alors). Aucun des oiseaux présentés à la consultation n'était vacciné. À noter qu'E. coli et P. multicoda restent dominants dans les causes d'affections respiratoires.

Imagerie : ascites et salpingites !

Les dominantes des affections reproductrices sont le complexe des péritonites à jaune d'œufs/salpingites/impactions du salpinx (48 % de ces cas). Elles surviennent surtout sur des poules âgées de 2 à 3 ans. Les explorations réalisées comportent de l'imagerie : échographie (98 cas), radiologie (30 cas), voire scanner (26 cas). L'échographie est utile pour le diagnostic d'ascite (35 % des cas ayant eu cet examen), d'œufs malformés (17 %) et de la salpingite (17 %). La radiographie détecte – sans surprise — des pathologies du système squelettique (27 %), mais aussi une salpingomégalie (7 %). Le scanner « a permis de détecter le plus souvent une salpingite (31 %), suivie de pathologies du système squelettique (23 %) ». À noter qu'environ 20 % des cas sont liés à des néoplasies. Les pathologies du squelette concernent surtout des malformations (31 %), des fractures (20 %) et des arthrites (18 %).

Chirurgie et pododermatites

Sur les 262 sujets hospitalisés (les autres sont sortis avec un traitement à réaliser à domicile), 92 (35 %) ont subi une intervention chirurgicale. Le plus souvent, il s'agit d'une salpingohystérectomie (26 %), devant un débridement de plaie (20 %) ou une laparotomie (14 %). À noter que 11 % des interventions sont des débridements de pododermatites, indicatrices d'un bien-être nettement insuffisant chez ces animaux de compagnie. Au bilan, sur les 419 cas, un peu moins du tiers a été euthanasié (32 %), et la même proportion a vu ses signes cliniques s'améliorer, voire guérir. Les cas restants n'ont pas été présentés aux consultations de suivi (mais « ils ont survécu jusqu'à leur sortie de l'hôpital »). Le premier constat que dressent donc les auteurs, c'est que « la plupart des propriétaires sont désireux de traiter leurs poules et d'obtenir des soins vétérinaires avancés, ce qui souligne la nécessité de classer officiellement les poules de basse-cour comme des animaux de compagnie ». Le second, c'est que ces maîtres sont en déficit d'information, et en particulier de mesures préventives pour la santé de leur basse-cour, reflétant « une demande significative en recours aux vétérinaires ».