titre_lefil
logo_elanco

12 août 2019

Lyon : avec 14 % de chats du groupe B, le risque d'incompatibilité lors de transfusion sanguine dépasse 24 %

par Agnès Faessel

Temps de lecture  4 min

Prévalence des groupes sanguins A, B et AB chez les chats tout venant (sans pédigrée : a, à gauche) ou les chats de race (disposant d'un pédigrée : b, à droite). Source Nectoux et al., JFMS Open Reports, 2019.
Prévalence des groupes sanguins A, B et AB chez les chats tout venant (sans pédigrée : a, à gauche) ou les chats de race (disposant d'un pédigrée : b, à droite). Source Nectoux et al., JFMS Open Reports, 2019.
 

Ce sont surtout les anticorps anti-A présents chez les chats du groupe B, plutôt que les anti-B chez les chats du groupe A, qui sont responsables de réactions hémolytiques graves, lors d'une transfusion de sang (donneur A ou AB pour un receveur B) ou après la consommation de colostrum (chez le chaton A ou AB né d'une mère B).

Le risque de réaction dépend de la répartition de ces anticorps anti-A et anti-B, « donc de la prévalence des groupes sanguins dans une région donnée », expliquent les auteurs d'une nouvelle étude, dont le premier objectif est d'actualiser ces prévalences en France, en particulier en région lyonnaise. En effet, même si le groupe A est le plus fréquent dans le monde, « la répartition des groupes sanguins varie beaucoup selon les pays », et même selon les régions dans un pays.

L'étude a été réalisée au SIAMU, le centre d'urgence et de soins intensifs du CHUV de VetAgro Sup à Lyon. Ses résultats sont publiés en libre accès dans le Journal of Feline Medicine and Surgery Open Reports (article publié en ligne le 22 juillet).

Plus de 350 chats sur une période de 6 ans

L'étude, rétrospective, a inclus les chats reçus au SIAMU entre janvier 2011 et janvier 2017 (soit sur une période de 6 ans) et pour lesquels un typage sanguin a été réalisé, dans le cadre des soins nécessaires ou pour un don de sang. Elle porte ainsi sur 357 chats :

  • 320 « sans pédigrée » : 170 mâles et 150 femelles ;
  • 37 chats de race avec pédigrée : 21 mâles et 16 femelles.

14 % de B, sans influence du sexe

Le résultat des typages effectués établit ainsi les prévalences suivantes :

  • Groupe A : 301 chats soit 84,3 % ;
  • Groupe B : 50 chats soit 14,0 % ;
  • Groupe AB : 6 chats soit 1,7 %.

Ces chiffres sont assez voisins parmi les chats sans pédigrée : 83,7 %, 14,4 % et 1,9 %, respectivement.

Chez les chats de race, en revanche, la prévalence du groupe A est un peu plus élevée, atteignant presque 90 % (33/37). Celle du groupe B est donc relativement plus faible, à moins de 11 % (4/37). Et aucun animal de groupe AB n'est identifié (voir graphiques en illustration principale). Toutefois, la répartition n'est pas trouvée significativement différente selon la race, ni selon le sexe.

1,7 % aux USA mais 36 % en Australie

Selon les données de la littérature, cette prévalence du groupe B en France (région de Lyon) dépasse celle de la plupart des autres pays, à l'exception de plusieurs pays anglo-saxons (30,5 % au Royaume-Uni, 36 % en Australie), de la Turquie (25 %) ou de la Grèce (20 %). Elle est particulièrement faible aux États-Unis (1,7 %), au Danemark ou au sud du Portugal (environ 2 %), et reste très inférieure dans d'autres nations d'Europe comme l'Espagne et l'Allemagne (5 %) ou encore l'Italie (7 %).

1 chance sur 8 d'incompatibilité majeure

Le risque transfusionnel le plus grave, d'une hémolyse souvent mortelle, correspond au risque de transfuser du sang d'un donneur de groupe A ou AB à un receveur de groupe B. C'est donc le produit du pourcentage de chats du groupe B par celui de chats des autres groupes (% de B x % de A+AB).

Ici, chez les chats sans pédigrée (pour éviter l'influence des cas particuliers liés à certaines races), ce risque est ainsi de 12,3 %, soit un peu plus d'un cas sur 8. Il apparaît supérieur aux résultats d'une autre étude récente en France, l'estimant à 9 %.

Un risque de moindre gravité (réduction de la longévité des érythrocytes) est associé à la transfusion de sang entre un donneur du groupe B et un receveur du groupe A. Son calcul (% de A x % de B) aboutit à évaluer le risque à 12 %, toujours chez les chats sans pédigrée.

Au total, le risque d'incompatibilité entre donneur et receveur atteint presqu'un quart des cas, avec 24,3 % (la somme des deux risques). Il est très inférieur dans nombre d'autres pays comme l'Allemagne (10 %), le Portugal sud (4 %), les USA (3,4 %)… Selon les auteurs, qui sont à l'origine de ces calculs suivant la même méthodologie que la leur, à partir des données disponibles localement, la France (Lyon) est ainsi le 6ème pays où le risque est le plus élevé, après l'Australie (Sydney, 45,3 %), le Royaume-Uni (région sud-est, 41,8 %), la Turquie (36,5 %), la Grèce (32,1 %) et l'Irlande (Dublin, 24,9 %).

Un typage systématique est recommandé

Enfin, à partir de leurs chiffres, les auteurs ont aussi estimé le risque d'isoérythrolyse néonatale chez le chaton (selon une formule plus complexe). Leurs calculs aboutissent à un risque de 12,3 %.

Dans le cadre de la reproduction féline, comme au préalable d'une transfusion de sang, un typage sanguin (a minima un test cross-match) apparaît ainsi indispensable à systématiser en pratique.