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Elanco & Proplan

10 octobre 2025

Myoclonies épileptiques du vieux chat : un trouble gériatrique qui répond aux antiépileptiques

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

11 des 15 cas de cette série étaient des domestic short hair, une race par ailleurs très populaire au Royaume-Uni où s'est déroulée l'étude (cliché Pixabay).
11 des 15 cas de cette série étaient des domestic short hair, une race par ailleurs très populaire au Royaume-Uni où s'est déroulée l'étude (cliché Pixabay).
 

Une myoclonie désigne une séquence de secousses répétées, à rythme variable, brèves et semblables à des chocs, résultant de la contraction ou la relaxation involontaire soudaine d'un ou plusieurs muscles. Elle génère un mouvement de la partie du corps affectée : la tête par exemple, comme rapporté dans 15 cas chez des chats âgés.

Ces myoclonies spontanées ont été caractérisées comme épileptiques. Elles correspondent à une affection nouvellement décrite dans l'espèce féline. Les auteurs de cette série de cas publient ainsi leurs observations en libre accès dans le JFMS.

Des myoclonies tardives connues chez les chiens

En médecine vétérinaire, les myoclonies sont effectivement généralement classées en épileptiques ou non-épileptiques (d'origine infectieuse par exemple). Parmi les premières, une forme d'épilepsie myoclonique juvénile est associée chez le chien à des mutations génétiques ; elle touche en particulier le rhodesian ridgeback, le beagle et le teckel à poil dur.

Des crises myocloniques tardives ont par ailleurs été récemment décrites, chez des chiens âgés de races retriever. De telles crises, plus focales (restreintes à la tête), sont également connues chez les vieux cavalier king-Charles ; mais elles semblent d'origine dégénérative, répondant mal dans la durée aux traitements antiépileptiques.

Dans l'espèce féline, des crises myocloniques audiogènes, déclenchées par réflexe à un stimulus acoustique (feline audiogenic reflex seizures ou FARS), sont décrites, en particulier chez les chats séniors. Mais ici, ces myoclonies sont spontanées, diagnostiquées comme non-audiogènes.

15 vieux chats, ou chattes

Les cliniciens à l'origine de cette publication (du Royal Veterinary College de l'Université de Londres), ont recensé 15 cas sur la période 2015-2023. Ces formes d'épilepsie sont donc rares, ou rarement identifiées.

Les chats présentaient des crises myocloniques sans stimulus identifié (acoustique ou lumineux, par exemple).

Parmi eux, 11 étaient des domestic shorthair (européens), race très répandue, les autres étant de diverses races. Il s'agissait de mâles à 53 % et de femelles à 47 %, tous stérilisés. Dont une chatte et sa fille : une origine génétique serait ainsi intéressante à rechercher.

Surtout, ces chats étaient tous âgés : de 8,9 à 17 ans (13,2 ans en médiane).

Crises courtes, souvent fréquentes

Les myoclonies n'étaient le motif de consultation que pour 8 cas – limitées à la tête, elles sont moins inquiétantes que les crises d'épilepsie généralisée pour le propriétaire. Dans les autres cas, les symptômes ont été découverts fortuitement, chez des chats référés pour un syndrome vestibulaire par exemple, ou une léthargie, ou des troubles respiratoires…

Dans 3 cas seulement, d'autres troubles neurologiques étaient associés aux myoclonies de la tête : syndrome de Horner, syndrome vestibulaire, signes d'atteinte cérébrale antérieure (désorientation, démarche anormale…).

Durant les crises de myoclonies, le chat demeurait conscient, mais elles persistaient malgré les tentatives de distraction pour les stopper. Dans 4 cas, les myoclonies ne touchaient pas seulement la tête, mais les membres antérieurs aussi (3 cas) ou tout le corps (1 cas). Dans deux cas, des crises tonico-cloniques généralisées survenaient également ; elles sont plus fréquentes dans les cas de crises audiogènes (FARS), lesquelles sont souvent associées aussi à une surdité ou un déclin cognitif, ce qui n'était pas le cas ici.

Les crises étaient de courte durée (moins de 1 minutes), mais de fréquence progressive dans la moitié des cas. Elles survenaient plusieurs fois par jour chez 6 chats et plusieurs fois par semaine chez 4 autres ; autant dire fréquentes et altérant probablement la qualité de vie du chat.

Pas de lésion aux examens de neurologie

L'IRM, réalisée dans 6 cas, était normale pour 4. Dans un cas, une masse hypophysaire a été observée, et dans un autre, une atrophie du cortex cérébral liée à l'âge. De même, le scanner réalisé dans 2 cas a révélé la présence d'une otite externe et moyenne dans un cas. Une analyse du liquide cérébrospinal (4 cas) n'a rien révélé d'anormal. La recherche d'une encéphalite à anticorps anti-LGI1 (3 cas) était négative également. Enfin, aucun agent infectieux (Toxoplama par exemple), lorsque recherché, n'a été mis en évidence.

Un diagnostic de myoclonie épileptique tardive a donc été posé par exclusion.

Bonne réponse au lévétiracétam

La bonne nouvelle est que ces cas ont globalement bien répondu au traitement antiépileptique lorsque prescrit et administré.

  • 8 chats ont été traités avec du lévétiracétam, entraînant une rémission des crises (totale ou de plus de 50 % en fréquence), en 128 jours en médiane. Une récidive dans 1 cas a été traitée efficacement par l'ajout de phénobarbital.
  • 1 chat (atteint également de crises tonico-cloniques) a parfaitement répondu au phénobarbital.

Un suivi à long terme a pu être obtenu pour 8 chats, dont 5 avaient été euthanasiés pour d'autres motifs. Dans 3 cas, les myoclonies ont persisté, survenant sporadiquement. Un seul a continué à être traité au lévétiracétam, avec un effet bénéfique sur la réduction de la fréquence des épisodes. Un autre a développé des crises épileptiques généralisées et le troisième des signes de démence.

Ce syndrome, qui reste à explorer, semble proche de celui décrit chez les vieux chiens de races retriever. Il ressemble aussi à certaines myoclonies félines d'origine iatrogène, secondaires à l'administration de molécules anesthésiques par exemple (comme décrit en médecine humaine également), d'où l'importance de disposer de l'historique médical du chat.