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28 novembre 2022

Syndrome “Fanconi-like” lié à des friandises carnées : meilleur pronostic sur le long terme

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Évolution clinique de 30 chiens diagnostiqués avec un syndrome Fanconi-like induit par des friandises carnées, dans l'une des études rétrospectives documentant de manière importante le suivi de ces cas. L'astérisque figure un cas ayant développé une maladie rénale chronique (Nybroe et coll., 2022).
Évolution clinique de 30 chiens diagnostiqués avec un syndrome Fanconi-like induit par des friandises carnées, dans l'une des études rétrospectives documentant de manière importante le suivi de ces cas. L'astérisque figure un cas ayant développé une maladie rénale chronique (Nybroe et coll., 2022).
 

La consommation excessive de friandises à base de viande séchée peut conduire à une tubulopathie proximale induisant un syndrome “Fanconi-like”, se soldant par une polyuro-polydipsie, une glycosurie (sans hyperglycémie), de la fatigue, etc. Décrit aux USA à partir de 2007, cette affection a depuis été reconnue partout ailleurs, du Japon à l'Europe. Il est considéré comme de mauvais pronostic : aux États-Unis, plus de 8 500 chiens en ont déjà été victimes. Des cliniciens de la faculté vétérinaire de Copenhague (Danemark) et de cliniques privées viennent de publié les résultats du suivi à long terme (jusqu'un an) de 30 cas ; ils montrent que le pronostic n'est pas si sombre, mais que le temps de convalescence se compte en mois.

En cuillères

Les auteur ont réalisé un suivi de cohorte rétrospectif, en faisant un appel à témoins auprès des praticiens et des propriétaires, via les réseaux sociaux, mais aussi la presse professionnelle et éleveurs. Les praticiens signalant de tels cas devaient obtenir le consentement du maître avant de transmettre le dossier de l'animal aux auteurs. Les maîtres étaient alors contactés, pour remplir un questionnaire complémentaire. À l'inverse, si les maîtres se signalaient directement, il leur était demandé les coordonnées du vétérinaire traitant et l'autorisation de le contacter. Le questionnaire aux maîtres quantifiait les friandises ingérées par les chiens avant l'identification du syndrome (15 g pour une petite, 30 g pour une grande, et s'il s'agissait de cubes, mesure en cuillères à café ou à soupe). Celui adressé au praticien concernait l'évolution de l'affection et le suivi de l'animal.

PU-PD avec glycosurie

Trente des 35 chiens recrutés ont été conservés dans l'étude ; ils avaient été présentés aux praticiens entre juin 2017 et juin 2020. Ils proviennent de 17 clientèles différentes (27 praticiens traitants), avaient un âge médian de 6,5 ans (de 6 mois à 14 ans) et un poids médian de 6,8 kg (de 1,2 à 59 kg). La moitié (17/30) avaient reçu un traitement dans les deux  mois précédant le première consultation pour le motif de syndrome Fanconi-like (pour l'essentiel des anti-inflammatoires et des antalgiques). Comme la présence d'une glycosurie avec normo/hypoglycémie était un critère d'inclusion, tous les sujets présentaient ce signe clinique. Par ordre décroissant, suivaient : polydipsie (77 %), hématurie (76 %), polyurie (70 %), léthargie (63 %), perte de poids (50 %), hyporexie (37 %), vomissements ou diarrhée (23 % chacun), et, dans 7 % des cas, aucun autre signe clinique. Au plan des analyses sanguines, les auteurs observent une association entre valeur de diméthylarginine symétrique (SDMA) et quantité de friandises données par les maîtres (p=004), toutefois ce paramètre n'a été mesuré que pour 10 des chiens. Et comme il est dépendant d'une valeur extrême, les auteurs estiment que cette association ne peut être considérée comme significative sans complément d'informations. Il reste qu'il « n'y avait pas d'association entre l'apport quotidien estimé de friandises carnées et les biomarqueurs de filtration glomérulaire ».

80 % de guérison

Pour un peu plus du tiers des patients (12/30), le seul traitement mis en place par le praticien était de demander au maître de suspendre la distribution des friandises carnées. À l'inverse, 7 autres ont été hospitalisés, pour l'essentiel pour fluidothérapie ou gavage oral. Le fait d'avoir été hospitalisé n'est pas significativement associé avec une évolution différente par rapport aux chiens traités en ambulatoire (anti-émétiques, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, etc.) et ceux laissés chez leur maître sans traitement médical. Un chien sur cinq (79 %) a guéri sans séquelles. Ce chiffre pourrait augmenter car au moment de la rédaction du manuscrit, 5 chiens étaient encore en cours d'évolution, avec des signes cliniques liés à l'affection, entre 9 et 72 semaines depuis le diagnostic initial. Cela représente un résultat plus favorable que les publications antérieures, qui évaluaient un taux de survie inférieur à 50 %. Cette différence est probablement en lien avec la longue durée du suivi de animaux permise par l'étude rétrospective. Dans le cas présent, un seul chien est décédé, mais alors qu'il avait été perdu de vue par son praticien ; il n'est pas possible d'attribuer son décès au syndrome Fanconi-like. Enfin, « la glycosurie a guéri pour 28 des 30 chiens, en 6,5 semaines (médiane, de 1 à 31 semaines) ». Un seul a présenté une glycosurie persistante.

Cette étude, comme une étude allemande publiée l'an passé (6 cas survenus entre avril 2018 et août 2019), « indiquent qu'en dépit de la diminution du nombre de cas signalés aux autorités américaines et publiés dans la littérature scientifique, le syndrome Faconi-like lié aux friandises carnées est toujours présent dans la population canine et qu'il est nécessaire de continuer à sensibiliser à ce syndrome ».