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Elanco & Proplan

1er août 2025

Les cas humains d'échinococcose alvéolaire en croissance en Europe, y compris en France

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

La Suisse, l'Autriche et la Lituanie sont les pays européens présentant l'incidence la plus élevée de cas humains d'échinococcose alvéolaire, sur 2021-2023. C'est ce qui ressort d'une revue systématique de la littérature et des données des laboratoires nationaux de référence publiée fin juin, la première d'ampleur européenne. Dans la projection de tendance pour la France, les cas observés sont en rouge, l'estimation en bleu et l'intervalle de confiance à 95 % en bleu clair. Casulli et coll., 2025.
La Suisse, l'Autriche et la Lituanie sont les pays européens présentant l'incidence la plus élevée de cas humains d'échinococcose alvéolaire, sur 2021-2023. C'est ce qui ressort d'une revue systématique de la littérature et des données des laboratoires nationaux de référence publiée fin juin, la première d'ampleur européenne. Dans la projection de tendance pour la France, les cas observés sont en rouge, l'estimation en bleu et l'intervalle de confiance à 95 % en bleu clair. Casulli et coll., 2025.
 

« Malgré son incidence relativement faible, l'échinococcose alvéolaire [est] de plus en plus préoccupante en Europe en raison de son impact clinique potentiellement mortel, de sa diffusion géographique, de la prévalence accrue d'Echinococcus multilocularis chez les hôtes définitifs, de l'absence de vaccins humains et animaux et de la rareté des mesures de contrôle actives pour prévenir l'infection ». Des épidémiologistes de santé publique, des cliniciens et des parasitologistes de toute l'Europe viennent de publier la première étude d'ampleur continentale sur cette parasitose chez les humains. Leur principale conclusion est que la maladie est en augmentation dans les pays où il y a suffisamment de données pour réaliser une projection jusqu'en 2027.

Deux épicentres

Ils ont recherché toutes les notifications de cas dans la littérature scientifique et à partir des données de santé nationales (laboratoires de référence inclus) dans 40 pays européens entre 1997 et 2023 : ils en ont identifié dans 28 d'entre eux. C'est au total 4 207 cas confirmés sur ces 26 ans, dont plus des deux tiers (68 %) sont localisés dans les pays où ce parasite est endémique : France, Allemagne, Suisse et Autriche. Toutefois, 21 % des (autres) cas sont répartis sur trois pays : Lituanie, Pologne et Slovaquie. Les pays n'ayant pas fourni de cas sont : l'Albanie, la Bosnie, la Bulgarie, Chypre, la Grèce, l'Islande, le Kosovo, Malte, la Moldavie, le Monténegro, la Macédoine du nord (FYROM) et le Portugal. Il y a donc à présent deux épicentres de transmission de l'échinococcose alvéolaire en Europe (voir l'illustration principale) : la région alpine (Allemagne, Autriche, France et Suisse) et une partie de la région Baltique (Lituanie, Pologne et Lettonie). Pour la Lituanie, si la parasitose y est connue au plan historique, son importance est une émergence récente, probablement en lien avec la mise en place de la surveillance et les progrès diagnostiques (l'infléchissement des cas en 2020-2021 avec le Covid est au moins partiellement en faveur de cet argument). 

Doublement de l'incidence

L'échinococcose alvéolaire (ou multiloculaire) reste cependant une maladie rare, avec en moyenne 0,063 cas pour 100 000 habitants sur l'ensemble de la période étudiée (et 0,060 pour les 22 États membres de l'UE27). Lorsqu'ils comparent l'incidence moyenne des cas survenus entre 2021 et 2023 (22 pays concernés) à celle moyenne de l'ensemble de la période étudiée, les auteurs observent un doublement (à 0,121 cas p. 100 000 hab. et 0,120 pour les 19 pays de l'UE27 concernés). La parasitose est donc bien en émergence à l'échelle européenne. D'aileurs trois pays ont aussi détecté leurs premiers cas ces dernières années : la Serbie (4 cas autochtones sur 2022 et 2023), l'Italie (premier cas autochtone en 2023) et l'Irlande (deux cas importés en 2023).

En croissance (presque) partout

Les auteurs ont aussi modélisé les données pour une incidence future (2024 à 2027) pour 21 des pays pour lesquels les données de départ étaient suffisantes. Pour 14 d'entre eux, l'incidence annuelle est calculée en augmentation significative (p<0,05). C'est en particulier le cas pour la France (voir l'encart dans l'illustration principale) où, comme en Allemagne ou en Autriche, cette tendance croît de manière régulière. En revanche, des tendances à une plus forte hausse sont calculées pour la « Belgique, la République tchèque, la Hongrie, la Lituanie et la Slovaquie ».

Comme l'échinococcose alvéolaire humaine est sous-estimée dans tous les pays, les auteurs proposent quatre mesures pour en améliorer la surveillance, selon un principe d'Une Seule Santé : 

  • une révision de la définition réglementaire européenne de l'échinococcose alvéolaire (actuellement confondue avec celle de la cysticercose),
  • une mise en place d'une surveillance de l'infection des renards,
  • une obligation de déclaration des cas humains,
  • et la mise en place d'un registre européen de ces cas.