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Elanco & Proplan

15 mai 2024

Infestation par les tiques : la race, le sexe, le pelage du chien sont des facteurs de risque significatifs

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Dans cette étude, le cairn terrier est identifié comme la race la plus à risque d'infestation par des tiques. Mais son pelage, mi-long, et ses activités pourraient aussi favoriser ces infestations (cliché Pixabay).
Dans cette étude, le cairn terrier est identifié comme la race la plus à risque d'infestation par des tiques. Mais son pelage, mi-long, et ses activités pourraient aussi favoriser ces infestations (cliché Pixabay).
 

Le risque d'infestation par les tiques, et en conséquence celui des maladies vectorielles transmises par ces parasites, justifient le conseil de mesures et traitements préventifs. Mais indépendamment de leur environnement et de leur mode de vie, les chiens ne sont pas tous égaux devant ce risque. Une étude épidémiologique menée au Royaume-Uni dans le cadre du programme VetCompass identifie en effet plusieurs paramètres phénotypiques et démographiques l'influençant significativement.

Pic d'infestation en juin

Les résultats de cette nouvelle étude, dont le protocole diffère un peu des précédentes, sont publiées en libre accès dans le JSAP.

Les chercheurs ont à nouveau sélectionné les chiens médicalisés dans les 887 cliniques vétérinaires généralistes adhérentes sur une année (2016), soit 905 553. Mais ils ont étudié les données de leur dossier médical sur une période de 5 ans : 2014-2018.

Les cas d'infestation ont été recensés, c'est-à-dire les chiens chez lesquels au moins une tique a été observée par le vétérinaire ou son propriétaire (quelle que soit la localisation) durant la période d'étude.

À partir des cas potentiels recensés par une recherche automatique (plus de 63 000), une sélection aléatoire de 6512 (10,33 %) a été vérifiée par l'analyse manuelle des dossiers. Elle a abouti à une cohorte de 1903 cas confirmés, qui ont fait l'objet des travaux de recherches pour mesurer les prévalences et identifier les facteurs de risque.

Le nombre de tiques et la date de l'infestation ont été notés, montrant un pic durant le mois de juin (421 cas soit 22,12 %), suivis de juillet (342 cas), mai (299) et août (239).

Une prévalence limitée mais sous-estimée

Les calculs de prévalence ont été effectués pour 3 périodes.

  • Sur 5 ans (2014-2018) soit sur les 1903 cas, la prévalence est de 2,03 % ;
  • Sur 3 ans (2015-2017) soit 1375 cas, elle est de 1,47 % ;
  • Sur 1 an (2016) soit 623 cas, elle est établie à 0,67 %.

Ces prévalences sont probablement sous-estimées compte tenu que le protocole exclut les cas d'infestation non rapportés dans le dossier médical du chien. Le propriétaire ne présente pas non plus son chien en consultation s'il a simplement vu et enlevé une tique sur lui. D'autres études, basées sur des questionnaires propriétaires, révèlent des prévalences beaucoup plus élevées.

Un focus sur la race

La recherche des facteurs de risque a été effectuée à partir des 1903 cas recensés pendant 5 ans.

Elle a porté sur une série de paramètres phénotypiques ou démographiques des chiens : race, port des oreilles, pelage, forme du crâne, type épagneul ou caniche, race pure, groupe racial, poids, embonpoint, âge, sexe, statut sexuel (stérilisation), assurance.

L'étude s'est particulièrement focalisée sur la race. Les paramètres liés (comme la forme du crâne ou le port des oreilles) ont donc été écartés de l'étude multivariée, qui n'a finalement retenu que la race, l'embonpoint, l'âge, le sexe, le statut sexuel, et la souscription d'une assurance santé.

Les nouvelles races (designer dogs), issues du croisement volontaire de deux races pures (le cockapoo par exemple, croisé cocker et caniche), populaires outre-Manche, ont été considérées comme des races canines dans l'analyse, et comparées aux croisés tout venant pris comme référence.

