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Elanco & Proplan

9 juillet 2024

Le bilan de santé régulier du chat âgé est définitivement utile

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

 

Un bilan de santé au moins annuel des chats âgés est recommandé. Mais quel son intérêt sur un animal bien portant ? Selon les résultats d'une étude belge, il permet bien de détecter l'apparition d'une nouvelle affection, d'abord subclinique.

21 % de chats dépistés malades à l'inclusion

Cette étude prospective, publiée en libre accès dans le JVIM, a été réalisée à la faculté vétérinaire de Gand. Elle a porté sur une cohorte de 204 chats, matures (7-10 ans, n=134) ou séniors (> 10 ans, n=70), initialement en bon état de santé, et suivis pendant 2 ans.

Au départ, 259 chats ont été recrutés, jugés en bonne santé par leurs propriétaires : poids stable, pas de changement de comportement ou autre signe clinique selon eux. Mais 55 de ces chats, soit 21 %, ont été écartés car présentant des maladies subcliniques lors des examens d'inclusion, notamment :

  • Une maladie rénale chronique (stade IRIS de 2 ou plus) dans 20 cas (7,7 %) ;
  • Une hyperthyroïdie dans 12 cas (4,6 %), dont 4 sans nodule palpable.

Les autres chats exclus étaient porteurs du virus FIV (7 cas), ou présentaient une infection urinaire (bactériurie persistante, 3 cas), une protéinurie persistante (4 cas), une myocardiopathie de stade avancé (B2 au moins, 2 cas), des troubles digestifs chroniques (vomissements et perte de poids (2 cas), etc. Ces troubles étaient significativement plus fréquents toutefois chez les chats séniors que chez les matures.

Le premier constat de cette étude est ainsi que nombre de propriétaires estiment, à tort, que leur animal va très bien.

Les chats inclus dans la suite de l'étude étaient donc confirmés comme étant en bonne santé. Parmi eux, 40 % (des 259 chats du départ) étaient tout de même en surpoids (et 17 % de condition corporelle insuffisante), une perte de masse maigre était présente chez 34 %, 35,5 % présentaient une maladie parodontale modérée à sévère, et 22 % des anomalies à l'auscultation cardiaque sans répercussion clinique (souffle, bruit de galop, bradyarythmie). Mais ces troubles n'étaient pas un motif d'exclusion. Seuls 18 des chats sains présentaient une hypertension sans autre signe associé à l'inclusion, mais généralement non persistante durant le suivi (qualifiée ainsi de probable hypertension de stress).

Bilan exhaustif tous les 6 mois

Le bilan de santé initial, puis les bilans de suivi, réalisés tous les 6 mois, comprenaient :

  • Un questionnaire de santé complété par le propriétaire ;
  • Un examen clinique complet (en cas d'anomalie à l'auscultation cardiaque, une échocardiographie était proposée, ce que recommandent les auteurs d'une manière générale) ;
  • Une mesure de la pression artérielle systémique (méthode Doppler), suivie d'un fond d'œil en cas de résultat > 160 mmHg ;
  • Une évaluation de la note d'état corporel et de la masse musculaire ;
  • Un examen buccal avec le calcul du score dentaire entre 0 et 3 et du score gingival entre 0 et 3, aboutissant à un score global entre 0 (absence) et 6 (maladie parodontale très sévère) ;
  • Une palpation de la zone thyroïde avec l'établissement d'une note entre 0 (glande non palpable) à 6 (masse palpable de plus de 25 mm) ;
  • Un bilan hématologique et biochimique complet, incluant le dosage des électrolytes, des fructosamines, de la SDMA, de la thyroxine totale (T4 totale), et un test Elisa de dépistage du FeLV te du FIV ;
  • Un bilan urinaire sur urines prélevées par cystocentèse (bandelette urinaire, examen macro et microscopique, analyse au réfractomètre et analyse du sédiment urinaire, calcul du RPCU, uroculture).

En cas de suspicion d'une maladie rénale chronique (MRC), des examens complémentaires étaient programmés après 1 à 2 mois pour établir le stade IRIS.

En 2 ans, 37 % des chats développent une maladie

Sur les 204 chats confirmés sains, 3 n'ont pas réalisé la première visite de suivi, laissant 201 chats poursuivre l'étude. Parmi ces derniers, 2 ne sont pas allés plus loin que le premier suivi et 19 sont décédés avant les 2 ans de suivi (dont 8 d'une maladie tumorale), laissant finalement 180 chats avec un suivi exploitable sur 2 ans.

Et les résultats de ce suivi montrent que 73 chats (soit 37 %) ont développé une maladie : 28 % des chats matures (n=37) et 36 des séniors (soit 54 %, voir tableau en illustration principale).

Les maladies les plus fréquentes sont une MRC, chez 27 chats en 2 ans, soit une incidence de 13,4 %, et une hyperthyroïdie, chez 17 chats, soit une incidence de 8,5 %, dont 5 chez lesquels aucun nodule n'était palpable initialement (à l'inclusion). L'hyperthyroïdie est toutefois significativement plus fréquente chez les chats pour lesquels la palpation a détecté un nodule, ce qui conforte l'intérêt de cet examen en routine. Le dosage de la T4 totale est fortement conseillé aussi en routine dans les bilans de santé du chat âgé, y compris dès 7 ans.

Le tableau indique le détail des autres affections diagnostiquées chez au moins 2 chats durant le suivi, après 1 puis 2 ans, et leur incidence chez les chats matures et séniors. Ces incidences sont globalement plus élevées chez les séniors, mais elles sont notables chez les matures, ce qui conforte le bénéfice d'un bilan de santé régulier dès 7 ans, afin de détecter et traiter précocement.

Certains chats (18 ici) ont développé plusieurs maladies de manière concomitante, le plus souvent une MRC et une triade féline (gastro-entéropathie chronique, hépatopathie chronique et/ou pancréatite chronique). Parmi les 3 chats ayant développé une MRC et une hyperthyroïdie, 2 ont développé la MRC plus de 6 mois avant l'hyperthyroïdie.

Un seul cas de diabète avait été détecté au moment des examens d'inclusion (et le chat exclus de l'étude) et un seul autre chat en a développé un durant les 2 ans de suivi (soit une incidence de 0,5 %).

Sensibiliser les propriétaires chiffres à l'appui

Un suivi semestriel des chats séniors est généralement recommandé. Mais celui des chats matures est plus fréquemment proposé à intervalle de 1 à 2 ans. C'est un minimum selon les résultats de cette étude, qui confirme aussi que les premiers signes d'une maladie passent souvent inaperçus par le propriétaire, car d'installation très progressive. Chiffres à l'appui, ces nouvelles données sur l'incidence des maladies sur 2 ans dans cette population de chats pourront aider le praticien à convaincre leurs propriétaires de l'intérêt de consultations régulières, idéalement tous les 6 à 12 mois.