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4 novembre 2019

Pour un Schirmer chez le cobaye : il suffit de couper la bande en deux

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Pour s'adapter à la petite dimension de l'œil, et la faible production lacrymale du cochon d'Inde, les bandes de test de Schirmer sont coupées en deux dans leur longueur. Une technique facile et efficace selon une étude hongroise (cliché Pixabay).
Pour s'adapter à la petite dimension de l'œil, et la faible production lacrymale du cochon d'Inde, les bandes de test de Schirmer sont coupées en deux dans leur longueur. Une technique facile et efficace selon une étude hongroise (cliché Pixabay).
 

Le cobaye fait peu de larmes, et présente de petits yeux. Les bandelettes de Schirmer classiques, de 5 mm de large, lui sont ainsi mal adaptées : les résultats du test sont difficilement interprétables. Une équipe de cliniciens universitaires hongrois a donc testé l'usage de bandelettes « modifiées » : coupées en deux sur leur longueur. Les résultats observés ont aussi servi à établir les intervalles de normalité de ce test sur bandelettes plus fines.

45 % des cobayes présentent des troubles de l'œil

Selon ses auteurs, cette étude est importante compte tenu de la forte prévalence des troubles oculaires chez le cochon d'Inde : « 45 % », selon de précédents travaux.

Cette nouvelle étude, menée à la clinique Nac de l'université vétérinaire de Budapest et publiée dans le Veterinary Record, a inclus 50 individus. Ceux-ci sont de diverses races, poids, âge et sexe, afin de rechercher aussi l'éventuelle influence des paramètres morphologiques sur les résultats (les spécificités liées à la race feront possiblement l'objet d'une extension de cette étude, préviennent ses auteurs).

Les animaux ne présentaient pas de maladie oculaire (ou sans conséquence sur la production de larmes), ni d'affection buccale ou dentaire apparente. La plupart d'entre eux (40/50) étaient présentés en consultation pour un examen de santé de routine ou une stérilisation.

Bande artisanale de 2,5 x 35 mm

Un test de Schirmer a été systématiquement réalisé, dans chacun des deux yeux, sans anesthésie locale et en utilisant une bandelette de 2,5 mm de large (x 35 mm de long), obtenue simplement en coupant en deux aux ciseaux une bandelette classique (après en avoir mesuré et marqué le milieu au crayon sur toute sa longueur). Le résultat était noté après 30 secondes puis après une minute.

Les principaux résultats observés sont résumés dans le tableau suivant.

Daprès Nogradi et al., Veterinary Record, 2019.

 

Selon les auteurs, l'utilisation de ces bandelettes fines chez le cobaye est ainsi mieux adaptée que les bandelettes de 5 mm, qui fournissent des valeurs trop faibles et imprécises : « détecter une insuffisance de production lacrymale est difficile avec une bande normale ».

Leurs bandelettes de 2,5 mm sont « faciles à confectionner » (plus facilement que des bandelettes de 3 mm retenues pour une autre étude). Et pratiques, puisque chaque moitié de la bande initiale est utilisée pour chaque œil.

Des seuils et une zone grise

Les auteurs retiennent comme seuils de normalité les valeurs médianes observées, de 8 mm/30 secondes et 10 mm/minute. Une mesure au moins égale à ces seuils est considérée comme normale.

Ils signalent, mais sans le développer, qu'un résultat juste en-dessous de ces seuils, à savoir entre 5 et 8 mm à 30 secondes ou entre 6 et 10 mm à une minute, est ambigu. Il révèle une anomalie chez certains animaux, mais pas chez d'autres. Dans ces intervalles, le résultat apparaît donc douteux et s'interprète alors selon les autres données cliniques du cas.

Mesurer dans les deux yeux

Les mesures dans les yeux droits et gauches, à 30 secondes comme à 60, sont significativement corrélées, mais assez modérément, et en tout cas « moins fortement qu'attendu ». Ce qui amène les auteurs à conseiller d'effectuer le test de manière bilatérale « dans la mesure du possible ».

Une très bonne corrélation est en revanche observée entre les données relevées après 30 ou 60 secondes, sur chaque côté. « Une mesure à 30 secondes apporterait ainsi un résultat satisfaisant » dans les cas où laisser la bandelette en place pendant une minute n'est pas possible. La mesure à une minute demeure toutefois à privilégier, afin d'obtenir une valeur plus élevée, facilitant le diagnostic.

Les résultats montrent par ailleurs que les jeunes cobayes (âgés de moins d'un an) présentent des valeurs inférieures à celles des adultes, sans toutefois que la différence atteigne le seuil de significativité. De même, les mesures chez les femelles (vs les mâles) et chez les individus de poids élevé apparaissent modérément plus hautes. Les paramètres morphologiques des individus semblent ainsi « jouer un rôle mineur dans la production de larmes ».

En théorie, ces bandes coupées en 2 pourraient être utilisées pour d'autres espèces de petits rongeurs. Il reste à en établir les valeurs de référence, comme ici pour le cobaye. L'éventuel impact sur les mesures du stress de la contention, qui augmente notamment la fréquence (normalement faible) de clignement des yeux, mériterait également d'être investigué, selon les cliniciens.