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16 avril 2024

La prévention de l'obésité féline passe par les chatons (et leurs propriétaires)

par Karin De Lange

Temps de lecture  7 min

Le risque d'apparition de l'obésité aux stades de croissance. PO : prévention de l'obésité selon la classe d'âge. En vert : risque minimal ; surveiller le poids chaque semaine pour assurer une croissance appropriée. En jaune : risque minimal ; surveiller poids toutes les deux semaines. En orange : risque modéré ; surveiller le poids toutes les deux semaines et peser la quantité d'aliment à donner en fonction des besoins énergétiques. En rouge : risque critique ; surveiller le poids chaque semaine et mettre en œuvre et maintenir des stratégies de prévention de l'obésité (d'après Godfrey et coll., 2024).
Le risque d'apparition de l'obésité aux stades de croissance. PO : prévention de l'obésité selon la classe d'âge. En vert : risque minimal ; surveiller le poids chaque semaine pour assurer une croissance appropriée. En jaune : risque minimal ; surveiller poids toutes les deux semaines. En orange : risque modéré ; surveiller le poids toutes les deux semaines et peser la quantité d'aliment à donner en fonction des besoins énergétiques. En rouge : risque critique ; surveiller le poids chaque semaine et mettre en œuvre et maintenir des stratégies de prévention de l'obésité (d'après Godfrey et coll., 2024).
 

Mieux vaut prévenir que guérir – et cela vaut aussi pour l'obésité. Chez les humains, une nutrition déséquilibrée pendant le développement fœtal et une surcharge pondérale chez l'enfant sont associées à des complications de santé à l'âge adulte, telles que l'obésité et le diabète sucré, selon l'hypothèse de Barker, dite aussi du “phénotype économe”. Des effets similaires ont été observés chez les chats. C'est pourquoi une équipe canadienne de biologistes et cliniciens vétérinaires de l'université de Guelph a réalisé une synthèse sur les chatons (castrés) âgés de 5 à 12 mois en tant que population cible principale pour la prévention de l'obésité féline, passant en revue les facteurs de risque et les stratégies de prévention.

Le problème de l'obésité – et de la perte de poids

L'obésité féline affecte 11 à 63 % des chats domestiques et peut entraîner de nombreux problèmes de santé, notamment la résistance à l'insuline, le diabète sucré, l'arthrose et des affections cutanées. En outre, des troubles concomitants peuvent survenir lors d'une perte de poids, comme le diabète sucré ou une lipidose hépatique féline, et peuvent compliquer le plan de perte de poids. Et ces plans de perte de poids ne sont pas toujours efficaces à long terme : il a été observé que la reprise de poids après une perte de poids réussie entraînait une masse grasse corporelle plus élevée que pendant la phase obèse initiale, chez tous les chats, dans les 14 semaines qui suivaient. Bien sûr, l'obésité féline a aussi un impact sur le porte-monnaie du propriétaire : les 12 premiers mois après le diagnostic d'obésité du chat coûtent plus de 1 000 US$ (930 €) en factures (à titre de comparaison, les dépenses vétérinaires annuelles moyennes chez le vétérinaire pour un chat aux USA en 2022 étaient estimées à 253 $). Les propriétaires de chats en surpoids ou obèses dépensent 36 % de plus en services de diagnostic et 53 % de plus en interventions chirurgicales que les propriétaires de chats de poids normal, selon des études récentes.

Facteurs de risque et le rôle de la castration

Les facteurs de risque de l'obésité féline comprennent l'âge, le sexe, la race, un mode de vie à l'intérieur, l'alimentation sèche, l'alimentation ad libitum et la fréquence d'alimentation, la surestimation des doses alimentaires, les perceptions erronées des propriétaires et même le lien humain-animal. Cependant, la gonadectomie est régulièrement signalée comme un facteur de risque majeur d'obésité féline. Plus de 80 % des chats en Amérique du Nord et jusqu'à 92 % des chats au Royaume-Uni sont castrés ou stérilisés. Bien que de nombreux avantages soient associés à la gonadectomie, son rôle dans l'apparition de l'obésité est jugé « alarmant » par ces auteurs. Après l'intervention, les besoins énergétiques d'un sujet sont réduits de jusqu'à 30 %, tandis que l'apport énergétique peut augmenter de jusqu'à 50 %, si le maître n'est pas rigoureux. En particulier, la stérilisation des chatons femelles nécessite une restriction énergétique stricte pour maintenir une note d'état corporel idéale. Et celles stérilisées précocement sont encore plus à risque de prendre plus de poids que les celles stérilisées plus tard dans la vie.

