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24 février 2021

Un Ac monoclonal, le bedinvetmab (Librela°), injecté une fois par mois, cible la douleur des chiens arthrosiques

par Eric Vandaële

Temps de lecture  6 min

Pour soulager les chiens arthrosiques, Zoetis commercialise un Ac monoclonal, le bedinvetmab (Librela°) en petits flacons de 1 ml à injecter par voie SC tous les mois. Après 2 injections SC d'un ml, environ un chien sur deux est soulagé par ce médicament immunologique à conserver au froid comme les vaccins. Photo Today's Veterinary Business.
Pour soulager les chiens arthrosiques, Zoetis commercialise un Ac monoclonal, le bedinvetmab (Librela°) en petits flacons de 1 ml à injecter par voie SC tous les mois. Après 2 injections SC d'un ml, environ un chien sur deux est soulagé par ce médicament immunologique à conserver au froid comme les vaccins. Photo Today's Veterinary Business.
 

Les centrales viennent de référencer dans leurs stocks un nouveau traitement injectable de Zoetis pour contrôler la douleur chez les chiens arthrosiques : les solutions injectables de bedinvetmab : Librela°. Il s'agit du second Ac monoclonal — d'où le suffixe mab — développé pour la médecine vétérinaire — suffixe vetmab — après le lokivetmab Cytopoint° contre l'atopie canine, également développé par Zoetis.

Ce nouvel anticorps monoclonal est donc classé comme un médicament immunologique et non comme un médicament chimique. Son action est ciblée sur le facteur de croissance des nerfs ou NGF. Ce facteur est connu pour son rôle dans la survie et la croissance neuronale. Ce facteur est présenté ici comme un médiateur de l'inflammation. Il a été démontré que l'inhibition de la signalisation cellulaire stimulée par le NGF, procure un soulagement de la douleur associée à l'arthrose.

Il s'agit donc d'une nouvelle voie thérapeutique différente et complémentaire à celle des AINS inhibiteurs des cox et du grapiprant (Galliprant°), le premier antagoniste du récepteur EP4 de la PgE2.

Une injection SC d'un ml tous les mois

Comme pour Cytopoint° contre la dermatite atopique, le schéma posologique repose sur une injection SC par mois de bedinvetmab sur la base d'une posologie comprise entre 0,5 et 1 mg/kg.

Les flacons unitaires d'un ml de la solution injectable, référencés en centrales par boîte de deux, se présentent en cinq dosages :

  • 5 mg pour un chien de 5 à 10 kg pour un coût HT centrale d'environ 45 € les deux flacons de 5 mg. Si le chien arthrosique pèse moins de 5 kg, la dose est de 0,1 ml/kg (0,5 mg/kg) à prélever dans ce flacon de 5 mg pour un ml ;
  • 10 mg pour un chien de 10 à 20 kg pour un coût HT centrale de 55 € les deux flacons de 10 mg ;
  • 15 mg pour un chien de 20 à 30 kg (0,5 à 0,75 mg/kg), pour un coût HT centrale aux alentours de 65 € les deux flacons ;
  • 20 mg pour un chien de 30 à 40 kg (0,5 à 0,67 mg/kg) à environ 70 € HT centrale les deux flacons et,
  • 30 mg pour 40 à 60 kg (0,5 à 0,75 mg/kg) à environ 75 € HT centrale les deux flacons.

Les flacons se conservent deux ans au réfrigérateur entre +2 °C et +8 °C. Comme les vaccins, ils ne se conservent pas après ouverture.

L'état d'équilibre n'est atteint qu'après la seconde dose

Selon le résumé officiel des caractéristiques du produit (RCP) de Librela°, les concentrations sériques maximales (Cmax) de bedinvetmab sont atteintes entre 2 et 7 jours (Tmax de 5,6 jours) après une injection SC à la dose recommandée sur des chiens Beagle en bonne santé. La demi-vie d'élimination est d'environ 12 jours. Dans une étude clinique sur le terrain, sur des chiens arthrosiques, cette demi-vie d'élimination était en moyenne de 16 jours. L'état d'équilibre (ou steady-state en anglais) est atteint après deux injections espacées d'un mois. En pratique, l'efficacité devrait donc être un peu meilleure après la seconde injection qu'après la première. Les Ac monoclonaux, comme les autres Ac, sont des protéines. Ils sont dégradés en peptides puis en acides aminés par les mêmes voies cataboliques que pour des protéines endogènes.

