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Elanco & Proplan

20 juin 2024

L'exposition des bovins d'Alsace-Lorraine au virus de l'encéphalite à tiques est élevée

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

L'analyse de sérums de bovins prélevés dans le cadre des prophylaxies sanitaires en Alsace-Lorraine permet de distinguer quatre types de circulations, localisées, du virus de l'encéphalite à tiques (Mathews-Martin et coll., 2024).
L'analyse de sérums de bovins prélevés dans le cadre des prophylaxies sanitaires en Alsace-Lorraine permet de distinguer quatre types de circulations, localisées, du virus de l'encéphalite à tiques (Mathews-Martin et coll., 2024).
 

En Alsace-Lorraine, où les cas humains d'encéphalite virale causée par le virus de l'encéphalite à tiques (TBEV) sont fréquents, une équipe de virologistes et épidémiologistes français vient de déterminer que l'exposition des bovins au virus est élevée.

Evaluer la transmission alimentaire

Car si le TBEV est zoonotique, se transmettant en général via une piqûre de tique (de 10 à 30 cas par an en France), il peut aussi être transmis à l'humain via la consommation de produits au lait cru (elle est suspectée pour 6,5 % des cas humains, toujours en France). Les chercheurs, de l'Anses, l'ENV d'Alfort, VetagroSup et de l'Inserm, ont donc souhaité évaluer le niveau d'exposition des bovins dans la région la plus affectée du pays chez l'humain, afin de mieux estimer le risque de transmission alimentaire du virus. Pour cela, les auteurs ont obtenu 344 sérums de bovins à partir des sérothèques des laboratoires départementaux des Vosges et du Haut-Rhin. Ils avaient été prélevés entre 2017 et 2019, dans le cadre des phrophylaxies burcellose et IBR. Il s'agit de sérums de bovins provenant d'exploitations réparties dans l'ensemble de la région.

Plus d'un bovin positif sur deux

Un premier dépistage a été réalisé avec une trousse Elisa du commerce sur ces sérums, et les échantillons positifs ou douteux ont ensuite été analysés en microneutralisaion, gold standard qui permet de différencier la trace sérologique du TBEV de celle d'autres Flavivirus (comme le virus Usutu, par exemple). Pour les témoins négatifs, 84 sérums issus de bovins collectés dans le cadre de la prophylaxie de la FCO dans 15 départements de l'ouest (présumés indemnes de TBEV) ont été utilisés. Pour l'Alsace-Lorraine, « la séroprévalence globale du TBEV était élevée, avec 57,6 % (intervalle de confiance à 95 % : 52,1 - 62,8 %) de bovins positifs (198/344) », ce que les auteurs estiment d'une importance « inattendue ». Ils distinguent quatre zones, allant d'une de faible séroprévalence (29,9 % des 97 testés) à une de prévalence élevée (92,1 % des 89 testés). Les deux catégories intermédiaires de circulation du TBEV sont “modérément basse” et “modérément élevée” (voir l'illustration principale).

Infection précoce

Contrairement à l'hypothèse de départ des auteurs, il n'y a pas d'augmentation de la séroprévalence avec l'âge des animaux (ils supposaient que la durée de vie des anticorps neutralisants et les réinfections auraient permis d'observer ce phénomène). Ils observent aussi que, quelle que soit l'intensité de la circulation virale dans une zone, les bovins les plus jeunes de l'échantillon (la catégorie 1 à 3 ans) sont au-dessus de 45 % de séroprévalence. Ce qui « reflète une intense circulation virale, récente ». En revanche, le titre en anticorps neutralisants augmente à la fois avec l'âge et avec le niveau de circulation : plus de 90 % des bovins en zone de circulation élevée avaient un titre  1:320 contre moins de 30 % en zone de basse circulation. Et « la proportion de bovins avec des titres > 1:320 était significativement plus faible parmi les 1-3 ans que dans les autres classes d'âge (p = 0,01) ».

Positivité surprise dans trois départements à "l'ouest"

Enfin, lorsqu'ils ont testé les sérums témoin, les auteurs ont eu une « surprise » : ils ont obtenu trois positifs. « Une femelle d'un an et une femelle de deux ans nées et élevées sur la même exploitation, l'une en Eure-et-Loir et l'autre en Gironde, respectivement, avec un titre de 1:20. [S'y ajoute] une femelle de 10 ans dans le Tarn, élevée dans la même exploitation depuis 2013, avec un titre de 1:40 ». Il n'est pas possible de déterminer si le TBEV incriminé est le même que dans le nord-est de la France. Pour cette dernière région, les auteurs estiment que le niveau élevée de circulation qui y a été détecté lui est probablement spécifique du fait du pâturage en bordure de forêt.