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14 mai 2019
Remises interdites sur les biocides. Un projet de décret en limite la portée surtout aux insecticides de l'habitat
Comme pour les antibiotiques, les remises sur « certains » biocides devraient être interdites depuis le 1er janvier 2019. C'est l'une des dispositions phares de la loi Egalim du 30 octobre 2018 (voir les Fils du 13 novembre 2018 et du 17 janvier 2019). « Certains » mais pas tous ! Un décret doit fixer les catégories de biocides visés par cette interdiction. Très attendu, le ministère de l'environnement a diffusé ce projet de décret. Il complexifie cette mesure en faisant une sélection multicritère des produits biocides visés par cette interdiction.
En fait, la loi Egalim a inscrit dans le code de l'environnement depuis le 1er janvier 2019 non pas une mais trois interdictions pour certaines catégories de biocides qui sont fixées par ce décret.
Les remises, rabais et ristournes et toute pratique commerciale équivalente (art. L. 522-18) seront interdites à l'achat comme à la revente sous peine d'une amende de 15000 € à 75000 € (art. L. 522-19). En d'autres termes, les fournisseurs ne pourront plus vous accorder de remises ou de promotion en unités gratuites ou d'autre avantage commercial. Et, la clinique vétérinaire ne pourra pas non plus faire des remises (ou des pratiques commerciales équivalentes) à ses clients.
Le projet de décret prévoit de limiter cette interdiction de remises « aux produits commerciaux à destination d'un usage grand public ». Les achats de biocides réservés (exclusivement) à l'usage professionnel devraient pouvoir continuer à bénéficier de remises, notamment pour les grossistes et les structures vétérinaires. Et les détaillants pourront aussi continuer à accorder des remises aux éleveurs professionnels.
Le projet de décret prévoit une application immédiate (au lendemain de sa parution au Journal officiel). Et, pour les contrats commerciaux, l'article 96 de la loi Egalim prévoit que ces interdictions « s'appliquent aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er janvier 2019 ».
La publicité est aussi interdite pour certains biocides avec deux dérogations auprès des professionnels : sur les lieux de ventes aux professionnels, par exemple aux éleveurs, et dans des revues spécialisées (art. L. 522-5-2). Aucune dérogation n'est prévue pour les publicités destinées au grand public. Les vétérinaires ne devront pas laisser de posters ou des publicités sur ces biocides dans la salle d'attente ou le hall d'accueil.
Enfin, la vente en libre-service sera aussi interdite pour certains biocides (art. L. 522-5-3). Cela revient à éviter qu'un client puisse prendre en rayon des produits dangereux et passer en caisse sans qu'aucun conseil d'usage, de stockage et d'informations sur les risques pour lui-même et son environnement lui ait été délivré au moment de la vente. De ce point de vue, les ventes sur les boutiques en ligne ne sont pas une forme particulière de vente en libre-service. Des conseils d'usages et des précautions peuvent être délivrés au moment du passage de la commande en ligne… Par internet, le client ne prend pas directement le produit en rayon !
Sur cette interdiction des ventes en libre-service, le projet de décret ne fixe pas les catégories de biocides concernées, mais renvoie à la publication ultérieure d'un arrêté en s'appuyant sur un avis de l'Anses. L'objectif serait de cibler les biocides « à risques » : « liés à des cas d'intoxications » ou « pour lesquels des résistances sont avérées ». Voilà qui nécessite l'expertise de l'Anses.
Selon le projet de décret, les deux premières interdictions de remises et de publicité concerneraient les mêmes catégories de biocides avec toutefois une restriction importante aux produits biocides « destinés à un usage par le grand public » pour l'interdiction des remises. Les quatre catégories de biocides visés sont suivantes :
Les désinfectants dits vétérinaires de TP3 (pour les locaux ou la peau des animaux) ne sont apparemment pas concernés, mais apparemment seulement. Car plusieurs dizaines ou centaines de désinfectants vétérinaires (TP3) sont « mixtes » et également enregistrés en TP2 (surfaces inertes) ou en TP4 (surfaces alimentaires). Il conviendra donc de vérifier « au cas par cas » le statut des désinfectants utilisés en santé animale (TP3) pour la biosécurité ou dans les cliniques vétérinaires (TP2 et/ou TP3) pour la désinfection des locaux, des tables ou autres surfaces inertes. Ils ne seront toutefois pas visés par une interdiction de remises s'ils sont enregistrés exclusivement pour un usage « professionnel », ce qui est très souvent le cas.
Point important, les médicaments APE (antiparasitaires externes) avec les mêmes substances actives que ces biocides, par exemple des pyréthrinoïdes, ne sont évidemment pas classés comme des biocides. C'est important dans ce contexte des interdictions sur les remises, sur la publicité et sur la vente en libre-service. Les médicaments APE ne sont donc pas visés par ces interdictions. De même, les médicaments à base de chlorhexidine (Hibitane°, Malasseb°, Adaxio°, Cicajet°) ou de povidone iodée (Vétédine°) ne sont pas des biocides, même si la plupart des produits concurrents sont classés dans les biocides.
Pour connaître les produits biocides potentiellement concernés par ces interdictions, la base de données officielle simmbad permet de faire une recherche multicritère sur les trois critères figurant dans le projet de décret :
En pratique, l'interdiction de remises (et de publicité) devrait finalement surtout cibler deux classes de biocides revendus par les cliniques vétérinaires :
Les insecticides pour les locaux d'élevage (Neporex°, Quick Bayt°, K-othrine°, Mefisto°…) sont presque tous réservés à un usage professionnel. Ils ne seront pas visés
Les désinfectants utilisés ou mêmes revendus par les vétérinaires ne devraient pas être nombreux à être concernés l'interdiction de remises commerciales. En particulier, ne sont pas concernés :
Les biocides, ces produits qui, étymologiquement « tuent la vie », sont plusieurs milliers : du désinfectant virucide au raticide en passant par les insecticides et les produits du traitement du bois de charpente ou contre les algues dans les piscines. Comme les biocides « tuent la vie », ils sont a priori considérés comme des toxiques pour la santé et pour l'environnement. Leur évaluation a démarré en 1998. Plus de vingt ans plus tard, elle est très loin d'être achevée par l'agence européenne des produits chimiques (ECHA) même si des centaines de substances actives ont disparu. À long terme, tous les produits biocides devraient être autorisés avec une AMM biocide, selon un dispositif proche de celui des AMM des médicaments.
Les biocides sont classés en 22 types d'usages, appelés TP, du TP1, le savon désinfectant pour les mains du chirurgien par exemple, au TP22, les produits pour l'embaument des cadavres et la taxidermie.
Les produits biocides qui peuvent intéresser les vétérinaires sont principalement ceux des huit catégories suivantes :
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