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1er juillet 2020

En 10 ans, moins de petfood conventionnel dans les gamelles des chiens et chats

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Résultats de l'enquête sur les modes de nutrition des chiens et chats dans 5 pays anglo-saxons (Canada, USA, Royaume-Uni, Australie, Nouvelle-Zélande). L'alimentation « conventionnelle » désignent les gammes traditionnelles de l'industrie du petfood (aliments complets en croquettes ou boîtes). D'après Dodd et al., Veterinary Record, 2020.
Résultats de l'enquête sur les modes de nutrition des chiens et chats dans 5 pays anglo-saxons (Canada, USA, Royaume-Uni, Australie, Nouvelle-Zélande). L'alimentation « conventionnelle » désignent les gammes traditionnelles de l'industrie du petfood (aliments complets en croquettes ou boîtes). D'après Dodd et al., Veterinary Record, 2020.
 

Le sur-stockage de petfood de la part des propriétaires à l'annonce du confinement en mars dernier laisse croire que les aliments dits industriels sont largement majoritaires dans la ration des chiens et chats. Et c'est bien le cas, selon les résultats d'une étude sur les modes actuels de nutrition des carnivores domestiques et leur évolution sur 10 ans. Une progression de la proportion de maîtres optant pour des régimes « non-conventionnels » (ration ménagère, végétarienne ou vegan, à base d'aliments crus, etc.) est toutefois observée aussi. Elle reste faible mais semble s'installer dans la durée.

Vision des tendances actuelles

L'étude, menée par des cliniciens universitaires du Canada et de Nouvelle-Zélande, a inclus près de 3700 propriétaires de chiens et/ou chats (des femmes à 90 %), de divers pays anglo-saxons (Canada et Nouvelle-Zélande, mais aussi Royaume-Uni, USA et Australie). Ses résultats ne sont donc pas directement transposables en France. Mais ils apportent une vision des tendances actuelles, déjà partagées en Europe (ou peut-être à venir). Ils sont présentés en libre accès dans le dernier numéro du Veterinary Record.

Les personnes interrogées ont répondu à un questionnaire en ligne, qui a permis d'évaluer leurs habitudes actuelles (2018) pour nourrir leur animal. Certains étant multi-possesseurs, le travail porte ainsi sur 1542 chats et 2940 chiens.

Les données ont ensuite été comparées à celles publiées sur le sujet depuis 2008 (dans les mêmes pays que l'enquête), afin d'objectiver les changements et prendre la mesure des orientations suivies dans l'évolution des pratiques. Ces pratiques d'alimentation s'entendent sans objectif thérapeutique, pour des animaux en bon état de santé.

Le petfood traditionnel reste la norme

Les auteurs de l'étude s'attendaient à observer une diminution de la proportion de propriétaires nourrissant exclusivement leur animal avec des aliments industriels qu'ils qualifient de « conventionnels » (aliments complets, en boîtes ou croquettes, dont les composants et la recette sont traditionnels), et une augmentation des rations ménagères et à base d'aliments crus (BARF, produit fini acheté dans le commerce ou « fait maison »).

Leurs résultats leur donnent raison : seuls 13 % des chiens et 32 % des chats ne sont nourris qu'avec du petfood conventionnel (voir tableau en illustration principale). C'est une chute plus que sensible par comparaison aux données des années précédentes, qui chiffrent ces proportions entre 48 et 65 % pour les chiens, et 82-85 % pour les chats.

En revanche, à ce jour, ces animaux restent en très large majorité alimentés au moins en (grande) partie avec ces produits : à près de 80 % pour les chiens et à 90 % pour les chats. Mais ici encore, les chiffres sont en baisse, de 8 à 9 points.

Encore beaucoup de restes de table

En complément, des restes de table sont souvent (voire quotidiennement) donnés au chien (35 % des cas), plus rarement au chat (12 %). En ajoutant ceux qui en reçoivent occasionnellement, les proportions grimpent à 81 % des chiens et 55 % des chats.