Un succès sur 50 % chiens après la seconde injection

Les données cliniques présentées dans le RCP confirment ce profil pharmacocinétique. Contrairement aux AINS qui agissent rapidement sur la douleur et l'inflammation, l'efficacité de cet Ac monoclonal démarre plus lentement.

  • Sept jours après la première injection, le taux de succès du traitement est de 17,8 % avec l'Ac monoclonal versus 3,8 % pour le placebo. Le succès est ici défini par la réduction d'au moins un point du score de douleur évaluée par le propriétaire (notée sur 10) et d'au moins deux points des conséquences délétères de la douleur sur l'activité du chien, sa joie de vie, la marche, la course, la montée des escaliers… (aussi notées sur 10). Ces critères sont ceux déjà couramment utilisés pour évaluer l'efficacité des AINS sur la douleur et le confort de vie.
  • Quatre semaines après la première injection, le taux de succès est de 43,5 % dans le groupe des chiens traités (n = 141), versus 16,9 % pour le placebo (n = 146).
  • Après la seconde injection, le taux de succès est aux alentours de 50 %.
  • « Si aucune réponse ou une réponse faible est observée après la première injection, la réponse peut encore être observée après la seconde injection un mois plus tard. Cependant, si l'animal ne présente pas une meilleure réponse après cette deuxième dose, » le RCP recommande « d'envisager des traitements alternatifs ».

Peu fréquents, les Ac anti-bedinvetmab interfèrent-ils avec l'efficacité ?

L'anticorps monoclonal étant une protéine, « il peut aussi induire des Ac anti-bedinvetmab transitoires ou persistants » prévient le RCP. « L'induction de tels anticorps est peu fréquente. Elle peut n'avoir aucun effet ou elle peut entraîner une diminution de l'efficacité chez les animaux ayant répondu au traitement antérieurement » poursuit-il. Néanmoins, « dans des études terrain sur des chiens arthrosiques, l'apparition d'Ac anti-bedinvetmab était peu fréquente [deux chiens sur 82] » sans être à l'origine de signes cliniques indésirables.

Prudence en cas d'association avec un AINS sur le long terme

Ce traitement étant destiné à être injecté tous les mois « à vie » sur des chiens souvent âgés, il est légitime de s'interroger sur les interactions avec d'autres traitements, notamment les AINS. Sur des jeunes chiens en bonne santé (sans arthrose), « aucun effet indésirable » n'a été observé en associant le bedinvetmab à un AINS, en l'occurrence le carprofène, pendant deux semaines. L'éventuel gain d'efficacité n'a évidemment pas été étudié sur ces jeunes chiens qui ne présentaient aucune douleur arthrosique.

Mais le RCP est plus prudent sur l'innocuité à long terme de l'association de cet Ac monoclonal avec un AINS. « Lors d'essais cliniques chez l'homme, une arthrose à évolution rapide a été rapportée chez des patients recevant un traitement par un anticorps monoclonal anti-NGF humanisé. L'incidence de ces événements — dose dépendants — a augmenté chez les patients qui étaient aussi traités par un AINS sur du long terme (plus de 90 jours) ». Toutefois, « l'équivalent de cette arthrose humaine à évolution rapide n'a pas été rapporté chez le chien » rassure aussi le RCP sur ce point.

Des réactions locales peu fréquentes au point d'injection

« Aucune autre étude de laboratoire sur l'innocuité de l'administration concomitante avec d'autres médicaments vétérinaires n'a été menée ». Néanmoins, dans les essais terrain, « aucune interaction n'a été observée avec des antiparasitaires, des antibiotiques, des topiques antiseptiques avec ou sans corticoïdes, des antihistaminiques et des vaccins ». Sur les vaccins, il reste toutefois recommandé de ne pas les administrer au même endroit que Librela° « afin de réduire tout impact potentiel sur l'immunogénicité du vaccin ».

Du côté des effets indésirables, le RCP ne rapporte que des « réactions modérées peu fréquentes [0,1 % à 1 %] au site d'injection (par exemple gonflement et chaleur) ».