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Elanco & Proplan

5 novembre 2025

Boues biliaires : visualisées à l'échographie, elles ne justifient pas une antibiothérapie

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

Les boues biliaires, détectées à l'échographie, ne devraient plus être considérées comme un marqueur fiable des maladies hépatobiliaires infectieuses ou inflammatoires chez le chat, conclut une étude rétrospective nord-américaine. Cliché : FlickR.
Les boues biliaires, détectées à l'échographie, ne devraient plus être considérées comme un marqueur fiable des maladies hépatobiliaires infectieuses ou inflammatoires chez le chat, conclut une étude rétrospective nord-américaine. Cliché : FlickR.
 

Il est des résultats négatifs qui méritent d'être publiés. C'est le cas d'une étude rétrospective réalisée par des imageristes, épidémiologistes et cliniciens de l'université de Washington (USA) comparant des chats présentant ou non à l'échographie de boues biliaires. En lien avec les prélèvements analysés, ils concluent que bien que fréquemment observées, la présence de ces boues « ne permet pas de prédire de manière fiable une infection ou une inflammation des voies biliaires ». Et ne justifient donc pas à elles seules une antibiothérapie.

Pertinence clinique ?

Les boues biliaires peuvent être visualisées à l'échographies (par effet de la gravité) et ne sont pas rares : la littérature les rapporte dans plus du tiers et « jusqu'à 40 % des chats présentant une maladie hépatobiliaire et entre 20 et 62 % de ceux présentant une obstruction biliaire extrahépatique ». Selon les publications, elles ont été rattachées à une culture bactérienne positive, ou qualifiées de découvertes incidentes sans pertinence clinique. La question est donc de savoir, estiment ces auteurs, si elles peuvent être utilisées comme un indicateur fiable d'une pathologie – et en particulier de cholangite neutrophilique ou de cholangiohépatite. Ils ont donc réalisé une étude rétrospective à partir des données de patients en consultation dans leur hôpital universitaire, entre juin 2015 et août 2024. Leur hypothèse était que la visualisation de ces boues « serait associée à une probabilité plus élevée de cholangite neutrophilique/cholangiohépatite, en particulier lorsqu'elle est accompagnée de preuves échographiques de pancréatite concomitante et/ou d'épaississement de l'intestin grêle ».

Pas de prédisposition raciale, ni d'âge

Tous les cas devaient avoir subi une échographie abdominale complète, avant la réalisation d'une cholécystocentèse échoguidée (percutanée). Le prélèvement devait donner lieu à une mise en culture et/ou une cytologie (les positifs étaient considérés comme des cas de cholangite neutrophilique) et chaque animal devait avoir subi une analyse sanguine (paramètres hépatiques et bilirubine totale). Sur les 166 cas obtenus (dont trois chats ayant subi cet examen deux fois à quelques mois d'intervalle), l'âge médian à la cholécystocentèse échoguidée était de 10 ans (de 1 à 18). Un peu moins de deux tiers (n=107, soit 62 %) avaient présenté une image échographique de boues biliaires. « Il n'y avait pas d'association statistiquement significative entre les données d'âge, sexe ou race et la présence de boues biliaires (p>0,05) ».

Valeurs d'ALT normales

Pour les paramètres hépatiques, seule l'activité sérique de l'alanine amino-transférase (ALT) a présenté une différence significative entre le groupe à boues biliaire et le groupe qui n'en présentait pas. « Plus précisément, les chats présentant des boues biliaires étaient plus susceptibles d'avoir une activité de l'ALT normale que ceux qui n'en présentaient pas » (p=0,025).

Pas d'association avec la cholangite neutrophilique

Quant à la présence d'une cholangite neutrophilique/cholangiohépatite, les animaux correspondant à la définition d'une telle affection représentaient 16,8 % de ceux présentant des boues biliaires, contre 17,0 % de ceux qui n'en présentaient pas (p> 0,999)… Les auteurs retiennent toutefois que, « parmi les chats présentant des boues biliaires, ceux qui avaient une activité ALT élevée étaient plus susceptibles d'être trouvés atteints de cholangite neutrophilique/cholangiohépatite que ceux présentant une ALT normale (25 et 12 %, respectivement) ». Cette différence n'est pas significative (p=0,135), mais les auteurs estiment que « la tendance est notable ». Il n'y avait pas non plus d'association statistique entre la présence de boues et un épaississement de la paroi de la vésicule biliaire (p> 0,999), ni avec une pancréatite (diagnostiquée sur la base des images échographiques), ni avec un épaississement de la paroi de l'intestin grêle (p> 0,999 à chaque fois).

Ces résultats ne valident pas l'hypothèse initiale des auteurs. Au contraire, ils « remettent en cause l'hypothèse clinique selon laquelle les boues biliaires seraient un marqueur fiable des maladies hépatobiliaires infectieuses ou inflammatoires chez le chat ». Aussi, leur présence « ne devrait pas être le seul critère pour décider de la nécessité d'administrer des antibiotiques ou de réaliser des examens hépatiques complémentaires chez un chat. Les praticiens devraient plutôt prendre en compte le tableau clinique global, incluant les analyses de laboratoire, les signes cliniques et les résultats de la culture bactérienne de la bile, avant de prendre une décision thérapeutique ».