Distribuer très régulièrement des friandises est également courant pour les chiens, qu'il s'agisse de produits du commerce (44 %), préparés « maison » (29 %) ou de viande crue (4,5 %). Les proportions de chats qui reçoivent fréquemment ces friandises sont moins importantes (25 %, 9 % et 2 %, respectivement). Mais beaucoup d'animaux en reçoivent occasionnellement, ce qui monte les proportions à 77 % des chiens et 61 % des chats, quelle que soit la catégorie de friandises offertes.

Le cru en vogue

De larges proportions d'animaux reçoivent également, au moins pour partie, une ration ménagère : 64 % des chiens et 46 % des chats. C'est bien davantage qu'auparavant, surtout concernant les chats pour qui les chiffres passés étaient de l'ordre de 10 % (et 30-50 % pour les chiens).

Mais surtout, et comme présumé, l'alimentation à base de produits crus (régime BARF ou assimilé) est en forte augmentation. Elle entre dans la ration des deux-tiers des chiens et de plus de la moitié des chats d'après cette étude (voir le tableau). Et elle est même exclusive pour 9 % des chiens et 6 % des chats.

L'exception australienne

Ce choix d'exclure toute cuisson est une tendance récente. Et c'est le mode d'alimentation sur lequel l'enquête révèle le plus de variations entre les pays (ces variations sont plus faibles pour les autres catégories d'alimentation). Ainsi, en Australie, 88 % des chiens et 84 % des chats sont nourris, au moins partiellement, avec des aliments crus (et plus de 15 % exclusivement). Ils sont 52 % et 31 %, respectivement, au Canada. Pour les autres pays, les proportions oscillent entre 62 et 70 % des chiens, et 41 à 49 % des chats. Plus généralement, « les pratiques alimentaires sont assez similaires au Canada, USA, Royaume-Uni et Nouvelle-Zélande », constatent les auteurs, « et l'Australie se détache », ce qui avait déjà été rapporté dans d'autres travaux. C'est d'ailleurs un vétérinaire australien qui est « fondateur du mouvement BARF dans les années 1990 ».

Le présent questionnaire avait été ouvert en septembre 2016 puis clôt fin janvier 2017. Il est possible que les tendances rapportées soient encore accentuées à ce jour.

À l'opposé d'ailleurs, les aliments végétariens (voire vegans) font partie de la ration de 22 % des chiens et 5 % des chats. Mais le compte-rendu d'enquête détaille peu ces types d'alimentation, ni leur évolution en 10 ans. Les auteurs rappellent au passage qu'un régime végétarien n'est pas adapté pour un chat, et peut éventuellement convenir à un chien, mais avec un suivi vétérinaire.

10 % d'achats chez le vétérinaire

Une question portait également sur le lieu d'achat des aliments. Les réponses se répartissent comme suit.

  • Au supermarché : 31 %
  • En animaleries : 53 %
  • En ligne : 30 %
  • Directement auprès du fabricant : 14 %
  • Chez le vétérinaire : 10 %

Les achats chez le vétérinaire sont bien plus importants en Nouvelle-Zélande (41 % des répondants), où les animaleries ne représentent que 32 %. Les britanniques au contraire sont 2,3 % à se fournir auprès de leur praticien, mais commandent sur Internet à 41 %.

En faibles proportions, certains propriétaires (sans doute adeptes du BARF), se fournissent chez l'éleveur ou le boucher, en abattoir, auprès de chasseurs…

Une bonne image qui s'effrite

Les auteurs de l'étude rappellent que depuis la commercialisation d'aliments industriels (boîtes et croquettes) pour chiens et chats, leur usage s'est rapidement démocratisé. Et outre leur aspect pratique pour le propriétaire, leur qualité nutritionnelle (recettes équilibrées et adaptées aux besoins alimentaires) est associée – en partie – à l'augmentation de la longévité de ces animaux.

Les cliniciens s'inquiètent alors de l'intérêt récent mais croissant des propriétaires pour cette alimentation « non conventionnelle », jugée plus « naturelle » parfois « plus appétente » par ses utilisateurs, mais souvent déséquilibrée (notamment en vitamines et minéraux). Ils observent aussi que la confiance dans l'industrie du petfood « décline », alors que le vétérinaire demeure « une source de conseils fiable » sur l'alimentation des animaux de compagnie. Et ils engagent donc les praticiens « à sensibiliser leurs clients pour les aider à couvrir les besoins alimentaires de leurs animaux ».