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Elanco & Proplan

17 octobre 2023

Cholélithiase chez le chat : peu fréquente, le plus souvent symptomatique

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Une étude rétrospective multicentrique française montre que les calculs biliaires sont majoritairement symptomatiques chez le chat, mais que les cas asymptomatiques n'évoluent pas vers des manifestation cliniques (cliché : Nevit Dilmen, wikimedia).
Une étude rétrospective multicentrique française montre que les calculs biliaires sont majoritairement symptomatiques chez le chat, mais que les cas asymptomatiques n'évoluent pas vers des manifestation cliniques (cliché : Nevit Dilmen, wikimedia).
 

Environ 1 % des chats ayant eu une échographie abdominale présentent une cholélithiase, et elle correspond le plus souvent à des manifestations cliniques. Telle est la conclusion d'une étude rétrospective multicentrique réalisée à partir des dossiers médicaux des patients de trois écoles vétérinaires françaises.

Dossiers de trois ENV

Les cliniciens des écoles vétérinaires d'Alfort (ENVA), Lyon (VetAgroSup) et Nantes (Oniris) ont réalisé la même recherche parmi les dossiers médicaux des chats passés en consultation dans leur structure entre janvier 2010 et décembre 2021. Les mots appelés étaient en lien avec les cholélithiases, mais le diagnostic devait avoir été réalisé en échographie. Chaque dossier a été revu individuellement – en particulier le rapport d'échographie, pour déterminer les paramètres du foie, mais aussi le nombre de calculs, leur localisation et si leur découverte était liée « incidente » (sans lien avec les signes cliniques observés) ou liée à des manifestations cliniques (vomissements, diarrhée, douleur abdominale, léthargie, anorexie, ictère, seuls ou combinés, anomalies échographiques comme un épaississement de la paroi de la vésicule, ou bilirubinémie et/ou enzymes hépatiques élevées). Ces cas ont été classés par un spécialiste en médecine interne pour les patients de chaque école. Lorsque l'un avait un doute, le dossier était revu par un autre spécialiste, et le cas n'était inclus dans l'étude qu'en cas d'accord. Les traitements comme l'évolution des cas ont été pris en compte.

Plus d'un cas sur deux symptomatique

Au total, 98 cas ont été inclus dans l'étude (51 d'Alfort, 29 de Lyon et 19 de Nantes), ce qui, soulignent les auteurs, confirme que les calculs biliaires sont peu fréquents chez les chats. Pour le calcul de prévalence, les auteurs ont rapporté ce chiffre au nombre de chats différents ayant subi une échographie abdominale dans les trois écoles sur la même période . Cela correspond à 0,99 % des chats – soit une prévalence estimée (intervalle de confiance à 95 %) entre 0,79 et 1,19 %. Dans la majorité des cas (59 %), le patient chez lequel des calculs biliaires ont été découverts était symptomatique ; les autres cas étaient des découvertes incidentes. Il n'y avait pas de différences démographiques entre ces deux catégories de patients. Toutefois, lorsqu'ils réalisent une analyse statistique multivariée, les auteurs observent qu'une « note élevée d'état général [surpoids à obésité] restait la seule variable épidémiologique significativement associée à un risque accru de manifestations cliniques » de lithiase, avec un sur-risque x 3,86 (p=0,03). Les affections identifiées chez les cas symptomatiques étaient des cholangites/cholangiohépatites (56 %), des cholécystites (23 %), les deux ensemble (19 %) ou une lipidose (1 %). Dans 10 cas, il n'y avait pas de pathologies concurrentes. Huit de ces cas présentaient une lithiase obstructive, mais au total 43 % des chats symptomatiques présentaient une obstruction du canal biliaire. Les pathologies associées aux cas symptomatiques étaient une pancréatite (6 cas) et une entéropathie chronique (8 chats).

Plus de calculs en plus de sites…

« La léthargie, les vomissements, l'anorexie, l'ictère et l'hyperthermie [>39,2° C] étaient significativement plus fréquents chez les chats considérés comme symptomatiques ». En analyse multivariée, les vomissements (sur-risque x 9,89 - p=0,001), l'hyperthermie (x 10,52 - p =0,02), l'ictère (x 5,79 - p=0,05) et des ALT élevées (x 15 – p<0,01) étaient significativement associés à la présence de signes cliniques. Les calculs étaient le plus souvent (70 % des cas) intravésiculaires, dans le canal cholédoque (43 % des cas), le canal cystique (24 % des cas) et/ou les canaux intrahépatiques (22 %). Des localisations multiples des lithiases à l'intérieur des voies biliaires (x 8,11 - p=0,001) et du cholédoque (x 18,47 - p=0,004) étaient les seules variables échographiques associées à la survenue de signes cliniques. Lors de l'identification des lithiases à l'échographe, d'autres anomalies étaient aussi identifiées (vésiculaires, hépatiques, digestives…) chez plus de la moitié des chats.

Attention aux obstructions du cholédoque

Plus de la moitié (57 %) des chats symptomatiques n'ont reçu qu'un traitement médical, 22 % un traitement chirurgical et 21 % aucun traitement (7/12 sont décédés ou ont été euthanasiés peu après l'examen). Les mêmes proportions de chats avec ou sans signes cliniques rapportés aux calculs biliaires ont survécu (74 et 75 %, respectivement). Un peu moins du tiers des chats avec obstruction du canal cholédoque (29 %) ont subi une intervention ; la même proportion n'a pas reçu de traitement. Les autres ont reçu un traitement médical, antibiotique pour l'essentiel (93 %, bien qu'une infection n'ait été confirmée que pour un tiers des cas), devant l'acide ursodésoxycholique (50 %). Toutefois, le seul facteur associé au sur-risque de décès avant la fin de l'hospitalisation (analyse multivariée prenant en compte les traitements) était l'obstruction du cholédoque (x 13,87 - p=0,001). L'intervention chirurgicale ne produit pas d'effet protecteur significatif, à la différence du traitement médical (p<0,001). Pour les auteurs, cela signifie que « la présence de signes cliniques » sur des calcules biliaires « n'est pas une indication de traitement chirurgical en soi, et que des stratégies diagnostiques et thérapeutiques devraient prendre en compte les maladies hépatobiliaires concurrentes », présentes dans 75 % des cas symptomatiques. Parmi les chats pour lesquels la découverte était incidente et ayant un suivi documenté, « aucun n'a par la suite développé de signes cliniques » attribuables aux lithiases biliaires (les calculs ont disparu chez trois de ces cas). « Ce qui indique qu'elles peuvent ne pas être problématiques ». Mais les auteurs préviennent qu'il faudrait « une étude prospective à long terme avec un suivi normalisé pour confirmer ce résultat ».