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9 mai 2022

Coup de chaleur : les cochons d'Inde aussi !

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Les 3 lapins ayant présenté un coup de chaleur sont brachycéphales, de même que 21 % des chiens dans cette étude de 174 cas, un facteur de risque déjà documenté auparavant (cliché Pixabay).
Les 3 lapins ayant présenté un coup de chaleur sont brachycéphales, de même que 21 % des chiens dans cette étude de 174 cas, un facteur de risque déjà documenté auparavant (cliché Pixabay).
 

Avec la chaleur qui (re)vient, les cas de « coup de chaleur » risquent de revenir aussi. L'occasion de faire le point sur le contexte de leur survenue, les espèces concernées, les facteurs de risque… C'est l'objet d'une étude publiée (en libre accès) par une équipe britannique. Elle montre que ces cas d'urgence ne se résument pas au chien laissé enfermé dans la voiture par beau temps. Loin s'en faut : c'est l'exercice par temps chaud qui est à l'origine des troubles dans une large majorité de cas, chez les chiens au moins.

174 cas recensés sur 6 ans

S'il s'agit encore une fois d'une étude épidémiologique britannique, elle ne s'inscrit pas dans le cadre du projet VetCompass ; elle s'appuie tout de même sur les données des dossiers médicaux d'un réseau de cliniques (le réseau de surveillance Savsnet). L'évaluation porte sur les cas rencontrés au Royaume-Uni, où le climat n'est pas celui de la France, mais les observations générales peuvent vraisemblablement y être extrapolés sans peine. Les anglais eux-aussi constatent le « réchauffement climatique » (mais sans s'en désoler parfois !).

L'étude porte sur toutes les espèces d'animaux de compagnie, sur la période 2013-2018 (6 ans). Tous les cas correspondant à un diagnostic de coup de chaleur ont été recensés, d'abord sélectionnés automatiquement par mots-clés (environ 300 cas), puis définitivement inclus au cas par cas par les auteurs à la lecture du dossier : 174 cas au total. Il s'agissait de consultations de première intention (et non de cas référés).

Quelles espèces ?

La répartition des cas par espèces montre (sans surprise) que les chiens sont les plus touchés. Ces cas concernent en effet :

  • 146 chiens,
  • 16 chats,
  • 8 cochons d'Inde,
  • 3 lapins,
  • 1 furet.

Le risque est connu pour le lapin, d'autant plus que sa cage peut être mise dans le jardin aux beaux jours. Il l'était moins pour les chats et les furets, les cas jusque-là documentés portaient sur des animaux enfermés par erreur dans un sèche-linge en fonctionnement.

Le nombre de cas concernant les cobayes est également intéressant, la population de ces animaux comme animal de compagnie étant bien inférieure à celle des lapins en Grande-Bretagne. Toutefois, leur sensibilité à la chaleur n'est pas une découverte.

Quelles étiologies ?

Les deux principales causes du coup de chaleur sont une exposition à des températures ambiantes trop élevées (coup de chaleur environnemental) ou la pratique d'un exercice ayant entraîné une hausse inhabituelle et incontrôlée de la température corporelle (coup de chaleur à l'effort).

Lorsque renseigné (118 cas), l'événement en cause a permis de classer les cas de l'étude en trois catégories de coup de chaleur :

  • À l'effort : 75 chiens soit 73,5 % de l'effectif (près des trois quarts donc) ;
  • Confinement dans un véhicule (voiture, caravane), qui se rattache aux causes environnementales : 7 chiens soit (seulement) 6,9 % ;
  • Environnemental (hors véhicule) : 20 chiens soit 19,6 %, et toutes les autres espèces (6 chats, 7 cobayes, 2 lapins et le furet).

En pratique, les auteurs soulignent l'importance de sensibiliser les propriétaires à toutes les situations à risque, sans limiter les messages au seul danger du chien laissé dans la voiture au soleil (qui a fait l'objet de récentes campagnes dans le pays : « Dog die in hot cars »).

Concernant les lapins, cochons d'Inde et furets, les conseils à rappeler sont de garder les cages à l'ombre, et d'assurer un accès à de l'eau fraîche en permanence.

Les animaux sont principalement présentés le jour même (n=78), le lendemain (12-24h après l'événement, n=37), et jusqu'à après 24 heures (30 cas). Certains étaient des consultations de suivi après un épisode de coup de chaleur (n=29).

Sans surprise, les signes cliniques le plus souvent présentés sont une dyspnée, une léthargie, une perte de connaissance. La température rectale peut monter jusqu'à 43°C (39,6°C en moyenne). Des signes digestifs (vomissements, diarrhée, hypersalivation) sont également observés.

La gravité des signes clinique est jugée modérée en majorité (54 % des cas), légère pour un tiers (32 %) mais élevée dans 14 % des cas. Le décès de l'animal est mentionné pour 5 chiens et 3 cobayes, lesquels présentaient généralement des troubles neurologiques comme une ataxie ou des crises convulsives. Il est possible que des cas de mortalité surviennent chez des chats, mais sans être présentés en consultation : l'animal ne revenant finalement pas au domicile. De même, un lapin retrouvé mort ne sera pas amené chez le vétérinaire.

Quels facteurs de risque ?

Les chiens touchés ont un âge médian de 4,7 ans, la tranche d'âge 4-6 ans étant surreprésentée (35 cas soit 24 %, alors que cette tranche représente 13 % de la population canine générale).

Plusieurs races sont également surreprésentées : springer anglais, cavalier King Charles, bouledogue français, bulldog anglais, bull terrier, braque de Weimar. Plus généralement, les races brachycéphales semblent plus à risque (ce qui était déjà documenté) : elles totalisent plus de 21 % des cas canins, et tous les lapins concernés sont également brachycéphales.

Chez les chats, il s'agit plus souvent d'individus âgés (7 chats sont âgés de 12 ans et plus, dont 4 de plus de 15 ans).

Les auteurs rappellent que de nombreux facteurs entrent en ligne de compte (sans possibilité d'évaluation dans cette étude), par exemple l'obésité ou les comorbidités, la couleur, le type de fourrure… Une simple promenade sous le soleil peut entraîner un coup de chaleur chez certains individus. Les chiens sont également plus souvent concernés dans la mesure où ils ne contrôlent pas leur activité contrairement aux autres espèces, celle-ci étant souvent dirigée par leur maître.

Quelles saisons ?

En termes de saisonnalité, l'étude montre que les cas surviennent entre avril et octobre, avec un pic durant les mois d'été (juin et juillet). Mais ici, ces données semblent plus dépendantes des conditions météorologiques locales, la période « à risque » pouvant être naturellement plus étendue dans certaines régions de France, où toutefois, inversement, les organismes sont mieux habitués aux grosses chaleurs (s'agissant des coups de chaleur à l'effort en particulier).