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21 octobre 2016

Un antigène recombinant validé pour le diagnostic d'exposition des chiens à Phlebotomus perniciosus

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

Carte de répartition de Phlebotomus perniciosus en Europe, actualisée à juillet 2016 (source : AVIA-GIS – projet Vector-Net pour E-CDC et Efsa).
Carte de répartition de Phlebotomus perniciosus en Europe, actualisée à juillet 2016 (source : AVIA-GIS – projet Vector-Net pour E-CDC et Efsa).
 

La difficulté de réaliser des études sérologiques sur l'exposition aux phlébotomes vecteurs de la leishmaniose vient d'être levée. Au moins pour son principal vecteur en Europe de l'Ouest : Phlebotomus perniciosus.

Dissection des glandes salivaires

Jusqu'à présent, la sérologie visant à détecter l'exposition des chiens à P. perniciosus était délicate car pour récolter les antigènes salivaires du moucheron, il fallait en disséquer les glandes salivaires et les broyer. Ce qui n'était pas compatible avec une production de réactifs à large échelle, et ne permettait pas de réaliser d'études sérologiques de grande ampleur. Une équipe européenne (italo-portugo-tchéco-britannique) vient d'évaluer une protéine salivaire du phlébotome (SP03B) produite en biotechnologie (recombinante) et donc pouvant être obtenue à large échelle. En comparant l'Elisa utilisant cette protéine recombinante (rSP03B) à l'Elisa de référence utilisant les antigènes extraits des glandes disséquées, ils confirment la qualité de ce nouveau test.

Validation sur trois populations

Cette protéine (SP03B) avait été détectée à l'occasion d'un criblage antérieur des protéines contenues dans l'homogénat de glandes salivaires du phlébotome, paraissant un candidat intéressant. Mais la protéine recombinante peut avoir subi des modifications lors de sa fabrication par la bactérie, qui limiteraient son intérêt réel. Pour vérifier que son antigénicité est respectée, les auteurs ont utilisé rSP03B comme antigène dans un test sérologique, et ont comparé les performances de ce test à celui qui utilise l'antigène “naturel” (l'homogénat de glandes salivaires). Comme les populations géographiquement distantes de phlébotomes peuvent présenter des variations, les auteurs ont comparé ces deux tests sur trois lots de sérums de chiens naturellement exposés à ce vecteur d'origines géographiques distinctes :

  • 118 sérums provenant de Campanie (Italie), foyer à risque élevé de leishmaniose canine, et étant issus de suspicions cliniques de cette maladie par les praticiens de la région ;
  • 96 sérums provenant de zone urbaines d'Ombrie (Italie), foyer à risque « moyen à élevé », et prélevés entre juillet et octobre, de 2007 à 2013, sur des chiens en bonne santé ;
  • 341 foyers provenant du centre de Lisbonne, « zone enzootique » pour le même parasite et prélevés en refuge sur des chiens croisés, « pour l'essentiel en mai 2012 ».

Corrélation significative

Pour chacune de ces trois localités, les résultats de la sérologie avec les deux tests étaient très significativement corrélés (voir le tableau ci-dessous). La réponse de base en anticorps était numériquement plus élevée dans les foyers italiens, par rapport au foyer portugais, mais sans atteindre le niveau de signification de 5 %. Cette variation pourrait refléter une différence de pression en piqûres (moindre en mai), et de la proportion d'animaux âgés dans chaque groupe.

Corrélation des résultats sérologiques des trois groupes de sérums de chiens, entre l'Elisa utilisant la protéine recombinante et celui avec l'homogénat de glandes salivaires du moucheron (d'après Kostalova et coll., 2016).

 

Perspective: marqueur d'exposition

Ces auteurs ont également utilisé une technique plus performante (mais moins automatisable) pour vérifier que les épitopes de rSP03B étaient conservés ; c'est effectivement le cas. Et comme les populations testées ici sont géographiquement éloignées, ils estiment que « la réactivité croisée entre [ces] populations [d'une même espèce de phlébotome] est très importante ». Ainsi, « cet [Elisa] pourrait être utilisé comme marqueur d'exposition sur l'ensemble de la zone géographique de distribution de P. perniciosus ». Une fois développé au plan commercial, ce test Elisa « devrait pouvoir être utilisé dans des études épidémiologiques », et par les cliniciens, « comme marqueur du risque d'infestation par Leishmania infantum », par exemple au retour d'un séjour en zone d'enzootie. Toutefois, la réponse sérologique à la salive de phlébotomes est spécifique de l'espèce de moucheron : ce test ne vaudra que pour P. perniciosus, a priori pas pour P. papatasi, P. sergenti ou P. perfiliewi