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20 mai 2020

La réduction manuelle d'une luxation traumatique du coude chez le chat est efficace mais à moins de 50 %

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Résultat du traitement de première intention de la luxation du coude chez les 32 chats inclus dans l'étude, selon le délai de prise en charge après sa survenue. D'après Williams et al., JSAP, 2020.
Résultat du traitement de première intention de la luxation du coude chez les 32 chats inclus dans l'étude, selon le délai de prise en charge après sa survenue. D'après Williams et al., JSAP, 2020.
 

Le coude est une articulation particulièrement stable chez le chat. Et les cas de luxation, assez peu fréquents, résultent généralement d'un traumatisme violent forçant sa rotation. Ils peuvent être compliqués d'autres lésions, notamment des fractures articulaires ou péri-articulaires. Lors de luxation simple, le traitement de première intention est généralement sa réduction manuelle. Une intervention chirurgicale n'est alors requise que si la stabilisation obtenue est insuffisante. La chirurgie est toutefois réalisée en première intention dans nombre de cas.

Afin de mieux connaître le pronostic de ces luxations, une étude rétrospective a été réalisée sur 32 cas. Ses résultats (publiés en libre accès dans le JSAP), montrent que l'évolution à terme est favorable quel que soit le premier traitement entrepris. Mais une chirurgie a été nécessaire en seconde intention chez une majorité des chats initialement traités par une réduction manuelle.

32 cas référés

Les cas ont été recrutés auprès de 6 centres de référés (5 au Royaume-Uni et 1 à Madrid en Espagne) sur une période de 12 ans (2005-2016). Il s'agissait de luxations simples (sans fracture ni lésion de l'articulation radio-ulnaire associée), confirmées par radiographie. Elles étaient toutes unilatérales (d'origine traumatique probable ou avérée), le plus souvent latérales (21 cas), plus rarement médiales (8) ou caudales (2).

Une réduction manuelle de la luxation a été réalisée en première intention chez un peu plus de la moitié des cas (18/32 soit 56 %). Les autres ont été traités directement par chirurgie (14/32, 44 %).

Aucune instabilité après chirurgie

Parmi les premiers, la stabilisation s'est révélée insuffisante pour 11 chats (61 %), présentant en effet une luxation ou une subluxation persistante ou récidivante : ces cas ont été traités par chirurgie en seconde intention. Aucun cas d'échec (re-luxation) n'a été observé chez les chats opérés, en première comme en seconde intention (25 au total).

Quelques chats (4) présentaient d'autres lésions concomitantes, comme la luxation d'une autre articulation (hanche), une fracture (mandibule, scapula), un épanchement pleural, etc. Ils ont tous été traités en première intention par réduction manuelle, efficace dans un cas mais insuffisante dans les trois autres. Ces observations ne permettent toutefois pas de déterminer l'éventuelle influence de ces atteintes multiples (fréquentes chez les chats accidentés) sur le pronostic du traitement, d'autant plus qu'aucun cas n'a été traité chirurgicalement en première intention ici.

Plus vite, plus stable

En revanche, l'efficacité de la réduction manuelle effectuée en première intention (éventuellement par le vétérinaire ayant ensuite référé le cas) est significativement influencée par le délai entre la survenue de la luxation et sa prise en charge. Le taux d'échec, nécessitant une chirurgie pour stabiliser définitivement l'articulation, évolue de 50 % à 67 % selon que l'animal est traité dans les 24h ou les 24-48h. Il atteint même 100 % après 48h, mais sur un seul cas (voir le tableau en illustration principale).

Les auteurs de l'étude proposent comme hypothèse d'explication la contraction musculaire qui s'installe avec le temps, rendant la réduction manuelle plus difficile et exerçant une traction supérieure sur l'articulation, ce qui altère sa stabilité.

Le poids des chats chez qui la réduction manuelle n'a pas suffi est également plus élevé que ceux chez qui elle a été efficace seule (4,0 kg vs 4,63 kg en médiane). Et 3 des 4 cas de luxation médiale traités ainsi ont nécessité une chirurgie de seconde intention : ils représentent ainsi 27 % des cas d'échec (et seulement 14 % des cas de réussite).

Dans tous les cas, le taux d'échec de la réduction manuelle reste élevé ; il est moindre chez le chien, selon les résultats d'autres travaux (29 % d'échec selon une étude). Les auteurs conseillent d'en informer le propriétaire et de réaliser l'intervention au plus tôt après le traumatisme, suivie d'une surveillance étroite afin de détecter les signes d'une instabilité.

Très bonne récupération à long terme

Lorsque possible (n=12), le suivi des cas a inclus le questionnement du propriétaire sur l'état de son chat et son évolution : mobilité de l'animal, fonctionnement de l'articulation, persistance d'une boiterie, traitement analgésique, évaluation de la douleur. L'évolution a également été évaluée à partir des informations du dossier médical de l'animal (n=24 dont 10 pour lesquels le propriétaire a pu être contacté).

Les résultats de l'étude de ces dossiers montrent une évolution globalement favorable à court terme (1,5 mois en médiane), avec quelques cas de légère boiterie persistante ou de limitation de l'amplitude de la flexion du coude traité, et un cas de boiterie sévère. Ensuite, les propriétaires rapportent une bonne voire une excellente récupération de leur animal à long terme (ils ont été contactés après 4 ans en médiane), mesurée par les aspects fonctionnels de l'articulation, le score de douleur, la qualité de vie du chat. Le pronostic de la lésion apparait ainsi très favorable, indépendamment du traitement effectué.