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8 août 2019

Pour éradiquer la BVD, le dépistage et l'élimination des IPI deviennent obligatoires avec ou sans vaccination

par Eric Vandaële

Temps de lecture  7 min

Ces logos sont utilisés par les GDS Bretagne, Grand-Est et Rhône-Alpes pour communiquer sur le plan d'éradication de la BVD.
Ces logos sont utilisés par les GDS Bretagne, Grand-Est et Rhône-Alpes pour communiquer sur le plan d'éradication de la BVD.
 

C'est la première étape du plan français d'éradication de la maladie des muqueuses (BVD). En pleines vacances, le Journal officiel du 1er août 2019 a publié un arrêté signé la veille qui, pour la première fois, met en œuvre un plan obligatoire d'éradication de la BVD en France.

La maladie des muqueuses chez les bovins est déjà un danger sanitaire de 2nde catégorie. Depuis plusieurs années, de nombreux groupements de défense sanitaires (GDS) ont déjà développé des plans de maîtrise de la BVD. Depuis 2011, un arrêté permet à l'Acersa (Association loi 1901 pour la certification en santé animale) de concourir à la certification officielle des bovins non-IPI (non infectés permanents immunotolérants).

D'autres pays européens se sont aussi engagés dans des plans d'éradication de la BVD comme l'Allemagne en 2012, la Belgique en 2014, le Luxembourg en 2015 et l'Irlande en 2014. Tandis que l'Autriche, le Danemark, la Suède, la Finlande, la Norvège et la Suisse ont finalisé l'éradication de la BVD de leurs territoires.

Première étape du programme d'éradication obligatoire

Le nouvel arrêté est la « première étape du programme d'éradication de la BVD » obligatoire en France continentale. Il repose sur :

  1. La surveillance des troupeaux vis-à-vis de la BVD, à travers des analyses de laboratoire afin d'identifier et d'assainir les troupeaux infectés (ou susceptibles de l'être) ;
  2. L'élimination des animaux IPI (infectés permanent immunotolérants) ;
  3. Des interdictions de déplacements des IPI et des animaux infectés ou susceptibles de l'être.

Les frais de cette nouvelle police sanitaire obligatoire contre la BVD, notamment le dépistage et l'élimination des IPI sont à la charge des éleveurs bovins.

Une application immédiate sauf…

Cet arrêté s'applique dès maintenant aux éleveurs bovins de la France continentale, la Corse et l'outre-mer étant ainsi exclus du champ d'application. Toutefois, le préfet de ces territoires peut demander l'application de ce plan d'éradication.

Si une situation épidémiologique le justifie, sur proposition du GDS, le préfet d'un département peut surseoir au dépistage BVD obligatoire jusqu'au 31 juillet 2020 au plus tard.

Les troupeaux de bovins d'engraissement destinés uniquement à la boucherie et entretenus dans des bâtiments dédiés sans accès à des pâtures dérogent à l'obligation de dépistage BVD prévue par ce plan.

Une instruction de la DGAL devrait paraître en septembre avec le cahier des charges BVD pour la mise en œuvre de cette surveillance, les modalités de confirmation et d'assainissement des foyers et de contrôles des mouvements des bovins.

Les GDS sont les maîtres d'œuvre

Le préfet confie la maîtrise d'œuvre des mesures de prévention et de surveillance au GDS (l'organisme à vocation sanitaire reconnu sur le département).

Les vétérinaires sanitaires réalisent les prélèvements sanguins pour le dépistage.

Les laboratoires d'analyses agréés réalisent les analyses selon les méthodes du laboratoire national de référence. Les résultats « non négatifs » sont transmis « sans délai » au GDS et au vétérinaire sanitaire.

Un dépistage sérologique ou virologique selon les cas

La recherche des bovins infectés par le virus BVD est obligatoire. Deux modalités sont envisageables.

1. Pour les élevages déjà assainis, la sérologie sur lait ou sérum de mélange

Dans les élevages déjà assainis et n'ayant pas recours à la vaccination, notamment en Bretagne, la préférence ira sans doute à une surveillance sérologique,

  • Soit, pour les exploitations laitières, sur lait de mélange avec une analyse tous les six mois,
  • Soit, pour les élevages allaitants, sur des sérums de mélange une fois par an. Les prélèvements de sang sont alors réalisés par le vétérinaire sanitaire sur un échantillon d'animaux représentatifs, présents depuis au moins trois mois, et non marqués sérologiquement, donc non vaccinés.

Dans ce cas, une analyse sérologique positive conduit à la recherche et l'élimination des IPI (infectés permanents immunotolérants).

