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30 juillet 2020
Le sentiment d'imposture est anormalement fréquent chez les jeunes diplômées anglo-saxonnes
« Le syndrome de l'imposteur est la tendance à douter de ses propres capacités en dépit de preuves positives du contraire ». Il serait présent « dans des proportions alarmantes » chez les jeunes vétérinaires, surtout féminines et exerçant en Grande-Bretagne et Nouvelle-Zélande, selon une « étude exploratoire » récente. Des études antérieures sur les étudiants et résidents en médecine humaine aux USA ont trouvé une association significative entre ce « doute maladif » et la survenue ultérieure de burnout, tandis que d'autres l'ont aussi trouvé associé à un caractère perfectionnistes, de la dépression, de l'anxiété.
Plusieurs études ont montré une fréquence plus élevée de ce syndrome chez les femmes. Comme 81 % des étudiants vétérinaires aux USA sont des femmes, et qu'une étude antérieure a montré que le risque de suicide est plus élevé chez les femmes vétérinaires (voir LeFil du 4 janvier 2019), une équipe rassemblant des cliniciens et chercheurs de plusieurs universités (dont vétérinaires) américaines a lancé la première étude du genre, « via les réseaux sociaux » entre le 9 mai et le 19 octobre 2019. Décrit à la fin des année 1970 par des psychologues cliniciens, le syndrome de l'imposteur repose sur le déni systématique de la propriété de tout accomplissement personnel ; il peut prendre des proportions importantes, et « polluer l'existence du sujet affecté ». Les personnes concernées attribuent leurs succès à des facteurs qui leurs sont extérieurs (chance, réseaux…) et « sont convaincus que les autres les surestiment ; elles vivent dans la peur que leur incompétence [ressentie] soit découverte ». Son diagnostic repose sur un questionnaire (échelle de Clance, du nom de l'un des deux psychologues qui ont forgé le terme). Cette échelle repose sur 20 points, devant être notés de 1 (pas vrai du tout) à 5 (très vrai), soit 100 points au total. C'est cette grille qui a été utilisée ici. Classiquement, les personnes ayant de 41 à 60 points sont modérément concernées, celles obtenant de 61 à 80 présentent des sentiments d'imposture fréquents, et intenses au-dessus de 80. L'intervention clinique est recommandée à partir du score de 62.
Des réponses (n=941) sont parvenues de plusieurs dizaines de pays, de vétérinaires exerçant pour 83,6 % en clientèle, et en majorité (90,1 %) de femmes. Plus des deux tiers des répondants (68 %) sont au-dessus du score de 62, « dénotant un sentiment intense d'imposture au moment de répondre » à l'étude (chez les médecins en exercice, la proportion la plus élevée parmi les études publiées est à 50 %). Toutefois, les auteurs ont focalisé leur analyse sur les trois pays comptant plus de 50 répondants : les USA (56,1 % des répondants), le Royaume-Uni (25,6 %) et la Nouvelle-Zélande 6,4 %). Dans ces conditions, les principaux facteurs trouvés comme significativement associés à une note élevée à l'échelle de Clance sont :
Il était demandé dans le questionnaire d'évaluer l'impact d'un tel sentiment d'imposture sur ses vies personnelles et professionnelle. Les auteurs calculent aussi qu'il y a une association significative entre la note à la grille de Clance et l'impact (négatif) sur la vie professionnelle – et de manière plus limitée sur la vie personnelle. En particulier pour les répondants britanniques pour la vie professionnelle (x 1,5 par rapport aux USA - p=0,005), mais pas pour la vie personnelle (p=0,07). En analyse ordinale (moins de biais possibles), ils observent aussi que ce sur-risque est encore plus élevé pour les répondants ayant 2,5 à 5 années d'exercice (x 2,1, p<0,001) pour la vie professionnelle, alors que seules les deux premières années d'exercice semblent impacter la vie personnelle. Les hommes ont un impact plus faible (35 % de protection par rapport aux femmes) sur leur vie professionnelle. Ni hommes ni femmes ne présentent alors d'association significative pour la vie personnelle.
Pour les auteurs, le syndrome d'imposture « connaît un pic aux périodes de transition » professionnelle comme l'accès à un poste de responsabilité à l'hôpital pour les jeunes médecins. « Il pourrait en être de même pour les vétérinaires », au sens de la transition entre l'obtention du diplôme et les premières années d'exercice. Ils suggèrent donc, en attendant des études complémentaires où les hommes seraient plus représentés, « de travailler au développement et à la mise en place de changements environnementaux pour s'assurer du bien-être pérenne des jeunes diplômés ».
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