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Elanco & Proplan

4 décembre 2025

Récidive de leishmaniose clinique : les jeunes adultes et les cas d'atteinte oculaire sont plus à risque

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Leishmania infantum, transmis par les phlébotomes, demeure une cause notable de mortalité des chiens en zone endémique (cliché Pixabay).
Leishmania infantum, transmis par les phlébotomes, demeure une cause notable de mortalité des chiens en zone endémique (cliché Pixabay).
 

La leishmaniose canine, l'une des principales maladies vectorielles du chien, reste complexe à prendre en charge. L'infection peut rester subclinique, être ou devenir clinique, avec des formes chroniques et, surtout, un risque de mortalité. Une étude espagnole (école vétérinaire de Madrid) s'est intéressée au pronostic de la maladie. Elle porte sur une large cohorte de 300 chiens, pris en charge et suivis sur 2 décennies : 114 entre 2000 et 2010 et 186 entre 2011 et 2022.

Facteurs de risque liés au chien

La réponse au traitement est très variable et l'évaluation du pronostic s'est appuyée sur les cas de récidives (dans les 12 mois), nécessitant de nouveaux cycles de traitement, et, bien sûr, les cas de mortalité. Une récidive était caractérisée par la récurrence des signes cliniques et/ou des anomalies aux examens sanguins et urinaires, associés à une hausse des taux d'anticorps anti-Leishmania, après une période d'amélioration clinique, et entraînant la reprise du traitement.

Les paramètres étudiés excluaient ceux liés au parasite (infectivité ou résistance au traitement par exemple) et au vecteur (composition de la salive), pour se concentrer sur l'animal et son environnement de vie, et ainsi sur 4 catégories de facteurs de risque : démographiques, épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques.

Les cas inclus disposaient d'un suivi d'au moins 2 ans, ou étaient décédés des conséquences de la leishmaniose.

Infestation malgré les mesures préventives

Les chiens inclus étaient des mâles à 61 %.

Seulement 3,7 % étaient vaccinés contre la leishmaniose (l'Espagne est une zone endémique). Mais 47 % portaient des colliers antiparasitaires (efficaces contre les phlébotomes vecteurs), 40 % étaient traités avec un spot-on et 4 % avec un spray antiparasitaire au moment du diagnostic.

La répartition des chiens selon la gravité de la maladie (classification du groupe LeishVet) est la suivante :

  • Stade I, 12 % ;
  • Stade II, 35,5 % ;
  • Stade III, 38,8 %
  • Stade IV, 13,7 %.

Bon pronostic à 51 %

Le suivi des chiens montre que le pronostic est favorable en courte majorité (154 chiens soit 51,3 %), c'est-à-dire sans récidive telle que définie ni décès.

À l'inverse, 66 chiens (22 %) ont manifesté une ou des récidives, et 80 autres (26,7 %) sont morts des suites de la leishmaniose.

Trois facteurs de risque de récidive…

L'analyse des données a permis d'identifier 3 facteurs significativement associés à un surrisque de récidive.

  • D'abord l'âge : les jeunes adultes (2-4 ans) sont les plus à risque, par comparaison aux plus jeunes (0-2 ans) et aux adultes matures (5-8 ans). Une distribution bimodale de la maladie avait déjà été décrite (avec un pic vers l'âge de 3 ans, puis vers 8 ans), ainsi qu'une atteinte plus sévère chez ces jeunes adultes. Ces chiens sont plus susceptibles aussi d'être actifs et de passer du temps à l'extérieur, avec un risque plus élevé d'exposition aux insectes vecteurs.
  • Ensuite, la présence d'une faiblesse au diagnostic (rapportée dans 57,2 % des cas de la cohorte).
  • Enfin, des signes d'atteinte oculaire au diagnostic (20,5 % des cas), lesquels sont souvent présents dans les stades avancés de la maladie.

Inversement une perte de poids (62,2 % des cas) est étonnamment associée à un moindre risque de récidive : elle a toutefois pu alerter plus rapidement le propriétaire, favorisant un diagnostic et une prise en charge précoce.

Le titre en anticorps, en revanche, n'apparaît pas ici comme significativement lié au pronostic, confortant d'autres résultats d'études (tandis que d'autres travaux encore l'avaient associé à la gravité de la maladie). L'évolution des titres reste (comme souvent) à interpréter dans le contexte clinique afin d'évaluer la réponse thérapeutique.

… Et quatre facteurs de risque de mortalité

Le risque de décès est, par ailleurs, significativement augmenté :

  • Chez les chiens de format moyen ou grand par comparaison aux petits (< 10 kg, risque x 4) ; les grands chiens ont déjà été identifiés comme plus à risque d'infection, et de développer des formes plus graves ;
  • Chez les plus âgés (les séniors, de 9 ans et plus) par comparaison aux jeunes adultes (2-4 ans) ;
  • Chez ceux présentant une faiblesse, des signes digestifs (26,8 % des cas de la cohorte, lesquels peuvent être secondaires à une atteinte rénale ou hépatique, ou à une intolérance au traitement) ou une lymphadénomégalie (60 % des cas, qui signe une atteinte systémique, et souvent une atteinte sévère), avec un risque triplé ;
  • Chez les chiens de stade le plus avancé de la maladie (stade IV : très sévère) par comparaison au stade I (risque x 25) ; ce stade IV correspond à une affection rénale terminale, souvent à l'origine du décès du chien.

Les recommandations de traitement sont confortées

Les recommandations thérapeutiques actuelles sont l'administration d'une combinaison d'antimoniate de méglumine ou de miltéfosine et d'allopurinol. En cas de xanthinurie, l'allopurinol peut être remplacé par des compléments alimentaires contenant des nucléotides (12 cas ici). Des immunomodulateurs, notamment la dompéridone (51 cas ici), sont également conseillés en monothérapie pour les cas de stade I. Dans cette cohorte, 50 chiens ont également reçu, à un moment ou un autre, de la prednisolone seule (ce qui n'est pas recommandé dans le traitement de la leishmaniose, mais peut cibler des troubles concomitants, liés au dépôt organique de complexes immuns (uvéite ou épistaxis, par exemple).

Selon l'analyse des données de la cohorte, un plus grand risque de récidives est observé chez les chiens traités par l'association miltéfosine et allopurinol, par comparaison à la combinaison d'antimoniate de méglumine et d'allopurinol (risque x 5), comme rapporté également dans certains travaux, mais qui reste controversé à la lumière d'autres résultats. En outre, le recours à la miltéfosine est parfois préféré dans les cas d'atteinte rénale (plus graves). L'usage des autres traitement (y compris l'allopurinol seul) est associé à un moindre risque, mais il s'agit potentiellement de chiens dont l'atteinte était moins grave.

De même, le risque de décès est très inférieur (réduit de 88 %) chez les chiens traités avec de la dompéridone, qui stimule la réponse immunitaire cellulaire. Son utilisation chez les chiens de stade I semble ainsi efficace pour éviter ou ralentir la progression de la maladie, et ainsi prévenir la mortalité. Mais son effet thérapeutique, voire prophylactique, demeure à étudier.