26 juillet 2016

Depuis quelques mois, Dechra commercialise en France Zycortal°, le premier traitement substitutif à vie des chiens atteints « d'hypocorticisme primaire » ou « maladie d'Addison ». Il s'agit d'une suspension injectable longue action à 25 mg/ml de pivalate de désoxycortone (ou DOCP). Les injections sont à répéter « à vie » tous les 25 jours à la dose la plus faible possible : entre 2 et 2,5 mg/kg/25 jours. Zycortal° est présenté dans un flacon verre de 4 ml (soit 100 mg de pivalate de désoxycortone) à un prix centrale d'environ 56 € HT. Après la première ponction, le flacon se conserve trois mois à température ambiante. Aux doses habituelles, un flacon de 4 ml permet donc de réaliser quatre injections espacées de 25 jours sur un chien de 10 kg, deux injections si le chien pèse 20 kg ou une seule pour un gros chien de 45 kg.

Depuis 1998 aux USA

La désoxycortone est la dénomination internationale recommandée pour ce premier minéralocorticoïde vétérinaire sans activité glucocorticoïde significative. Il est aussi connu sous d'autres dénominations : 11-desoxycorticosterone (ou DOC aux USA), 21-hydroxyprogestérone, deoxycortone au Royaume-Uni ou encore cortexone.

Aux USA depuis 1998, au Canada et en Australie, ce minéralocorticoïde est déjà disponible dans une formulation injectable à 25 mg/ml pour chiens sous la marque Percorten°-V (Novartis). Les excipients sont toutefois légèrement différents de ceux de la suspension Zycortal°.

Le dossier clinique de la nouvelle spécialité de Dechra s'appuie donc en partie sur les essais publiés aux USA avec Percorten°-V en particulier pour la posologie et la tolérance. La maladie d'Addison n'étant pas une maladie fréquente, le développement de ce médicament en Europe a bénéficié des allégements prévus pour les espèces et les indications mineures. Ce traitement minéralocorticoïde par voie injectable est associé à de faibles doses d'un glucocorticoïde par voie orale.

84 % d'amélioration à trois mois et 86 % à six mois

Un essai clinique a été réalisé sur 152 chiens aux USA (en comparaison à Percorten°-V) et en France (sans comparaison). Dans cet essai, Zycortal° a été associé à la prednisolone (ou prednisone) à la dose initiale de 0,2 à 0,4 mg/kg/j. Le taux d'amélioration clinique associé à une normalisation des valeurs biologiques est de 84 % à 3 mois et de 86 % à six mois.

Dose à ajuster entre 2 et 2,5 mg/kg/25 jours

Tableau d'ajustement des doses à J25

Les doses de désoxycortone et de prednisolone sont à ajuster au « cas par cas » et nécessitent un suivi assez complexe.

À J0, la première injection SC est faite à la dose est de 2,2 mg/kg, soit 0,88 ml/10 kg. Elle est associée à une prescription de prednisolone par voie orale à la dose 0,2 à 0,4 mg/kg/j.

À J10, un ionogramme (avec une analyse du rapport Na⁺/K⁺ dans le sang) est réalisé. Son résultat sera exploité pour l'ajustement des doses à J25 (voir tableau).

• Si les signes cliniques n'ont pas régressé ou se sont aggravés, la dose de prednisolone peut déjà être ajustée.

À J25. Un nouvel ionogramme (rapport Na⁺/K⁺) est réalisé avec un bilan clinique complet. La dose de désoxycortone est ajustée à la dose la plus basse possible. L'objectif est d'obtenir un bon état clinique avec un rapport Na⁺/K⁺ compris entre 27 et 32.

• Si le rapport est > 32 avec un bon état clinique, les doses de désoxycortone peuvent être diminuées à 2,1 ou 2 mg/kg/25 jours (soit 0,8 ml/10 kg). Au « cas par cas », les injections peuvent être espacées de plus de 25 jours.
• À l'inverse, si le rapport est < 27 ou si l'état clinique n'est pas suffisamment amélioré, les doses de Zycortal° ou du glucocorticoïde (prednisolone) sont à ajuster au « cas par cas ».

Ce suivi est répété jusqu'à un état clinique satisfaisant avec un rapport Na⁺/K⁺ compris entre 27 et 32.

Fréquente polyuropolydipsie

Ce minéralocorticoïde, sans activité glucocorticoïde, peut être à l'origine d'une rétention hydrosodée et donc d'un accroissement de la volémie (hypervolémie) comme de la pression sanguine (hypertension…).

Lors de l'essai clinique, il a été observé comme effets indésirables « très fréquents (> 10 %) » une polydipsie (13 % des chiens), une polyurie (15), ainsi que des troubles de la miction (8 %). Les effets indésirables « fréquents (> 1 %) » signalés sont une dépression, une léthargie, des vomissements, un halètement, une anorexie, une diarrhée, une polyphagie, des tremblements, de la fatigue et des infections urinaires.

Médicaments humains inadaptés aux chiens

En France, jusque-là, les médicaments minéralocorticoïdes humains étaient inadaptés au traitement substitutif à « vie » de l'hypocorticisme primaire chez le chien. L'acétate de désoxycortone (Syncortyl°) nécessite des injections IM quotidiennes « à vie » de 0,2 à 0,4 mg/kg/j. Les comprimés d'acétate de fludrocortisone (Flucortac°) sont plus faciles d'emploi mais ont une forte activité glucocorticoïde à l'origine d'effets secondaires à long terme. En outre, ce médicament est, en pratique, quasi inaccessible pour les vétérinaires. Car il est préparé par la pharmacie centrale des hôpitaux de Paris. Même, s'il n'est pas strictement réservé à l'usage hospitalier.