Se concentrer sur les chatons : l'hypothèse de Barker

La croissance du chat peut être décomposée en cinq étapes (voir le tableau en illustration principale). Pour éviter d'interférer avec la croissance squelettique, la prévention doit commencer dans la phase de croissance soutenue. Dans les enquêtes publiées, les propriétaires ont déclaré qu'ils seraient plus disposés à adhérer aux recommandations si les vétérinaires tenaient compte du mode de vie de leur animal de compagnie, fournissaient une variété de stratégies (différents choix alimentaires et régimes d'exercice), et expliquaient tous les aspects de manière claire et directe plutôt que de faire des suggestions ambiguës. Cependant, il apparaît que la prévention de l'obésité est en fait discutée dans moins de 25 % des consultations vétérinaires. Sans de tels conseils, les propriétaires ne disposent ni des outils, ni des connaissances appropriés pour gérer efficacement le poids de leur chat, rappellent les auteurs.

Quelques clés pendant la consultation

Une façon d'entamer la conversation sur le poids pendant la consultation est d'utiliser les tableaux de croissance des chatons (voir par exemple les graphiques ci-dessous). Cette discussion devrait également encourager l'accès à une échelle de poids et à son utilisation. Tracer le changement de poids sur un graphique, et montrer aux propriétaires comment le faire à la maison, leur permettra d'identifier un gain de poids rapide ou inapproprié après la stérilisation. Si un gain de poids rapide se produit, des ajustements au plan de prévention de l'obésité seront apportés et le poids corporel réévalué après 2 semaines. Pendant la croissance, une restriction énergétique n'est pas recommandée. C'est plutôt la prévention d'un gain de poids supplémentaire qui est encouragée. Par conséquent, l'estimation des besoins énergétiques et l'offre d'une nourriture adéquate seront préférées à l'alimentation du chaton à volonté. Le poids corporel attendu à l'âge adulte peut être estimé à l'aide des données publiées, ou à l'aide de graphiques de croissance élaborés à partir des données cliniques disponibles pour les chatons non castrés. Dans la discussion, les auteurs soulignent aussi l'importance de proposer au maître de préférer une balance, plutôt qu'une pelle ou un gobelet, pour mesurer la quantité d'aliment à donner quotidiennement.

Tableaux de croissance standard pour les chats européens à poil court mâles et femelles (d'après Salt et coll., 2022).

 

Gestion de l'alimentation

Car les chatons doivent être nourris avec une ration alimentaire qui réponde à leurs besoins énergétiques quotidiens (BEQ) et non à volonté. Pour les chats dans les ménages à plusieurs animaux, les mangeoires automatiques à micropuces ainsi qu'une séparation des animaux au moment des repas peuvent réduire la compétition alimentaire et la surconsommation. Bien que fractionner les repas puisse atténuer les problèmes de comportement et potentiellement améliorer le bien-être, l'alimentation une fois par jour peut être bénéfique. Elle promeut la satiété et l'oxydation des acides gras (par rapport à des repas fractionnés). Il est aussi utile de rappeler aux maîtres d'éliminer les restes de table et de minimiser les friandises : cela peut représenter jusqu'à 10 % du BEQ. Les jouets alimentaires, ou le fait de cacher de la nourriture au sein de la maison peuvent augmenter les mouvements des animaux et fournir un enrichissement. Consacrer un minimum quotidien de 15 minutes à jouer avec des jouets est également encouragé car cela permet non seulement une activité quotidienne régulière, mais améliore le lien homme-animal. Et cela fournit un enrichissement supplémentaire.

Interventions nutritionnelles et macronutriments

Indépendamment du stade de croissance et de la note d'état corporel, les chatons doivent recevoir une nourriture adaptée à leur stade de vie. Cependant, en raison de la forte densité en énergie, il est particulièrement important de respecter strictement le BEQ. Si la note d'état corporel d'un chaton est supérieure à l'idéal, les propriétaires ne devraient pas changer de régime alimentaire, par exemple en optant pour un aliment « minceur ». Les régimes riches en graisses peuvent représenter un défi pour la prévention de l'obésité après une gonadectomie. En ce qui concerne la prévention de l'obésité, les effets des fibres sur la satiété pourraient être bénéfiques pour les chats lorsqu'ils sont nourris à volonté (comme c'est souvent le cas avec les chatons).

La forme de l'aliment

Les auteurs soulignent que, lorsqu'ils sont nourris à volonté pendant 4 semaines après la gonadectomie, des chats consommant un aliment sec extrudé avaient un gain de poids plus important et une augmentation de leur note d'état corporel 5 et 6 semaines après la stérilisation, par rapport aux chats consommant un aliment humide. L'ajout de 40 % d'eau à un aliment sec a amélioré le niveau d'activité physique par rapport à un groupe témoin (aliment sec sans eau ajoutée). Et le gain de poids était plus faible, malgré un apport énergétique similaire. En d'autres termes, la teneur en humidité et une bonne hydratation peuvent jouer un rôle important dans la gestion du poids du chaton en croissance récemment stérilisé. Les auteurs suggèrent qu'en donnant la priorité à ces mesures, « les équipes vétérinaires et les propriétaires peuvent influencer positivement la santé des chats sur le long terme. En particulier, le rôle des interventions précoces dans la réduction des effets à long terme de l'obésité est vital » — littéralement.