2. Sinon, les veaux IPI dépistés à la pose des boucles d'identification

Si les élevages ne sont pas assainis, il sera sans doute préférable d'opter pour une surveillance basée sur la recherche systématique des IPI sur tous les veaux à la naissance lors d'un prélèvement auriculaire réalisé au moment de la pose de la boucle d'identification.

Ce dépistage virologique semble compatible avec une vaccination des mères visant à éviter la naissance de veaux IPI.

Quelles définitions pour des bovins ou des troupeaux infectés…

Selon les résultats du dépistage, les différents statuts pour un bovin ou un troupeau sont les suivants.

  • Bovin infecté : avec un résultat positif au diagnostic du virus BVD. Même si l'arrêté ne le précise pas, il s'agit sans doute d'un résultat positif à une analyse virologique et non sérologique.
  • Bovin IPI : bovin infecté avec un résultat confirmé positif (ou « non infirmé ») au diagnostic direct du virus BVD.
  • Bovin susceptible d'être infecté : « en contact avec un animal infecté ou détenu dans un troupeau suspect d'être infecté ».
  • Troupeau infecté BVD : avec au moins un bovin IPI ou si une circulation du virus BVD est mise en évidence.
  • Troupeau suspect d'être infecté BVD : « en lien épidémiologique avec un troupeau infecté ou un bovin infecté ».

Il n'est pas prévu de statut officiel pour le bovin ou le troupeau indemne. En cas de non-respect de cet arrêté, notamment en cas de refus de l'éleveur, de procéder au dépistage obligatoire, le troupeau est dit « non conforme ». La sortie des bovins du troupeau est interdite sauf vers un abattoir.

Que faire dans les troupeaux suspects ? Confirmer ou infirmer l'infection

Dans les troupeaux suspects de BVD, donc en lien épidémiologique avec un troupeau ou un bovin infecté), le GDS réalise une enquête épidémiologique et un dépistage complémentaire sur les bovins « à risque » dans le troupeau pour confirmer ou infirmer l'infection du troupeau. Si aucune mesure complémentaire n'est réalisée dans les quatre mois, le troupeau est considéré comme infecté.

La sortie des bovins d'un troupeau suspect nécessite un dépistage virologique favorable dans les quinze jours précédant la sortie pour les animaux.

Dans les troupeaux infectés, les IPI sont éliminés et les transferts sont interdits

Dans les troupeaux infectés de BVD (avec un bovin IPI ou une circulation virale mise en évidence), un assainissement du troupeau est obligatoire par l'élimination des IPI.

  • Le dépistage virologique de tous les bovins du troupeau par une recherche directe du virus BVD est obligatoire dans le mois suivant la notification de l'infection.
  • Les IPI détectés sont éliminés rapidement, dans un délai maximal de quinze jours suivant la confirmation, soit par leur envoi vers un abattoir soit par leur euthanasie (et équarrissage).
  • Pendant un an après l'élimination du dernier IPI, le dépistage des veaux IPI sur toutes les naissances reste obligatoire.
  • La sortie d'un bovin d'un troupeau infecté de BVD est interdite vers un autre élevage tant que l'ensemble des animaux n'a pas présenté un résultat négatif à une recherche directe du virus et que le dernier animal porteur de virus n'a pas été éliminé. Puis, dans le mois suivant l'élimination du dernier animal porteur de virus, la sortie d'un bovin nécessite un nouveau dépistage virologique (négatif) réalisé dans les quinze jours précédant la sortie.
  • La sortie des animaux IPI n'est donc autorisée que pour un transport direct vers un abattoir.

Il est aussi interdit d'introduire un bovin reconnu IPI ou infecté dans une exploitation ou de mélanger des bovins de statut différent, y compris lors du transport ou à destination de tout rassemblement. Sinon, tous les bovins qui sont entrés en contact avec un animal IPI ou infecté sont aussi considérés comme infectés.

La vaccination ni interdite, ni obligatoire, parfois utile…

Selon l'article 11 de cet arrêté, la vaccination contre la BVD « peut être mise en œuvre », dans « les troupeaux infectés, les troupeaux en lien épidémiologique avec un troupeau infecté ou dans les zones où le virus circule selon une analyse de risque du GDS ». Cette formulation laisse entendre que la vaccination est utile mais pas obligatoire dans les troupeaux infectés ou exposés à un risque d'infection.

L'arrêté n'interdit pas la vaccination dans les autres cas. Néanmoins, elle apparaît peu compatible dans les élevages assainis avec un dépistage moins contraignant basé sur la sérologie.

Si l'éleveur décide de vacciner, l'éleveur transmet au GDS, dans le mois suivant la vaccination une attestation de vaccination comprenant le nom du vaccin, la date de vaccination et le numéro d'identification des bovins vaccinés. Il n'est donc pas exigé que la vaccination soit réalisée ou certifiée par un vétérinaire.