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15 juillet 2019

Les gamma-GT urinaires sont un marqueur précoce d'insuffisance rénale aiguë chez le chien

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

 

Déceler une insuffisance rénale aiguë (IRA) doit être précoce afin de la prendre en charge rapidement et augmenter les chances de survie de l'animal. Une étude prospective chez le chien hospitalisé a ainsi recherché, parmi les paramètres urinaires habituellement mesurés, ceux susceptibles de contribuer à détecter la maladie.

Les gamma-GT urinaires étaient un candidat plausible ; les résultats observés confirment cette hypothèse.

Les gamma-glutamyltransférases (GGT) sont des enzymes habituellement absentes des urines. Mais elles y sont excrétées lors de lésion des néphrons. Elles peuvent y être dosées de la même manière que dans le plasma.

97 chiens sans lésion rénale apparente

L'étude a été réalisée au centre des urgences de l'école vétérinaire de Pise en Italie. Elle a inclus 97 chiens hospitalisés ne présentant pas de signes d'altération de la fonction rénale (pas d'azotémie notamment) – les deux tiers révélant ultérieurement une IRA débutante (de stade 1 selon la classification IRIS) –. Ses résultats sont publiés en libre accès dans le dernier numéro du Veterinary Record (numéro daté du 13 juillet et publié en ligne le 11).

Le stade IRIS 1 correspond à une augmentation progressive de la créatininémie, d'au-moins 0,3 mg/dL sur une période de 48h, et/ou une oligurie ou une anurie prolongée plus de 6h et répondant à la fluidothérapie, sans apparition d'une azotémie.

Ici, les chiens recrutés n'étaient donc pas azotémiques initialement (créatininémie < 1,6 mg/dL). Ils ne présentaient pas de déshydratation, ou étaient inclus après sa correction. Et ils devaient être hospitalisés, quel qu'en soit le motif, pour une durée d'au moins 48h ; ils l'ont été 3 jours en médiane.

Plus de la moitié des chiens étaient hospitalisés pour une chirurgie (orthopédique ou, le plus souvent, générale). Les motifs médicaux étaient variés.

Bilan urinaire et index uGGT/uc

Des analyses sanguines (créatininémie) et urinaires ont été effectuées à leur inclusion (moins de 24h après leur admission), puis après 24h et 48h. La quantité d'urine émise a également été mesurée. Ensuite, les chiens ont été suivis jusqu'à leur sortie (ou leur décès). Leur éventuel décès dans le mois suivant leur retour à domicile était également renseigné.

Le bilan urinaire comprenait au moins la créatininurie, le ratio protéines/créatinine urinaires (uP/C) et les GGT urinaires (uGGT). L'index uGGT/uc était également calculé : il correspond au rapport uGGT (en unités/L) sur créatininurie (uc, en mg/dL) et s'exprime en unités/g.

Valeurs significativement augmentées

Les résultats des examens pratiqués durant les 48h premières heures d'hospitalisation montrent ainsi que près des deux tiers des chiens (62/97, 64 %) ont développé une IRA de grade 1 : 10 ont présenté une oligurie, 17 une augmentation de la créatininémie et 35 les 2 associées. L'IRA apparait donc très fréquente chez le chien hospitalisé.

Les résultats montrent surtout que ces chiens (groupe IRA) présentent des valeurs significativement augmentées pour trois paramètres, par comparaison à celles mesurées ou calculées chez les autres chiens (groupe non IRA, voir tableau en illustration principale) :

  • Le ratio uP/C (1,07 vs 0,35 en médiane) ;
  • Les uGGT (91 vs 35 unités/L en médiane) ;
  • L'index uGGT/uc (140 vs 40 unités/g environ en médiane).

Une corrélation positive est également établie entre l'index uGGT/uc et le ratio uP/C (mais pas avec la créatininémie).

« Un outil diagnostique complémentaire »

L'analyse statistique montre aussi que l'index uGGT/uc est un indicateur fiable pour le diagnostic d'une IRA stade 1. La valeur seuil retenue ici est de 57,50 unités/g, correspondant à une sensibilité et une spécificité de 75,4 % et 75,6 %, respectivement. Selon les auteurs de l'étude, cet index « est un biomarqueur modérément sensible et spécifique qui peut être utilisé pour détecter des lésions rénales plus précocement que la créatininémie chez les chiens atteints de maladie grave ». Il représente ainsi « un outil diagnostique complémentaire ».

Évolution fatale plus fréquente

Dans le groupe IRA, l'atteinte s'est aggravée chez 10 chiens (évolution vers un stade IRIS supérieur : stade 2, 3 et même 4 pour 2 chiens) dans les jours suivant les 48h premières heures d'hospitalisation. 4 chiens sont restés stables et les autres (48) sont revenus à des valeurs normales de créatininémie. 3 chiens de l'autre groupe ont également développé une IRA ultérieurement.

Les taux de mortalité dans les deux groupes présentent des différences, mais qui demeurent non significatives. L'évolution est en effet fatale pour 29 % des chiens atteints d'IRA (18/62) tandis qu'elle l'est chez 14 % des autres chiens (5/35). Parmi ces 23 décès, 13 sont survenus en cours d'hospitalisation, les autres dans les 28 jours suivant la sortie du chien.

La mortalité est particulièrement importante chez les chiens pour qui l'IRA apparaît plus tardivement ou s'aggrave : 9 cas sur les 13 (soit près de 70 %).