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21 juin 2022

Quand humains, chiens et chat se regardent… ils clignent des yeux en coeur

par Pascale Pibot

Temps de lecture  4 min

Selon une étude sur 17 paires chien ou chat et homme, une synchronisation mutuelle des clignements d'yeux se met en place lorsqu'ils se regardent (cliché Pixabay).
Selon une étude sur 17 paires chien ou chat et homme, une synchronisation mutuelle des clignements d'yeux se met en place lorsqu'ils se regardent (cliché Pixabay).
 

Chez l'homme, la synchronisation des clignements d'yeux entre deux personnes est corrélée au degré de synchronisation de l'activité cérébrale. Cela suggère que la compréhension mutuelle va de pair avec le fait de partager une activité cérébrale similaire à celle de son interlocuteur.

Le clignement des yeux, un signal de communication

Les clignements simultanés des yeux jouent un rôle important pendant une conversation entre deux individus : on suppose que la synchronisation de leurs clignements respectifs facilite la mise en place d'un même rythme de communication. Ce phénomène s'observe aussi chez des primates non-humains.

Chez les personnes atteintes de troubles autistiques, dont le symptôme principal est une communication déficiente, la synchronisation des clins d'œil n'a en revanche pas lieu. Elle ne s'observe qu'entre deux individus qui peuvent communiquer efficacement.

Analyse du comportement de l'homme face aux chiens et aux chats

Il a été suggéré que les chiens et les chats domestiques utilisent aussi le clin d'œil comme un signal de communication envers les humains. En 2020, Humphrey et al. ont, par exemple, rapporté que le comportement d'approche des chats s'intensifie lorsque l'observateur humain cligne des yeux.

Pour en savoir plus, une équipe japonaise s'est intéressée à la synchronisation des clignements d'yeux entre les chiens/chats et les humains. L'hypothèse de départ était que la synchronisation du clignement des yeux s'observerait plus souvent entre les chiens/chats et leurs propriétaires, puisqu'ils étaient habitués à communiquer efficacement.

Le protocole consistait à enregistrer 5 interactions visuelles d'une minute chacune entre l'observateur et le chien ou le chat. En tout, 26 chiens et 24 chats ont participé à l'étude mais de nombreux enregistrements n'ont pas pu être pris en compte. Au final, les analyses ont porté sur 7 paires « chien / humain » et 10 paires « chat / humain ».

La chronologie des clignements des yeux des humains, des chiens et des chats a été analysée pour savoir si l'humain clignait des yeux avant et/ou après l'animal, et si la synchronisation s'observait surtout lorsqu'il existait un lien d'affiliation entre l'homme et l'animal.

Une fréquence différente mais la synchronisation existe

Les résultats montrent qu'il n'y a aucune corrélation entre les taux de clignement des humains et celui des chiens/chats : le taux de clignement des humains était de 28,99 ± 12,81 bpm alors qu'il n'était que de 6,53 ± 3,75 bpm chez les chiens et de 4,10 ± 2,69 bpm chez les chats.

L'étude a cependant mis en évidence une synchronisation mutuelle des clignements d'yeux entre les humains et les chiens/chats : la fréquence des clignements humains était significativement plus élevée dans certaines fenêtres temporelles, avant et après le clignement des chiens ou des chats. En clair, les humains clignent des yeux après que les chiens/chats l'ont fait, et les chiens/chats clignent des yeux après que les humains ont cligné.

La synchronisation des clignements n'est pas due à une augmentation de la fréquence des clignements mais à l'ajustement des clignements spontanés à ceux du partenaire. Si les chiens et les chats augmentaient leur taux de clignement en fonction du clignement humain, il y aurait une corrélation positive entre le taux de clignement humain et le taux de clignement chien/chat, alors que l'étude montre que ce n'est pas le cas.

Le degré d'affiliation, un paramètre important pour l'homme

L'effet du lien entre l'homme et l'animal a été constaté chez les propriétaires : par rapport aux personnes étrangères, les propriétaires clignaient plus rapidement des yeux quand leur animal l'avait fait. En revanche, les chiens/chats clignaient environ 1 seconde après que les humains avaient cligné des yeux, indépendamment de leur lien d'affiliation. Il est difficile d'interpréter cette différence : les chiens et les chats pourraient ne pas faire la distinction entre les clignements d'yeux de leurs propriétaires et ceux des étrangers, mais ils seraient peut-être aussi capables de communiquer aussi efficacement avec leurs propriétaires qu'avec les étrangers. Il est également possible que le contexte influence leur rapidité de réaction et que cette étude n'ait pas pu percevoir les différences.

La plupart des décalages temporels observés dans cette étude ont été considérés comme du mimétisme, un phénomène qui pousse à exécuter le même comportement que son partenaire, mais pas immédiatement. Si l'on considère que la synchronisation des clins d'œil conduit à partager le même rythme de communication entre humains, la synchronisation automatique des clins d'œil entre l'homme et l'animal pourrait signifier qu'un même rythme de communication se met en place entre les chiens/chats et les humains.