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Elanco & Proplan

4 septembre 2023

La mesure de la pression artérielle chez le chat cumule trop de difficultés pour devenir facilement routinière

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Le transport du chat à la clinique, et le stress occasionné, demeurent un frein majeur à une mesure régulière de la pression artérielle, même si l'animal y a été habitué chaton (cliché Pixabay).
Le transport du chat à la clinique, et le stress occasionné, demeurent un frein majeur à une mesure régulière de la pression artérielle, même si l'animal y a été habitué chaton (cliché Pixabay).
 

Quels sont les freins qui s'opposent à une mesure plus systématique de la pression artérielle chez le chat ? Cette mesure est pourtant recommandée en routine, en particulier chez le chat senior, au vu de son intérêt dans le dépistage de l'hypertension, si fréquente et aux conséquences potentiellement graves.

Une enquête auprès de plus de 600 vétérinaires et ASV, essentiellement britanniques, pointe entre autres les difficultés techniques et l'aspect chronophage de la procédure.

Des réponses de vétérinaires et ASV en clinique généraliste

Les résultats de l'enquête, réalisée en Écosse par l'Université d'Édimbourg et la société de formation et conseil Vet Professionnals, avec le concours de Ceva santé animale, sont publiés en libre accès dans le JFMS. Son objectif était d'évaluer les pratiques actuelles, en termes d'équipement et de protocoles notamment, ainsi que les raisons freinant la systématisation de l'examen. Divers travaux d'études ont effectivement constaté que l'appareil demeure souvent dans le placard, mais sans nécessairement en préciser le pourquoi.

Le questionnaire, disponible en ligne entre mi-mai et fin juillet 2022, était destiné aux vétérinaires praticiens et leurs équipes. Il contenait 30 questions, et 4 optionnelles pour indiquer les éventuelles solutions trouvées pour contourner les difficultés rencontrées. Il a récolté 630 réponses exploitables (dont 545 complètes), de la part de vétérinaires (43 %) ou ASV (nurses, 54 %), en large majorité des britanniques (à 91 %). La plupart des participants (88 %) travaillent dans une clinique de pratique généraliste, les autres étant employés en clinique de référé (4 %) ou féline exclusive (3 %).

Un tensiomètre à portée de main

Quasiment toutes les cliniques sont équipées d'appareils de mesure de la pression artérielle systémique – seuls 1,3 % des répondants (n=8) n'y ont pas accès.

Il s'agit d'un appareil Doppler en majorité (88 % des cas), un oscillométrique moins souvent (33 %), certains établissements disposent des deux.

Le Doppler est le plus souvent choisi, en particulier lors de mesure chez un chat vigile, la raison évoquée étant la meilleure fiabilité des résultats obtenus. Lorsque la méthode oscillométrique est le premier choix, c'est pour sa facilité et sa rapidité d'utilisation.

2 personnes pour tenir le chat

La mesure sur chat vigile nécessite d'être deux selon les deux tiers environ des répondants.

Le propriétaire est plutôt présent – contribuant alors à la contention de son chat – ou plutôt absent dans les mêmes proportions (environ 30 %), sa présence est variable selon les 30 % restants des répondants. Au-delà de son aide active, le propriétaire a une « présence apaisante » pour son chat.

Proposer de venir à domicile effectuer les mesures est un service rare (moins de 8 %), en raison du coût et du besoin en personnel associés ; la crise Covid l'a également freiné.

Conseillé à 44 % pour un chat de 15 ans

Une mesure de la pression artérielle est le plus souvent proposée face à des troubles évocateurs d'une hypertension avec lésions des organes cibles, en particulier oculaires. Elle l'est aussi, dans une moindre mesure, en cas de protéinurie.

Une mesure de routine est conseillée aussi dans le suivi des chats atteints de maladie rénale chronique (par près de 80 % des répondants) ou d'hyperthyroïdie (par environ 60 % des répondants).

En revanche, malgré les recommandations actuelles, le suivi de la pression artérielle des chats âgés en bonne santé est peu proposé aux propriétaires. Il l'est en routine par 44 % des répondants pour un chat de 15 ans et plus, mais par à peine plus de 30 % des répondants pour un chat de 11 ans ou plus, et par moins de 20 % à partir de 7 ans.

La mesure de la pression artérielle fait partie du bilan pré-anesthésique du chat en apparente bonne santé dans 18,6 % des cliniques. Elle est souvent mesurée, en revanche, chez l'animal tranquillisé ou anesthésié.

Lorsque mesurer la pression artérielle du chat est recommandée au propriétaire, la recommandation est suivie par 75 à 100 % des propriétaires selon 32 % des répondants, par 50-75 % d'entre eux selon 33 % des répondants, mais par moins de 25 % selon 12 % des répondants. Ceux qui sont le plus écoutés sont aussi ceux qui le conseillent le plus souvent à leurs clients.

Des freins pratiques

Les freins à une systématisation de la mesure sont d'abord relatifs au matériel et à la procédure. Ainsi, la disponibilité de l'appareil n'est pas un problème (les cliniques sont bien équipées), mais des brassards inadaptés (créant des artéfacts de mesure) ou des difficultés à entendre le son marquant l'effet Doppler sont souvent rapportés. La mesure par méthode oscillométrique peut également être ineffective. La réalisation de la mesure est jugée compliquée, stressante (pour l'opérateur), pour des résultats dont la fiabilité est finalement douteuse.

La procédure est aussi chronophage : le manque de temps pour la mise en œuvre, au moins occasionnellement, est regretté par près des trois quarts des répondants. Le manque de personnel disponible pour la contention est une autre difficulté, mais moins fréquente.

D'autres freins sont relatifs au chat, avec la problématique bien connue de l'hypertension de stress, « même chez un chat apparemment calme ». De nombreux chats ne tolèrent pas l'examen. Un tranquillisant (gabapentine, trazodone) est parfois prescrit pour administration préalable à la consultation, par les deux tiers des répondants.

Enfin, les freins relatifs au propriétaire sont avant tout d'ordre financier, mais aussi pratique, amener le chat à la clinique étant contraignant en termes de disponibilité et de difficultés pour le transport.

Déléguer aux ASV ?

Beaucoup de participants ont partagé les solutions mises en œuvre ou à réfléchir pour pallier ces difficultés. Par exemple inclure l'examen dans la consultation, sans le facturer en plus, ou, faute de temps, garder le chat à la clinique (dans un environnement calme) pour réaliser la mesure plus tard. La délégation aux ASV est également proposée.

Une meilleure sensibilisation des propriétaires de chat, afin de favoriser leur acceptation, malgré les contraintes associées, est également souhaitée. De même que des formations pratiques à la réalisation de l'examen.