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17 octobre 2018

En 2016, la consommation en antibiotiques des productions animales françaises a piétiné

par Vincent Dedet

Temps de lecture  4 min

Le rapport ESVAC 2016, publié ce 15 octobre, calcule l'utilisation moyenne par pays des antibiotiques par unité de biomasse de productions animales.
Le rapport ESVAC 2016, publié ce 15 octobre, calcule l'utilisation moyenne par pays des antibiotiques par unité de biomasse de productions animales.
 

En 2016, il n'y a pas eu de surprise : la France a conservé son 18e rang, sur les 30 pays européens partageant leurs données sur les ventes d'antibiotiques destinés aux productions animales au sein du projet ESVAC (European Surveillance of Veterinary Antimicrobials Consumption). Comme les précédentes, cette 8e édition annuelle d'ESVAC, publiée le 15 octobre, utilise comme unité les volumes de ventes (en mg) ramenés à une unité arbitraire de biomasse (production animales, chevaux inclus : la PCU).

+2,4 % en 2016

Ce rapport sur l'année 2016 pourrait être sous le signe de la continuité : le trio de tête ne change pas ; Chypre, l'Espagne et l'Italie représentent ensemble 49 % des ventes des 30 pays européens inclus dans ESVAC (en volume). Chypre, qui consomme un faible volume d'antibiotiques, mais en grandes quantités au regard de son cheptel, est en progression (+4,4 %), alors que l'Espagne et l'Italie ont significativement réduit en un an leur exposition des animaux de rente (-9,8 et -8,4 %, respectivement). Comme les autres années, les deux extrêmes de la consommations sont la Norvège (2,9 mg/PCU) et Chypre (à 453,4 mg/PCU). La moyenne des 30 pays européens est à 124,6 mg/PCU et la médiane à 57,0 mg/PCU. La France reste à sa 18e place des pays les plus économes, à 71,9 mg/PCU, en légère augmentation par rapport à 2015 (+2,4 %), avec comme motifs de satisfaction d'être nettement en-dessous de la moyenne des 30 pays (voir le graphique ci-dessous), et le fait que cette progression est loin de celles observées pour le Portugal (+ 55 % en un an) et la Bulgarie (+27 %). Mais l'Allemagne (-8,9 %) et la Roumanie (-15,2 %) ayant nettement poursuivi la réduction de leurs usages, ces pays se rapprochent.

Classement des 30 pays européens pour leurs ventes d'antibiotiques en productions animales en 2016 (d'après ESVAC).

 

En tête

Le classement des 9 pays les plus économes en antibiotiques n'a pas non plus été bousculé en 2016. Seul le Royaume-Uni gagne des places (de 14e à 10e), grâce à la meilleure réduction des 30 pays ESVAC (-20,6 % en un an). Comme pour les autres années, malgré de nettes variations entre pays, les tétracyclines, pénicillines et sulfamides (potentialisés) représentent ensemble plus de deux tiers des ventes (70 % en 2016). Les tétracyclines continuent de dominer (40,3 mg/PCU sur les 124,6 mg/PCU au total), devant les pénicillines (26 % et 32,1 mg/PCU) et les sulfamides (12 % et 14,4 mg/PCU). Le recours aux prélémanges médicameuteux va de nul (Allemagne, Lettonie, Estonie, Islande) à majeur (près de 80 % à Chypre, près de 70 % en Espagne, près de 40 % en France). Selon les pays, les poudres orales (Autriche) ou les solutions orales (Pays-Bas, Pologne) dominent. La quasi-totalité des traitements individuels (9,9 % du total) sont réalisés par injection (9,0 %), le reste se partageant en traitements intramammaires (0,6 %) et pâtes orales, bolus, oblets… (0,3 %).

Critiques

Pour les antibiotiques critiques, les ventes représentent 15,9 % du total, avec 0,2 % pour les céphalosporines de 3e et 4e générations (C3/C4G), 2,6 % pour les fluoroquinolones, 5,1 % pour la colistine et 7,0 % pour les macrolides en moyenne, mais avec de très fortes variations (voir le graphique ci-dessous). Quatre pays dominent la consommation de fluoroquinolones : Espagne, Portugal, Pologne et Bulgarie (en Pologne, l'usage des fluoroquinolones était encore en croissance en 2016). C'est l'Allemagne qui, en 2016, a la plus forte proportion d'antibiotiques critiques au regard de son utilisation totale (13 %), principalement en lien avec la colistine. Mais le premier pays consommateur de colistine en 2016 restait tout de même l'Espagne. Enfin, à l'échelon des 30 pays européens, 11,6 % des C3/C4G vendues en 2016 étaient des préparations intramammaires

Comparaison de la consommation d'antibiotiques critiques dans les 30 pays du projet ESVAC en 2016, par classe d'antibiotiques (ESVAC, 2018).

 

25 pays

Les rapporteurs mettent en avant les 25 pays qui ont fourni annuellement leurs données de 2011 à 2016 : dans ces pays, les usages ont diminué de 20,1 % sur la période, de 162 à 129,4 mg/PCU en moyenne. Les ventes d'antibiotiques critiques ont également nettement reculé sur la période : -15,4 % pour les C3/C4G, et -39,9 % pour la colistine. Trois classes d'antibiotiques n'ont pas été réduite à cette échelle : les phénicolés, les aminoglycosides et les fluoroquinolones (le rapport fournit les évolutions détaillées pour chaque classe d'antibiotiques, sous forme de données et de graphique). Enfin, la majorité (mais non la totalité) de ces 25 pays ont réduit les usages d'antibiotiques qur la période.

Evolution 2011-2016 des ventes d'antibiotiques critiques en productions animales (en mg/PCU) dans les 25 pays européens ayant transmis leurs données dès le début du projet (ESVAC, 2018).

 

Comprimés : France n° 2

Dans la collecte des données, les rapporteurs expliquent disposer des chiffres de ventes de comprimés pour animaux de compagnie. Ils présentent ces éléments chiffrés (73,3 t en 2016 et 0,9 % du total des ventes antibiotiques), tout en précisant que cela ne saurait refléter les usages réels puisqu'une partie au moins de ces comprimés peut être utilisée en productions animales (à fourrure), mais aussi que les médicaments d'humaine ne sont pas comptabilisés. Trois pays représentent plus de la moitié de es volumes : Royaume-Uni (16,4 t), France (15,5 t), et Italie (10,1 t). Toutefois, du fait du faible développement des productions animales de certains pays, les comprimés peuvent représenter une part significative des antibiotiques vétérinaires utilisés : c'est le cas pour l'Islande (17,3 % du total), la Finlande (13,5 %), la Norvège (8,2 %), la Suède (8,1 %), la Slovénie (7,7 %), le Luxembourg (6,2 %) et le Royaume-Uni (4,8 %). Les comprimés le plus souvent vendus sont à base de pénicillines, « principalement associées à un inhibiteur de ß-lactamase ».

Ventes de comprimés par pays ESVAC et par famille d'antibiotiques en 2016 dans les 30 pays d'ESVAC.