Ainsi, l'analyse identifie 16 races significativement plus à risque que les chiens croisés :

  • Le cairn terrier avec un surrisque (odds ratio, OR) de 2,86 ;
  • Le caniche standard, OR de 2,80 ;
  • Le goldendoodle (croisé golden retriever et caniche), OR de 2,63;
  • Le cavapoo (cavalier king-charles x caniche), OR de 2,50 ;
  • Le cockapoo (cocker x caniche), OR de 2,42 ;
  • Le parson russel terrier, OR de 2,31 ;
  • Le golden retriever, OR de 2,30 ;
  • Le schnauzer nain, OR de 2,25 ;
  • Le springer anglais, OR de 2,08 ;
  • Le cavachon (cavalier king-charles x bichon), OR de 2,03 ;
  • Le border terrier, OR de 1,98 ;
  • Le cocker anglais, OR de 1,96 ;
  • Le sprocker (springer x cocker anglais), OR de 1,94 ;
  • Le border collie, OR de 1,92 ;
  • Le westie, OR de 1,83 ;
  • Le labradoodle (labrador x caniche), OR de 1,79.

Selon les auteurs, il est possible que ces prédispositions soient davantage le reflet d'un type de pelage plutôt que de véritables prédispositions raciales.

Globalement, les designer dogs sont significativement plus à risque que les croisés (OR de 1,81). Mais ces hybridations concernent souvent des races déjà à risque.

Protection des bouledogues !

Inversement, 6 races sont significativement moins à risque que les croisés tout venant, dont, pour une fois, le bouledogue français… :

  • Le staffie, OR de 0,35 ;
  • Le rottweiler, OR de 0,35 ;
  • Le chihuahua, OR de 0,38 ;
  • Le bulldog anglais, OR de 0,47 ;
  • Le bouledogue français, OR de 0,51 ;
  • Le shih tzu, OR de 0,67.

Sexe, poil, oreilles…

En remplaçant la race par chacun des paramètres liés, l'analyse multivariée identifie aussi les facteurs de risque suivants.

  • Les chiens mâles sont plus à risque d'être infestés de tiques que les femelles (OR de 1,24). Le risque augmente aussi chez les chiens stérilisés par comparaison aux entiers (OR de 1,13). Mais les auteurs n'en proposent pas d'hypothèse explicative.
  • Le risque diminue avec l'âge, conformément à certaines observations antérieures. Les chiens jeunes sont toutefois potentiellement plus actifs que les plus âgés, et sortent davantage.
  • Le risque est également artificiellement augmenté si le propriétaire a souscrit une assurance santé (ce qui favorise globalement la médicalisation de son animal).
  • Les chiens au poil mi-long sont plus à risque que ceux au poil court (OR de 2,20), un élément controversé selon d'autres études. Toutefois, chez les chiens au pelage court, la visualisation donc le retrait des tiques par le propriétaire sont plus faciles. Et le poil long pourrait potentiellement gêner les tiques.
  • Les animaux aux oreilles en V tombantes ou pendantes sont plus à risque que ceux aux oreilles dressées. Mais les tiques peuvent alors peut-être plus facilement monter sur le chien depuis le sol ou la végétation. Et elles sont plus difficiles à observer sur ce type d'oreilles que sur des dressées ou semi-dressées.

Ces observations peuvent être d'importance en pratique vétérinaire courante afin d'alerter les propriétaires des (sur)risques d'infestation, et de conseiller des mesures simples comme rechercher attentivement et éliminer les tiques sur des chiens dont le pelage ou les oreilles les dissimulent plus facilement, ou de faire tondre les chiens toilettés plus court en été.

De nombreux autres facteurs influencent le risque d'infestation, notamment la fréquence et le lieu de promenade, l'environnement de vie (urbain ou rural), la pratique d'activités extérieures comme la chasse, la pression parasitaire locale, que l'étude n'a pas pris en compte ici. Les espèces de tiques en cause, et le risque associé de maladies vectorielles, n'ont pas non plus été identifiés.