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Elanco & Proplan

4 mars 2024

Face au besoin du propriétaire de distribuer des friandises à son animal, mieux vaut améliorer ses pratiques que les interdire

par Pascale Pibot

Temps de lecture  7 min

Les friandises ne devraient pas représenter plus de 10 % du total des calories alimentaires quotidiennes d'un chien (cliché Pixabay).
Les friandises ne devraient pas représenter plus de 10 % du total des calories alimentaires quotidiennes d'un chien (cliché Pixabay).
 

De nombreux propriétaires expriment leur amour pour leur animal en lui donnant à manger. Comme ils ont tendance à sous-estimer la valeur calorique de ces petits « plus » distribués au cours de la journée, ceux-ci peuvent finir par peser lourd dans le bilan calorique et favoriser l'installation d'un excès de poids.

Des études ont montré qu'il est très difficile de supprimer la distribution de friandises, même pendant les programmes de perte de poids. Une enquête nord-américaine s'est donc fixé comme objectifs d'évaluer la capacité des propriétaires de chiens et de chats à réduire la distribution de friandises, et d'identifier les obstacles à cette réduction.

Un questionnaire en ligne pendant 3 mois

Entre septembre et novembre 2021, un questionnaire a été diffusé aux États-Unis et au Canada via divers médias sociaux, à destination des groupes de propriétaires de chiens ou de chats. Le formulaire contenait 56 questions à choix multiples. Pour inciter à la participation, un tirage au sort des répondants permettait d'obtenir un bon d'achat.

Plusieurs réponses étaient acceptées pour la plupart des questions, et les répondants pouvaient développer leur(s) réponse(s) en texte libre. Des données ont été recueillies concernant l'âge, le sexe, le pays, le niveau d'éducation, l'expérience en matière de possession d'un animal et le nombre de personnes et d'animaux dans le foyer. Les informations relatives aux animaux comprenaient l'âge, le sexe, la note d'état corporel (NEC) et la présence d'un éventuel trouble de santé.

Les propriétaires ont évalué la NEC de leur animal à partir d'une échelle illustrée en 5 points : de 1 (très mince à 5 (obèse). Ils ont aussi été invités à évaluer leur capacité à réduire la consommation actuelle de friandises de leur animal, sur une échelle en 5 points : de 1 (très facile) à 5 (très difficile). Ils ont ensuite sélectionné leurs motivations et les difficultés rencontrées pour réduire cette distribution de friandises.

Lors de la clôture du questionnaire, 1 271 réponses avaient été enregistrées mais l'analyse des résultats ne porte que sur les 1053 questionnaires remplis intégralement ; 68 % des répondants possèdent un chien et 32 % un chat. Plus de la moitié des animaux déclarés ont moins de 4 ans et les trois quarts sont stérilisés.

Une réduction facile en théorie

La majorité des propriétaires jugent très facile (39 %) ou facile (23 %) de réduire la distribution de friandises. Seuls 4 % trouvent cela très difficile. Les propriétaires de chats sont plus nombreux que les propriétaires de chiens à trouver cela difficile.

Dans cette étude, la stratégie d'échantillonnage pourrait avoir favorisé la sélection de personnes préoccupées par la santé de leur animal. Et cela pourrait expliquer la facilité déclarée à réduire la consommation de friandises de son animal.

Prise de conscience de l'excès de poids de l'animal

Plus de la moitié des répondants considèrent la NEC de leur animal comme normale à idéale (à 3/5). Les propriétaires de chats sont cependant plus enclins à reconnaître le surpoids ou l'obésité de leur animal que les propriétaires de chiens : 29,1 % versus 10,6 %.

Plus des trois quarts des propriétaires ont coché la réponse « reconnaître que l'animal est en surpoids » comme premier critère d'incitation à réduire la distribution de friandises de leur animal, mais les propriétaires de chiens seraient davantage prêts à limiter les friandises que les propriétaires de chats.

Plusieurs répondants ont cependant mentionné dans les commentaires qu'ils préféreraient changer la nature des friandises avant de réduire la quantité distribuée.

Dans 70 % des cas, le fait qu'un vétérinaire ait dit que l'animal était en surpoids constituait le deuxième critère. Il reste à comprendre pourquoi les propriétaires sont souvent si réticents à demander l'avis du vétérinaire sur ces questions…

Mauvaises expériences antérieures avec des friandises

Plus de la moitié des personnes interrogées ont déclaré avoir été informées de la nocivité potentielle de certaines friandises, et avoir eu des expériences négatives en la matière. Le fait que les friandises puissent nuire à la santé de l'animal constitue un autre critère de motivation pour arrêter leur distribution.

