titre_lefil
logo_elanco

31 mars 2021

Le blues des jeunes vétérinaires salariés allemands

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Satisfaction au travail, selon l'enquête réalisée par le syndicat allemand des vétérinaires salariés et l'association des cliniques petits animaux indépendantes, auprès de 1 414 vétérinaires salariés, courant 2020 (sources : BaT, VUK).
Satisfaction au travail, selon l'enquête réalisée par le syndicat allemand des vétérinaires salariés et l'association des cliniques petits animaux indépendantes, auprès de 1 414 vétérinaires salariés, courant 2020 (sources : BaT, VUK).
 

« L'évolution [de l'emploi vétérinaire] vers un marché des salariés et les difficultés croissantes des employeurs à trouver du personnel rendaient cette étude urgente », ont indiqué les représentants du syndicat allemand des vétérinaires salariés (BaT) et de l'association des cliniques vétérinaires petits animaux indépendantes (VUK) en conférence de presse le 25 mars. Seul un résumé de cette étude, nommée “Conditions de travail et satisfaction professionnelle des vétérinaires employés en Allemagne 2020”, a été présenté, et repris dans la presse professionnelle et sur le site du BaT dans les jours suivants. L'association fédérale des praticiens allemands (bpt) a toutefois coiffé ces deux structures sur le poteau, en publiant le 23 mars les résultats de “son” enquête, conduite de mars à mai 2020 par son « groupe de travail des vétérinaires salariés ». Toutes deux convergent cependant sur de nombreux constats, dessinant un même malaise.

Satisfaction globale, mais…

Deux préliminaires sont à garder à l'esprit : en Allemagne, la durée légale maximale du travail est de 48 h par semaine, et les vétérinaires n'ont pas de convention collective. Pour ce qui est de la satisfaction globale au travail, la majorité des 1 414 répondants (environ 15 % des vétérinaires salariés) à l'enquête BaT-VUK, parmi lesquels « les jeunes diplômées étaient sur-représentées » selon la presse vétérinaire allemande en ligne, s'estiment satisfaits (note de 1, très bonne ; à 3, satisfaisante, voir l'illustration principale). Mais, relèvent les commanditaires de l'étude, « le niveau d'insatisfaction encore élevé est clairement visible pour quelque 30 % de réponses, qui ont attribué les notes 4 à 6. Cette proportion est trop élevée et les résultats de l'étude complémentaire ont fourni des [détails confirmant] que cela reflète malheureusement encore la situation actuelle ». Dans l'enquête bpt, « 33 % des répondants indiquent que, si c'était à refaire, ils n'accepteraient pas leur emploi actuel, et pour 29 % s'orienteraient vers un autre métier ».

Salaire minimum et ‘gender-gap'

L'enquête BaT-VUK fournit un salaire moyen des praticiens salariés de 20,51 € « tous avantages compris », contre 17,30 € pour la médiane de l'enquête bpt (480 répondants, à 90 % des femmes). Ce chiffre « est inférieur à celui des vétérinaires salariés non praticiens ». Les commanditaires estiment « alarmant » que « pour 1,5 % des répondants, le salaire horaire est inférieur au minimum légal », et ce dans leur contrat. « Si l'on ajoute à cela l'écart salarial de 18 % entre les hommes et les femmes pour les nouveaux arrivants (ce qui correspond à un salaire horaire supérieur de 3,60 € pour les hommes), on obtient deux résultats dont on ne peut que s'étonner en 2021 ». Côté bpt, il est relevé que le salaire horaire brut d'une jeune diplômée dans sa première année d'exercice est de 15,40 €.

Gardes et astreintes

Les syndicalistes relèvent aussi que, « dans le secteur des petits animaux, 1 % ont déclaré une durée de travail hebdomadaire contractuelle de plus de 48 heures. Pour les autres espèces animales, ce chiffre atteint 8 à 11 % » des répondants. Seuls 7,5 des équivalents plein temps étaient à 35 h ; près des deux tiers (64,8 %) étaient à 40 h. Cette enquête demandait la durée contractuelle. L'enquête bpt portait sur le nombre d'heures effectives : « 38 % des personnes interrogées ont déclaré des heures de travail effectives de plus de 48 heures par semaine », même si la moyenne était de 45 h sur une semaine de 5 jours (et 85 % travaillent le dimanche, la médiane étant à un dimanche par mois). Sur la rémunération des gardes et astreintes de weekend, « un peu plus de la moitié  des [répondants BaT-VUK] ont déclaré [en] avoir bénéficié ». Et un répondant sur cinq indique ne pas avoir bénéficié de journées de formation continue sur l'année écoulée (contre 60 % des répondants à l'enquête du bpt).

Trop long, pas assez payé

La presse vétérinaire en ligne allemande a résumé ces réponses par « trop d'heures, trop peu payées »… Ce qui est presque mot-à-mot le titre du communiqué du bpt sur son enquête : « malheureux dans un job de rêve : les vétérinaires salariés se plaignent de leurs longues heures et d'être sous-payés ». Pour les salariés, les écarts à la loi sur le travail « devraient appartenir au passé ». Le bpf mentionne, lui, un « état de fait déplorable » et prévient que « si, en tant que secteur, nous ne parvenons pas à améliorer les conditions de travail, la pénurie actuelle de [nouveaux employés] deviendra encore plus aiguë ». L'objectif de l'enquête BaT-VUK « était d'identifier les causes [de cette pénurie], afin de remédier aux déficiences des conditions de travail actuelles et de fournir aux employeurs des recommandations sur la manière d'améliorer la satisfaction professionnelle de leurs vétérinaires employés ». Le bpt estime qu'il « il reste encore des progrès à faire en ce qui concerne le paiement des heures supplémentaires, des services de vacances et des services de garde ».

Les deux structures, représentant employeurs (VUK) et employés (BaT) ont annoncé travailler « actuellement [ensemble] pour trouver un compromis et créer une convention collective qui réponde aux exigences particulières de notre profession - ici dans le cas particulier des cliniques pour petits animaux ».