titre_lefil
logo_elanco

19 octobre 2018

Vasculopathie cutanée et rénale glomérulaire : mieux cernée, toujours active, et un traitement d'urgence

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Initialement signalée dans la région anglaise de New Forest, en 2012, la vasculopathie cutanée et rénale glomérulaire a été progressivement reconnue par les vétérinaires dans une zone géographique d'ampleur croissante et couvre à présent l'Angleterre et le pays de Galles (source : vets4pets.com/stop-alabama-rot).
Initialement signalée dans la région anglaise de New Forest, en 2012, la vasculopathie cutanée et rénale glomérulaire a été progressivement reconnue par les vétérinaires dans une zone géographique d'ampleur croissante et couvre à présent l'Angleterre et le pays de Galles (source : vets4pets.com/stop-alabama-rot).
 

Aux USA, son nom est Alabama rot et elle n'affecte que les greyhound. Apparue en 2012 outre-Manche, sur des chiens de diverses races (ou croisés) et selon une géographie qui va s'étendant (voir l'illustration principale), la « vasculopathie cutanée et rénale glomérulaire » (VCRG) vient de faire l'objet des premières publications référencées. La description clinique de cette affection à taux de létalité élevé — une fois que l'insuffisance rénale est en place — figure dans LeFil du 25 mars 2015. La première perspective thérapeutique (faiblement) positive est parue pendant l'été.

PEX

Le recours à l'échange de plasma (PEX) a été pratiqué sur 6 chiens en stade très avancé ; deux ont survécu. Il s'agissait d'évaluer cette intervention, utilisée en médecine humaine sur les cas graves de lupus ou de syndrome hémolytique et urémique. Les 6 cas présentaient des lésions cutanées depuis au moins 6 jours au moment de l'admission ; ils avaient une température normale mais étaient oliguriques (n=3) ou anuriques, avec 4 en grade III, un en grande IV et un en grade V (IRIS). Un seul a été perfusé, tous ont reçu des antibiotiques à l'admission. La décision de PEX a été prise dans les 24 à 48 h suivant leur hospitalisation.

  • Trois chiens ont eu un cycle de PEX, accompagnée pour deux d'entre eux d'une hémodiafiltration (azotémie et hyperkaliémie) ;
  • Les trois autres chiens ont eu deux cycles de PEX sur 48 à 72 h.

La filtration a été réalisée en moyenne sur 1,8 l et sur 3 h, et le remplacement était fait à partir de plasma congelé dans une solution isotonique de NaCl. Chaque plasma avait été validé pour le groupe sanguin pour chaque patient. Les effets secondaires étaient « hypocalcémie, hypothermie, tachycardie sinusale et hypotension ». Les non survivants ont été euthanasiés après 5 jours d'hospitalisation du fait de l'absence d'amélioration. Les autres sont restés hospitalisés de 10 à 23 jours. Et les auteurs préviennent qu'il ne faut pas considérer ce résultats « comme un succès de ce traitement », mais plutôt comme « une incitation à tenter » l'intervention.

Chiens de meute et de chasse

Les deux autres publications sont deux volets d'une large enquête épidémiologique sur la VCRG. L'un explore les facteurs de risque intrinsèques aux chiens à VCRG (n=101) survenus jusqu'en mai 2017), rattachés aux 446 000 dossiers présents dans la base VetCompass. L'âge des sujets n'est pas retrouvé comme facteur de risque. L'analyse statistique (multivariée) montre que deux types de races de chiens sont particulièrement à risque, par rapport aux terriers pris en référence :

  • les chiens de meute (hounds), qui ont un sur-risque de  x10,7 (p<0,001), 
  • les chiens de chasse (retrievers, setters, pointers, épagneuls…), qui ont un sur-risque de  x9,7 (p<0,001),
  • les bergers sont également plus à risque, mais de manière moins prononcée (x 3,5, p=0,046).

Sur ces aspects, les auteurs soulignent qu'un lien avec une activité en extérieur est évident pour cette pathologie, même si l'élément causal reste à identifier. Ces deux groupes rassemblent d'ailleurs 60 % des cas, et « aucune race toy n'a été trouvée concernée ».

Retrievers et vizsla

A l'échelle de la race, la comparaison a été réalisée par rapport aux sujets croisés. Les moins chanceux sont le retriever à poil plat (risque x 84,5), le vizsla et le terrier de Manchester (x 41) ou encore le saluki (x 27,5), le whippet (x 22,5), l'épagneul anglais (x 11,4) et le colley (x 10,9). Là encore, à la différence des USA, les greyhound ne sont pas à sur-risque. De même, le sexe ratio est nettement modifié : par rapport aux mâles (référence), les femelles ont 51 % de risque en plus (p=0,042) et les mâles castrés un risque x 3,4 (p<0,001).

Cas groupés et fôrêts

La seconde publication épidémiologique tente d'identifier des facteurs exogènes aux chiens, à partir de 107 cas renseignés. En cela et malgré l'intensité du travail (recherche de facteurs agro-écologiques, environnementaux), elle ne réserve pas de surprises :

  • bien que pouvant se produire toute l'année, la VCRG a une occurrence saisonnière : 92 % des cas ont été identifiés entre novembre et mai ;
  • il y avait bien des cas groupés (cluster) autour de New Forest en Angleterre (p=0,004) à partir de 2013 et jusqu'en 2017 (mais pas en 2016) et une seconde zone de cluster, plus limitée, est apparue en 2014 à proximité de Manchester (p=0,087), qui a elle aussi persisté ;
  • et effectivement, le nombre de régions concernés n'a cessé d'augmenter entre 2012 et 2017, « année la plus diffuse » pour ces cas, mais il est impossible d'évaluer la part d'une réelle dispersion de l'affection de celle de la vigilance accrue des propriétaires et des praticiens (il y a même eu des émissions de TV sur le sujet) ;
  • les cas ont tendance à se produire après une promenade dans les bois ou dans les plaines de bruyères, lors d'hivers ou de printemps chauds et humides (au-dessus des moyennes annuelles maximales) ou d'automnes chauds, et dans des zones faiblement peuplées en bovins et ovins.

Ces données ne renseignent pas plus sur la cause de la VCRG, mais « sont des indications de vigilance pour les propriétaires à rechercher précocement des signes de l'affection », par exemple au retour de promenades en zones/météo à risque.