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20 mars 2019

Le degré de réceptivité aux questions animales des jeunes belges et néerlandais, influencé par : le sexe, le fait d'avoir un animal de compagnie, de manger peu de viande et… d'avoir visité un zoo

par Vincent Dedet

Temps de lecture  5 min

Une enquête auprès de collégiens et lycéens belges et néerlandais montre que le fait d'avoir un animal de compagnie favorise une attitude positive vis-à-vis de l'ensemble des animaux et du respect de leur bien-être (cliché : Christian Damböck).
Une enquête auprès de collégiens et lycéens belges et néerlandais montre que le fait d'avoir un animal de compagnie favorise une attitude positive vis-à-vis de l'ensemble des animaux et du respect de leur bien-être (cliché : Christian Damböck).
 

Pour comprendre « l'attitude des jeunes générations vis-à-vis des animaux, en espérant que cela permette de d'appréhender la durabilité des sociétés du futur », des chercheurs de l'université de Maastricht (Pays-Bas) ont proposé un même questionnaire à des élèves de collège et lycée (12 à 21 ans) de trois établissements de Wallonie (Belgique) et un de Maastricht.

77 % avec un animal – 0,6 % de végétariens

Les auteurs ont obtenu 358 réponses exploitables ; les répondants étaient en majorité masculins (54,5 %) et en majorité des collégiens (77,7 %). La majorité (56 %) habitaient en zone rurale et une proportion encore plus importante (92 %) indiquaient disposer d'un jardin. Un peu moins du tiers (32 %) rapportaient ne visiter de zoo ou aquarium qu'une fois tous les deux ans, un peu plus du quart (28 %) une fois par an et 15 % jamais. Les trois quarts (77 %) avaient un animal de compagnie. Quant à la fréquence des repas de viande, elle était élevée dans la majorité des foyers : quotidienne dans 32 % des cas, 4 à 6 fois par semaine dans 43 % des cas, 2 à 3 fois par semaine dans 19 % des cas… La proportion se déclarant végétarien était faible (0,6 %), mais 5,6 % des répondants « mangeaient de la viande une fois par semaine ou moins ».

Avoir un animal…

Deux parties du questionnaire se rapportent à l'attitude à l'animal : une sur l'évaluation de l'acceptabilité de traitements d'animaux (AAS), développée à partir d'une évaluation de Likert (mesure psychométrique) où sur 20 questions, le répondant doit indiquer sa note de 1 à 5 (fortement d'accord : note de 1, fortement en désaccord : note 5). Plus la note AAS est élevée et plus le répondant est concerné par le respect de l'animal. La moyenne des répondants était de 158,6 pour un maximum possible de 215. Mais la note maximale obtenue était de 206. L'analyse statistique montre que l'âge, le régime carné comme le fait de résider en ville ne sont pas des facteurs qui modifient le niveau d'acceptabilité d'un moindre bien-être animal. Elle identifie en revanche plusieurs facteurs l'influençant :

  • Les élèves ayant un animal de compagnie avaient une note moyenne de 5,4 points supérieure aux autres (p<0,05). Lorsqu'il s'agissait d'un chien, l'effet était supérieur (+6,3 points) mais pas significativement différent. L'acceptabilité est moindre pour l'expérimentation animale, le fait de mettre des animaux à mort ou de priver les animaux de bien-être…
  • Le fait d'être belge indiquait une moindre acceptabilité des traitements aux animaux (+9,8 points, p<0,0001 par rapport aux élèves néerlandais). Seul le fait de « blesser les animaux pour des problèmes sociétaux » recevait une note comparable.
  • Le fait d'être une élève influence aussi dans le même sens (+8,5 points, p<0,0001 par rapport aux élèves masculins). Pour deux thématiques il n'y a pas de différence d'acceptabilité entre les sexes : les modifications génétiques et la « destruction de l'intégrité physique » de l'animal.
  • Les élèves déclarant ne jamais visiter de zoo ou d'aquarium avaient une note AIS totale plus faible que les autres (p=0,047).
  • Enfin, le fait de manger de la viande moins d'une fois par semaine est associé à une note de 3,3 points plus élevée, mais la différence n'est pas significative.

… et/ou manger peu de viande

La troisième partie du questionnaire reposait sur une autre évaluation, l'échelle du problème animal (AIS), qui comportait 43 questions en 8 thèmes, dont la mise à mort de l'animal, les modifications génétiques ou le fait d'endommager leur intégrité physique, mais aussi la chasse. Plus la note AIS est élevée et plus le répondant à une attitude positive vis-à-vis de l'animal. La note maximale théorique est de 100 ; un répondant avait 99 et la moyenne des répondants était à 68. Les propositions qui ont obtenu la note la plus élevée sont relatives à la chasse : « l'abattage des baleines et des dauphins doit être immédiatement stoppée même si cela signifie que des gens vont perdre leur emploi », ou encore « il est moralement inacceptable de chasser les animaux sauvages juste pour le sport ». Les facteurs trouvés comme influençant l'attitude positive aux animaux sont les mêmes :

  • le fait de posséder un animal de compagnie (+5,6 points) ;
  • la nationalité (+5,1 pour les Belges) ;
  • le fait d'être une élève (7,9 points de plus, p<0,0001) ;
  • le fait de ne jamais visiter un zoo/aquarium était aussi lié à une note moins élevée (p<0,0001) ;
  • manger de la viande moins souvent (1 fois par semaine au plus) est associé à une note nettement supérieure (+ 7,9 points, p=0,004).

Parmi les nouveaux facteurs : le fait de vivre avec un seul parent (p=0,03), que les auteurs rapprochent de l'observation par ailleurs que les parents célibataires ont un niveau d'anthropomorphisme supérieur à ceux vivant en couples. L'enfant « adopterait alors une attitude similaire » à celle de son parent.

Promouvoir l'empathie

Le fait que les jeunes filles/femmes aient une note plus élevées que les garçons/hommes sur les deux grilles d'évaluation n'est pas une surprise pour les auteurs, mais ils relèvent qu'il n'y a plus de différence entre sexes sur les interventions « visant à augmenter l'apparence ou la productivité » des animaux. Le lien entre le fait de posséder un animal de compagnie et d'avoir une attitude positive aux animaux en général n'est pas nouveau non plus, mais la jeunesse des personnes interrogées ici est une nouveauté. Sur le lien avec la consommation de viandes, les auteurs « retrouvent les préoccupations évoquées dans les études sur les végétariens », mais seuls deux élèves de l'enquête se disaient tels. Toutefois, « plusieurs précisaient qu'ils souhaitaient l'être, mais que leurs parents ne l'autorisaient pas ». Pour les différences entre les deux nationalités, ils citent une étude sur l'acceptabilité de l'expérimentation animale où cette même différence apparaissait. Pour ce qui est de la fréquentation des zoos et aquariums, les auteurs relèvent qu'au-delà de leur rôle éducatif, divertissant et de conservation, « ces établissements semblent avoir un rôle sociétal d'éveil à la conservation animale », pourvu « que l'expérience puisse se poursuivre par des discussions et de la réflexion ». Mais les auteurs précisent souhaiter « étudier plus en détail les causes des corrélations observées », et leur développement au cours de la vie de l'enfant. Ils espèrent « pouvoir ainsi mieux structurer les expériences qui promeuvent l'empathie et les préoccupations pour toutes les formes de vie ».