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Elanco & Proplan

18 juin 2025

Les signes de douleur aiguë chez le chien : apprendre aux propriétaires à les reconnaître et à bien réagir

par Pascale Pibot

Temps de lecture  6 min

Grille d'évaluation de la douleur aiguë chez le chien (CSU-CAPS)
La version simplifiée de la grille CSU-CAPS (reproduite ici) utilisée dans cette étude apparaît utile aux yeux des propriétaires pour détecter une douleur aiguë chez leur chien.
Grille d'évaluation de la douleur aiguë chez le chien (CSU-CAPS)
La version simplifiée de la grille CSU-CAPS (reproduite ici) utilisée dans cette étude apparaît utile aux yeux des propriétaires pour détecter une douleur aiguë chez leur chien.
 

Grâce au développement et la validation de plusieurs grilles d'évaluation, les vétérinaires praticiens ont appris à mieux évaluer la douleur chez les chiens et les chats. Toutefois, ils ne peuvent la soulager que si les propriétaires sont capables de repérer les signaux d'alerte chez leur animal, une condition essentielle pour motiver une consultation vétérinaire.

Un changement de comportement du chien

Des études sur les douleurs chroniques (liées par exemple à l'arthrose) ont montré que des propriétaires bien informés sont capables de détecter la douleur de leur animal. Les expressions faciales, le niveau d'activité, le sommeil, l'appétit et les interactions sociales sont autant de paramètres qu'ils peuvent facilement analyser.

Dans une étude menée à l'Université d'État du Colorado en 2023, des chercheurs se sont penchés sur les critères qui peuvent pousser les propriétaires de chiens à consulter (ou non) leur vétérinaire en cas de douleur plus aiguë. Les 367 participants à l'enquête, âgés d'au moins 18 ans, ont été recrutés via un site de vente en ligne (Qualtrics).

Trois scénarios leur étaient présentés (dans un ordre aléatoire), commençant toujours par : « Vous avez une chienne croisée de 5 ans qui a toujours été heureuse et en bonne santé… »

  • Scénario « brusque » : « elle a toujours aimé les caresses mais elle interagit moins avec la famille et réagit brusquement quand elle ne veut pas être caressée ».
  • Scénario « oreille » : « elle a toujours aimé qu'on lui frotte les oreilles mais maintenant elle s'éloigne lorsqu'on essaye de lui caresser la tête ».
  • Scénario « marche » : « elle marche d'une drôle de façon. Il n'y a rien d'anormal à l'examen de ses pattes mais elle s'éloigne quand on les manipule ».

Pour chaque scénario, les participants étaient invités à noter leur niveau d'inquiétude (de 1 à 4) à propos du changement de comportement du chien. Ils devaient aussi préciser quelle attitude ils adopteraient : « je consulte le vétérinaire immédiatement », « j'attends avant de consulter le vétérinaire » ou « je ne consulterais probablement pas le vétérinaire pour ce motif ». Si les participants ne choisissaient pas la première option, il leur était proposé 24 facteurs susceptibles de les influencer, qu'ils devaient noter de 1 à 4.

Les participants ont ensuite reçu des informations à propos de l'expression de la douleur chez le chien. Puis ils ont répondu à nouveau aux mêmes questions, afin d'évaluer l'influence de la formation sur leurs réactions.

Attachement déclaré au chien

Le niveau d'attachement des propriétaires à leur chien a été estimé grâce à la Lexington Attachment to Pets Scale (LAPS) avant qu'ils ne répondent aux questions. La plupart des propriétaires déclaraient ainsi être très attachés à leur animal, capables de le comprendre et d'établir un lien avec lui. La majorité (61 %) estimait sa capacité à interpréter ses comportements comme « bonne » (voire « excellente » dans 36 % des cas).

Pour les trois scénarios, l'attachement déclaré au chien était un facteur prédictif significatif de la promptitude à s'inquiéter et du désir de consulter un vétérinaire.

Connaissance du langage corporel canin

Plus de 60 % des propriétaires interrogés n'avaient qu'une confiance « modérée » en leur capacité à détecter la douleur chez leur chien. Les propriétaires les moins confiants étaient aussi les moins susceptibles de se déclarer inquiets à cause d'un changement de comportement, et les moins enclins à vouloir consulter un vétérinaire.

L'analyse statistique des réponses des participants a cependant confirmé l'hypothèse des auteurs de l'étude : une fois que les propriétaires ont reçu des informations, même succinctes, à propos du langage corporel des chiens qui ont mal, ils s'inquiètent plus facilement de la présence de signes anormaux, et la probabilité qu'ils consultent le vétérinaire augmente. Il est donc important que les vétérinaires aident les propriétaires à reconnaître une douleur potentielle chez leur chien.

Attention portée à sa propre douleur

L'attention portée à sa propre douleur semble aussi être un facteur qui influence l'attention portée à la douleur du chien. Dans les scénarios de l'oreille et de la marche, les propriétaires les moins enclins à vouloir traiter leur propre douleur étaient aussi les moins préoccupés par le changement de comportement de leur chien, et les moins enclins à consulter le vétérinaire.

Bonnes relations avec le vétérinaire

Sans surprise, les propriétaires ayant une relation négative ou neutre avec leur vétérinaire étaient moins susceptibles de consulter immédiatement que ceux entretenant une excellente relation avec lui.

Les propriétaires qui ont déclaré voir leur vétérinaire plus de deux fois par an étaient aussi plus susceptibles de consulter immédiatement que ceux qui fréquentent la clinique vétérinaire moins d'une fois par an.

Les freins à la consultation

À la fin du questionnaire, les propriétaires réticents à contacter leur vétérinaire ont dû sélectionner les raisons de leur choix.

Quel que soit le scénario, le coût de la consultation ou du traitement vient en tête des facteurs susceptibles de repousser la consultation (aux États-Unis, le coût des soins vétérinaires a presque triplé en 20 ans).

Viennent ensuite les arguments tels que la crainte qu'il s'agisse de quelque chose de très grave, le stress lié à la visite vétérinaire, et les difficultés pratiques pour se rendre à la clinique.

Bien choisir les supports éducatifs

À la fin de l'enquête, il a été demandé aux propriétaires d'évaluer la qualité des outils utilisés pour les aider à interpréter les comportements de leur chien et prendre les bonnes décisions concernant sa santé.

Presque 90 % des propriétaires ont alors jugé utile la grille d'évaluation utilisée par les auteurs pour les aider à identifier une douleur aiguë. Il s'agissait d'une version simplifiée de la Colorado State University Canine Acute Pain Scale (CSU-CAPS, voir en illustration principale), incluant des illustrations des postures du chien, une échelle analogique de la douleur et des descriptions brèves des comportements liés à la douleur. La plupart des propriétaires (84 %) ont également déclaré que cette grille pouvait les aider à savoir s'il fallait consulter le vétérinaire, et 89 % estiment qu'elle est utile pour décrire le niveau de douleur du chien au vétérinaire.

Pour ces trois critères, les participants ayant déclaré avoir une grande capacité à détecter la douleur chez leur chien ont trouvé la CSU-CAPS plus utile que ceux ayant des doutes quant à leur capacité à le faire.

Ainsi, lorsque mal informés, les propriétaires sous-estiment souvent la douleur de leur animal, mais les résultats de cette étude confirment des recherches antérieures qui suggèrent que lorsqu'ils sont avertis, les propriétaires peuvent reconnaître les comportements et les postures liés à la douleur chez leur chien. Des grilles d'appréciation simples peuvent les aider à évaluer le niveau de douleur de l'animal et à prendre des décisions plus éclairées quant à la nécessité de le faire soigner.