C'est par exemple le cas des bâtons fabriqués à partir de bœuf séché (bully sticks), couramment donnés par les propriétaires. Ce type de friandises a été associé à la présence d'agents pathogènes, notamment Salmonella spp. et Clostridium difficile, qui présentent des risques pour l'animal mais aussi pour les propriétaires. Ces derniers apprécieraient de disposer d'informations fiables pour mieux choisir les friandises à distribuer.

Obstacles à la réduction de la distribution de friandises

Seuls 5 % des répondants n'ont signalé aucun obstacle à la réduction des friandises. Les propriétaires conscients de l'obésité de leur animal ont été plus nombreux à déclarer qu'il leur était difficile de réduire les friandises que les propriétaires trouvant la NEC de leur animal normale ou idéale. Ces résultats sont cohérents avec des études antérieures montrant que les propriétaires d'animaux obèses sont souvent réticents pour réduire ou éliminer les friandises lors du programme de perte de poids.

Trois autres principaux freins sont identifiés.

  • Les rôles « positifs » des friandises. Pour 64 % des propriétaires de chiens et 26 % des propriétaires de chats, l'utilisation des friandises en tant que récompenses pendant les séances d'éducation constitue un obstacle à la réduction de leur distribution aux animaux. Pour 5 % des répondants, les friandises sont jugées indispensables à l'administration de médicaments, à la santé dentaire et à l'enrichissement du milieu de vie de l'animal.
  • La routine. Pour 35 % des propriétaires de chiens et 33 % des propriétaires de chats, le fait de devoir changer les habitudes de l'animal (et leurs propres habitudes !) est un élément qui rend difficile la limitation de la distribution de friandises. Le manque de compliance des autres membres du foyer est également évoqué.
  • Le sentiment de culpabilité. Le sentiment de culpabilité de devoir refuser une friandise à un animal qui en réclame est plus présent chez les propriétaires de chats que de chiens. Les répondants décrivent le regret de perdre des occasions d'entretenir le lien avec leur animal.

L'ensemble de ces freins augmente la probabilité que les propriétaires déclarent qu'il est difficile de limiter la distribution de friandises à leur animal.

Plusieurs voies de travail

Afin d'éviter la suralimentation, les nutritionnistes recommandent que les friandises ne représentent pas plus de 10 % du total des apports caloriques quotidiens des chiens et des chats. Plusieurs autres recommandations peuvent cependant être faites par les vétérinaires pour inciter les propriétaires à faire attention.

Les résultats de cette étude soulignent l'importance de prendre en compte les circonstances dans lesquelles les propriétaires donnent des friandises à aux animaux, qui sont souvent différentes entre les chiens et les chats. La compréhension des divers facteurs qui s'opposent à limiter la consommation de friandises peut aider à fournir des conseils sur mesure. Les propriétaires apprécient de recevoir des recommandations personnalisées, qui prennent en compte leurs habitudes et leurs préférences.

Ainsi, faire régulièrement le point sur l'état corporel de l'animal au cours des consultations et proposer des conseils nutritionnels peut aider les propriétaires à prendre conscience du problème de l'excès de poids. Ils accepteront mieux de revoir leurs pratiques alimentaires s'ils sont informés du rôle des friandises sur la santé de leur animal.

Lorsque la distribution de friandises fait partie de la routine du propriétaire et peut difficilement être remise en cause, il est intéressant de proposer d'opter pour des aliments « sains » : peu caloriques et bons pour la santé de l'animal. Cela se révèle particulièrement utile quand les friandises sont utilisées comme récompenses pendant les séances d'éducation.

Enfin, la mise en place de nouveaux rituels centrés sur le jeu rend possible de contourner un obstacle fréquent (surtout avec les chats), à savoir la « demande » perçue de friandises par l'animal à son propriétaire. Des études antérieures ont d'ailleurs montré que certains propriétaires interprètent à tort le désir d'attention manifesté par le chat comme une demande de nourriture. Le jeu est en outre favorable à la prévention de l'excès de poids.  

Cette étude suggère finalement qu'il est plus judicieux de promouvoir des bonnes pratiques en matière de friandises que de conseiller aux propriétaires de stopper totalement leur distribution.