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20 septembre 2022

Risque anesthésique chez le chien : la mortalité reste peu fréquente

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Dans cette étude, à l'opposé du rottweiler ou du westie, le cocker présente un taux de mortalité plus faible, dans le cadre d'une anesthésie ou d'une sédation (cliché Pixabay).
Dans cette étude, à l'opposé du rottweiler ou du westie, le cocker présente un taux de mortalité plus faible, dans le cadre d'une anesthésie ou d'une sédation (cliché Pixabay).
 

Une anesthésie générale et même une sédation ne sont jamais sans risque de complication, voire de mortalité. Une éventualité abordée avec le propriétaire en amont de la procédure afin de recueillir son consentement éclairé. Les risques sont bien sûr à relativiser selon la situation du cas. Des données chiffrées peuvent alors être utiles, à l'exemple des résultats d'une large étude, menée dans le cadre du programme britannique VetCompass : cette nouvelle étude épidémiologique a évalué la mortalité jusqu'à 2 semaines après une anesthésie ou une sédation chez le chien.

Anesthésie générale ou sédation à la clinique

L'étude, rétrospective, a porté sur une durée de 4 ans : les dossiers médicaux de 157 318 chiens anesthésiés ou tranquillisés entre 2010 et 2013 dans l'une des plus de 300 cliniques vétérinaires « généralistes » adhérentes au projet ont été analysés. La sédation était effectuée à la clinique, par exemple pour réaliser un examen complémentaire ; les cas de tranquillisation par voie orale au domicile avant la consultation (pour un chien agressif par exemple) n'étaient pas inclus.

Les cas de mortalité ont été recensés, en écartant toutefois ceux dont l'origine excluait toute conséquence possible de l'anesthésie ou la sédation (un accident par exemple). La cause de la mort et le moment de sa survenue (jusqu'à 2 semaines après l'intervention) ont été pris en compte.

Un risque de 140/100 000

Les résultats montrent que le taux de mortalité en lien avec l'anesthésie ou la sédation atteint 0,14 % (219 chiens), soit un risque de 140 pour 100 000.

À plus court terme, c'est-à-dire dans les 48 heures suivant l'anesthésie, le risque est de 0,10 % (159 cas), soit 100 pour 100 000.

À 42 % (93/219), le décès survient le jour même, généralement en per- ou postopératoire (44 et 40 chiens, respectivement). Les cas de mortalité à l'induction (n=7) ou à l'inversion (n=2) sont rares.

Le plus souvent, le chien est euthanasié suite à la dégradation de son état général (47 % des cas) ; dans 32 % des cas, la mort fait suite à un arrêt cardiorespiratoire.

Risque minoré pour les chirurgies de convenance

Les auteurs ont souhaité distinguer les cas de chirurgies de convenance (stérilisation), pour lesquelles l'anesthésie est généralement mise en œuvre sur un animal en bon état de santé. Un accident, bien que rare, sera d'autant moins bien compris ou accepté par le propriétaire. Les auteurs rappellent toutefois par ailleurs que la question du risque anesthésique se pose concernant les stérilisations précoces (prépubertaires), effectuées sur de très jeunes animaux (surtout chez le chat) : il est à mettre en balance avec les bénéfices d'une telle démarche, ces chirurgies n'étant pas nécessaires à la survie immédiate ni au bien-être des animaux concernés.

Ici, près de 90 000 chiens avaient été anesthésiés pour une castration ou une ovario-hystérectomie. Et les taux de mortalité sont :

  • de 0,009 % (8 cas), soit 9/100 000, à moyen terme (dans les 15 jours) ;
  • de 0,006 % (5 cas), soit 6/100 000, à plus court terme (48 heures).

Parmi les 8 chiens décédés (2 castrations et 6 ovario-hystérectomies), 3 présentaient un risque anesthésique modéré (score ASA III), les autres un risque faible.

Âge, race, stade ASA et degré d'urgence

Outre les données démographiques des chiens, plusieurs paramètres ont été considérés pour évaluer les facteurs associés au risque de mortalité, en particulier le stade ASA de l'animal et le type d'intervention pratiquée (de convenance ou non, degré d'urgence et gravité, en distinguant par exemple un détartrage d'une chirurgie orthopédique). Un groupe de 881 cas (anesthésiés et survivants) a été formé comme groupe témoin.

Les résultats permettent d'identifier trois facteurs de risque, sans variation selon que la mortalité survient dans les 48 heures ou dans les 15 jours.

  • Le risque varie significativement selon l'âge du chien : par comparaison aux moins de 1,5 an, les 5-7 ans et 7-9 ans présentent un risque de décès multiplié par un facteur 4,9, et par un facteur 12,8 pour les plus de 9 ans.
  • Le stade ASA est également associé à la mortalité : les chiens de score ASA III présentent un risque x 4,8 et ceux de stade ASA IV-V un risque x 19, par comparaison aux stades I ou II.
  • En cas d'intervention urgente, le risque est multiplié par 13,6.

Le type de chirurgie (lourde ou non) n'est pas associé ici à la mortalité, contrairement aux observations issues d'autres travaux d'études. Toutefois, par comparaison aux anesthésies ou sédations en vue d'un examen diagnostique, le risque de décès à 48h est majoré pour les intervention dentaires ou mineures des tissus mous.

Enfin, deux races sont identifiées ici comme associées à un plus grand risque de mortalité : le rottweiler (risque x 8,1 par comparaison aux croisés) et le westie (risque x 5,4). Inversement, chez le cocker anglais, le risque est minoré (x 0,1).

Le format de l'étude n'a pas permis de comparer le risque entre sédation et anesthésie, ni d'évaluer les éventuelles associations entre mortalité et protocoles de sédation ou anesthésie, durée de la chirurgie, nombre et qualification des cliniciens, etc., qui pourraient être instructives en pratique.