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29 juillet 2022

Crise d'hypertension chez le chien et le chat : fatale dans un cas sur deux

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

 

Une crise d'hypertension est une urgence (assez rare) chez l'homme ; c'est une urgence absolue lorsque des lésions des organes cibles, notamment le cerveau, sont présentes. Des cas similaires peuvent survenir chez les carnivores domestiques. Les résultats de l'étude rétrospective de 15 cas – 7 chez des chiens et 8 chez des chats – sont publiés (en libre accès) dans le JSAP. Ils ont été présentés et pris en charge à l'hôpital vétérinaire universitaire du Royal Veterinay College de Londres (Hatfield, Angleterre) entre 2003 et 2019.

Des cas amenés dans la journée

Les cas retenus présentaient une forte hypertension artérielle (pression artérielle systolique d'au moins 180 mmHg) et des troubles évocateurs de lésions neurologiques ou ophtalmologiques secondaires, conséquences de l'hypertension sur les organes cibles. Les cas d'hypertension sans caractère d'urgence étaient exclus. Des mesures répétées de la pression artérielle étaient aussi requises.

Les 15 animaux finalement inclus sont 5 chiens mâles et 2 chiennes, et 2 chats mâles et 6 chattes. Ils sont de races variées, et globalement âgés (9 ans en médiane : 7 ans pour les chiens et 12 ans pour les chats).

Les animaux avaient été amenés rapidement en large majorité, le plus souvent le jour de l'apparition des symptômes (mais jusqu'à 15 jours après). Ceux-ci sont les suivants :

  • Des crises convulsives dans 9 cas,
  • Une altération de la conscience avec ou sans chute (animal en décubitus latéral) dans 4 cas,
  • Une cécité dans 8 cas.

La répartition de ces signes varie selon l'espèce (voir tableau en illustration principale). L'examen neurologique pratiqué a généralement identifié d'autres troubles, comme l'absence de réaction à la menace, une anisocorie, un marcher en cercle. L'examen du fond d'œil (12 cas) a également détecté un décollement de la rétine (8 cas), une hémorragie rétinienne (2 cas).

Chez un animal présentant des crises convulsives, la mesure de la pression artérielle semble ainsi indiquée pour identifier une éventuelle crise hypertensive.

Pic à 300 mmHg

La pression artérielle systolique mesurée à l'arrivée est très élevée : 220 mmHg en médiane pour les chiens et 230 pour les chats. Au cours de l'hospitalisation, les valeurs maximales mesurées sont de 290 mmHg en médiane pour les chiens et 250 pour les chats. Dans les deux espèces, elle a pu atteindre 300 mmHg. Selon les auteurs, le placement d'un cathéter artériel afin d'effectuer le suivi de la pression artérielle est intéressant, voire à privilégier, car les mesures sont plus fiables que celles obtenues par des techniques non invasives. Le cathéter permet aussi l'administration de traitements injectables.

Insuffisance rénale aiguë dans 9 cas

De nombreuses affections peuvent entraîner une hypertension artérielle secondaire, en particulier les maladies rénales (aiguës et chroniques), le diabète, les anémies hémolytiques à médiation immune chez le chien, l'hyperthyroïdie, la maladie rénale chronique ou l'hyperaldostéronisme chez le chat.

Ici, la cause de la crise hypertensive est le plus souvent une insuffisance rénale aiguë : c'est le cas pour 6 des 8 chats et 3 des 7 chiens, soit 9 sur 15 au total (60 %).

Un autre chat présentait une hyperthyroïdie, un chien un lymphome multicentrique et un autre une suspicion de vasculopathie cutanée et glomérulaire rénale (Alabama rot). L'hypertension reste idiopathique dans 3 cas (chez 2 chiens et 1 chat).

Amlodipine en première intention

En traitement, l'amlodipine per os est la plus souvent utilisée (bien que non indiquée dans ce cadre) : chez tous les chats et 6 des 7 chiens. Les traitements complémentaires recensés sont l'hydralazine (vasodilatateur utilisé comme antihypertenseur) chez 4 chiens et 2 chats, le nitroprussiate de sodium (également un vasodilatateur utilisé comme antihypertenseur) chez 3 chiens et, plus anecdotiquement, l'énalapril, le telmisartan, un soluté hypertonique, le mannitol.

Il n'existe pas de recommandations thérapeutiques lors de crise hypertensive, en médecine vétérinaire comme humaine. Le suivi très régulier de l'évolution et de la réponse au traitement est alors impératif. Les auteurs signalent que les recommandations générales sont d'éviter une réduction trop rapide de la pression artérielle, qui risquerait d'aggraver l'hypoperfusion et les lésions des organes cibles. En médecine humaine, il est conseillé de diminuer la pression artérielle de 20-25 % en 1 heure, puis d'atteindre progressivement une valeur de 160 mmHg sur les 2 à 6 heures suivantes, avant de la normaliser en quelques jours.

7 cas de mortalité

Malgré la prise en charge, 3 chats et 4 chiens n'ont pas survécu, ce qui représente un taux de mortalité de 47 %.

Chez les survivants, la pression artérielle est normalisée, revenant à 140 mmHg en médiane pour les chiens et 160 pour les chats.