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Elanco & Proplan

18 septembre 2025

NAC : quatre prokinétiques digestifs s'avèrent sans efficacité mesurable chez le lapin

par Sylvain Larrat

Temps de lecture  3 min

Lapin en hospitalisation
La surveillance de la production fécale fait partie intégrante du suivi des lapins hospitalisés : en cas de ralentissement ou d'arrêt de transit, le recours aux prokinétiques comme le métoclopramide n'est plus soutenu par la science. Cliché : Sylvain Larrat.
Lapin en hospitalisation
La surveillance de la production fécale fait partie intégrante du suivi des lapins hospitalisés : en cas de ralentissement ou d'arrêt de transit, le recours aux prokinétiques comme le métoclopramide n'est plus soutenu par la science. Cliché : Sylvain Larrat.
 

Les ralentissements et arrêts de transit figurent parmi les affections les plus fréquentes chez le lapin NAC. Dans le cadre de leur prise en charge, un certain nombre de molécules à effet prokinétique digestif ont pu être recommandées de manière empirique jusqu'ici. Dans l'ouvrage de référence sur la médecine des NAC, le Carpenter's Exotic Animal Formulary, les recommandations concernant ces traitements ne reposent sur aucune étude clinique spécifique au lapin. Pour combler cette lacune, une équipe de l'Oklahoma State University (USA) a évalué l'efficacité de quatre molécules prokinétiques : le métoclopramide, le cisapride, la pyridostigmine et la capromoréline.

Des mécanismes prokinétiques différents

Ces quatre médicaments, à minima chez les humains, ont démontré un effet stimulant le transit, par des mécanismes différents :

  • le métoclopramide a des effets anti-émétiques et prokinétiques résultant de son activité d'antagoniste de la dopamine central et périphérique ;
  • le cisapride n'est plus disponible en pharmacie, à l'exception de préparations magistrales. Chez les humains, il accélère la vidange gastrique et stimule le péristaltisme digestif par un effet sur les récepteurs à la sérotonine de neurones myo-entériques ;
  • la capromoréline est un analogue de la ghréline, qui est une hormone digestive stimulant l'appétit ; la ghréline a aussi une activité prokinétique ;
  • la pyridostigmine est un antagoniste des cholinestérases, qui a donc un effet parasympathomimétique, incluant une augmentation de la fréquence et de l'intensité des contractions des fibres musculaires du tube digestif.

L'objectif de l'étude était de déterminer leur efficacité respective chez des lapins sains, afin de pouvoir ensuite établir des recommandations plus claires sur la prise en charge des arrêts de transit.

Étude clinique : 10 lapins sains

Les 4 médicaments et un témoin (sérum physiologique) ont été administrés une fois chacun, par voie orale, dans un ordre aléatoire, à 10 lapins. Les administrations ont été espacées de 6 jours pour éviter d'éventuelles interactions. Les doses suivantes ont été utilisées : métoclopramide (0,5 mg/kg), cisapride (0,5 mg/kg), capromoréline (3 mg/kg) et pyridostigmine (1 mg/kg). Les indicateurs de transit mesurés étaient le poids des déjections, le nombre de crottes, le poids de l'aliment consommé, ainsi que le volume d'eau bue et d'urine émise. Le tout était mesuré régulièrement, sur 72h.

État de la science et recommandations

Les analyses statistiques n'ont identifié aucun effet statistiquement significatif de ces molécules à ces doses, sur le transit des lapins sains. Quelques études de pharmacocinétique du cisapride et du métoclopramide sont recensées, mais elles ne renseignent pas sur l'efficacité clinique des traitements. La seule étude antérieure, cliniquement pertinente, concerne la capromoréline. Contrairement à la dose de 3 mg/kg en une prise, une dose plus élevée (4 ou 8 mg/kg) administrée deux fois par jour était associée à une augmentation de la consommation de nourriture et de la production de déjections chez des lapins sains. En revanche, cet effet n'était plus présent lors d'administration post-opératoire (castration). Les auteurs indiquent qu'une des difficultés dans l'évaluation empirique de l'efficacité d'un médicament prokinétiques provient du délai normal entre la reprise de l'alimentation et la reprise de l'émission de selles chez un lapin. Compte tenu d'une durée de transit d'au moins 14 h chez les lapins, un animal qui recommencerait à manger 12 à 24 h après une intervention présenterait un retour visible du transit après 26 h à 38 h. Comme une absence de transit de 24h en hospitalisation déclenche souvent une prise en charge médicale, l'administration de médicament est le plus souvent suivie d'un retour du transit, que le médicament ait fait effet ou non. En pratique, en l'absence de meilleures connaissances sur la sécurité et l'efficacité de doses plus élevées des quatre molécules testées par les auteurs, il n'y a pour le moment pas de bases scientifiques pour justifier leur utilisation.