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11 juin 2019

Avoir un chien ou un chat n'est pas très "écolo"

par Agnès Faessel

Temps de lecture  5 min

Les calculs de l'empreinte écologique des animaux de compagnie se sont basés sur une alimentation sèche : des croquettes à base de poulet et céréales (cliché Pixabay).
Les calculs de l'empreinte écologique des animaux de compagnie se sont basés sur une alimentation sèche : des croquettes à base de poulet et céréales (cliché Pixabay).
 

Quel est l'impact environnemental des animaux de compagnie ? Celui de l'élevage bovin est devenu un sujet de préoccupation, voire de reproches par ses détracteurs, en lien notamment avec l'émission de méthane par les ruminants, ou l'eau consommée pour les cultures fourragères. Mais détenir un chien ou un chat ne serait-il pas également « polluant » ?  Une étude publiée en libre accès dans le dernier numéro de la revue BioScience l'a évalué, au travers de l'empreinte écologique alimentaire de ces animaux et de leur émission de gaz à effet de serres. Ses auteurs proposent également des pistes pour les réduire.

Une suralimentation génère un gaspillage des ressources

L'empreinte écologique est un outil d'évaluation de la durabilité environnementale. Elle chiffre les surfaces (terres arables, pâturages, zone de pêche, forêt, etc.) et l'eau nécessaires pour produire les ressources consommées par un individu ou une population et pour traiter les déchets générés. Elle s'exprime en hectares.

Les auteurs de l'étude observent que les besoins nutritionnels de l'animal et le type d'aliment distribué modifient sensiblement l'empreinte écologique de son alimentation : l'impact écologique d'un régime carnivore est ainsi supérieur à celui d'un régime herbivore. Un aliment industriel est également plus grand consommateur de ressources naturelles qu'une ration ménagère. Les auteurs constatent aussi une augmentation de l'obésité chez les animaux de compagnie, liée à une suralimentation et donc un potentiel gaspillage de ces ressources.

En effet, de précédents travaux de leur part s'étaient déjà intéressés à l'empreinte écologique alimentaire des chiens et chats en Chine et au Japon, essentiellement dépendante des paramètres suivants : le poids moyen des animaux dans ces territoires, le type d'aliment distribué (poulet et céréales étant la formulation retenue) et les quantités journalières consommées. Leurs résultats montrent que « les chiens (en particulier de grande taille) en Chine et au Japon consomment davantage de ressources alimentaires que leurs besoins réels, et présentent donc une empreinte écologique alimentaire relativement élevée ainsi que d'énormes émissions de gaz à effet de serres ». Ils confirment que « la suralimentation et le gaspillage alimentaire sont un phénomène courant chez les propriétaires d'animaux de compagnie (surtout de chiens) en Chine et au Japon ».

L'empreinte carbone d'un chat est voisine quel que soit le pays

Pour cette nouvelle étude, ils ont évalué l'émission de gaz à effet de serres et l'empreinte écologique de l'alimentation des chiens et chats domestiques dans trois pays : la Chine, le Japon et les Pays-Bas. Pour leurs calculs, ils ont considéré à nouveau le poids moyen des chiens et chats dans ces pays, leur alimentation par des croquettes à base de poulet et céréales (maïs, blé, riz), et par conséquent les surfaces de types cultures et pâturages nécessaires à la production des ces ingrédients. Le détail des formules utilisées est présenté dans une annexe à l'article.

Les résultats sont les suivants (voir tableau).

 

Les auteurs constatent ainsi que l'empreinte écologique alimentaire d'un chien est plus élevée en Chine et aux Pays-Bas qu'au Japon : environ deux fois plus. Mais lorsque multipliée par les effectifs canins dans leur pays respectifs, l'impact global apparaît plus faible aux Pays-Bas : 1,6 à 6,6 millions d'ha/an (contre 22,5 à 115 millions en Chine).

Pour l'espèce féline, les empreintes par individu sont assez voisines dans les trois pays. Mais la différence de taille des populations félines – très importante en Chine – entraîne un impact total beaucoup plus élevé dans ce pays (21 à 36,6 millions d'ha/an). Et logiquement, l'impact total des populations canines et félines chinoises atteint un niveau bien plus élevé que dans les deux autres pays considérés.

Des solutions plus ou moins réalistes

Ainsi, avoir un chien ou un chat n'est pas sans conséquence négative sur l'écologie : les nourrir consomme des ressources naturelles de la planète. Et il est présagé que cet impact environnemental va croître à l'avenir au plan mondial. Néanmoins, il n'est pas question ici de remettre en cause la place de ces animaux. Au contraire, les auteurs rappellent dès les premières lignes de leur publication que « les bénéfices que les animaux de compagnie apportent à leurs propriétaires sont nombreux, notamment une présence, une amélioration de la santé physique et mentale, un élargissement des relations sociales, et s'ajoutent à des effets positifs dans le développement des enfants et des adolescents ».

Ils proposent en revanche des orientations pour réduire l'impact écologique alimentaire de ces espèces, qui s'appuient essentiellement sur les recettes et le choix des ingrédients utilisés dans les aliments. Ils s'adressent ainsi à l'industrie du petfood, qui pourrait évoluer vers des produits et des procédés de fabrication favorisant le développement durable (chaînes d'approvisionnement « vertes », exploitation des énergies renouvelables, par exemple). La bonne digestibilité des aliments réduit également les déchets de la digestion.

Les protéines d'origine animale ont un impact environnemental élevé. Et d'un point de vue purement écologique, la meilleure solution pour réduire cet impact alimentaire serait d'adopter des régimes végétariens ou végans. Mais les auteurs reconnaissent que cette piste fait débats, puisque « ce n'est peut-être pas la meilleure voie possible pour maintenir la santé de l'animal (voire une impasse compte tenu de certains besoins alimentaires, comme ceux des chats, qui sont des carnivores stricts) »… L'idée est donc plutôt de choisir des sources protéiques de moindre empreinte écologique : de la volaille ou du poisson de préférence au bœuf, par exemple.

Lutter contre la suralimentation, observée dans tous les pays étudiés, est également une solution qui serait efficace pour réduire l'impact environnemental lié à l'alimentation des animaux de compagnie. Et sur ce point, le rôle des vétérinaires est évident.

Enfin, choisir des animaux de plus petit format (qui mangent donc moins), les partager à plusieurs (familles), ou préférer des animaux de compagnie « comestibles » comme les poules pondeuses figurent parmi les stratégies évoquées, reconnues toutefois comme « plus ou moins réalistes »…