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19 mars 2019

Les thermomètres auriculaires sous-estiment la température corporelle d'1°C chez le furet

par Agnès Faessel

Temps de lecture  3 min

Le même opérateur a effectué les séries de mesures de température rectale et auriculaire chez les 27 furets, un assistant réalisant la contention (cliché Pixabay).
Le même opérateur a effectué les séries de mesures de température rectale et auriculaire chez les 27 furets, un assistant réalisant la contention (cliché Pixabay).
 

En alternative au thermomètre rectal, le thermomètre auriculaire peut-il être utilisé chez le furet ? La réponse apparaît mitigée, selon une étude prospective comparant les résultats des mesures effectuées avec les deux types d'appareils. La température auriculaire n'est pas équivalente à la température rectale, affichant des valeurs significativement inférieures. Cette variation semble toutefois suffisamment stable, et les mesures répétables, pour y recourir potentiellement en pratique, en ajustant la valeur mesurée.

Technique moins invasive donc moins stressante

L'étude en question, publiée en libre accès dans le dernier numéro du Journal of Exotic Pet Medicine (janvier 2019), a été réalisée par des vétérinaires de l'université nationale autonome du Mexique (Mexico City), auprès de 27 furets adultes en bon état de santé.

L'objectif était d'évaluer si dans cette espèce, la prise de température à l'oreille – rapide et mieux tolérée que l'utilisation d'un thermomètre rectal – était fiable pour mesurer la température corporelle. Le stress induit par la mesure de la température rectale entraîne en effet des hyperthermies passagères et un risque de lésions (si l'animal se débat). Dans d'autres espèces, notamment le chinchilla, le cochon d'Inde et le lapin, il a été montré que la température mesurée avec un thermomètre auriculaire est inférieure à celle mesurée avec un thermomètre rectal. Mais selon les auteurs, il n'y avait pas eu d'étude spécifique réalisée chez le furet.

Mesures successives, dans chaque oreille

Sur chaque animal, présenté en routine en consultation de médecine préventive, la température a donc été mesurée dans le même ordre avec 5 appareils différents :

  • Un premier thermomètre auriculaire pédiatrique,
  • Un second d'une autre marque,
  • Un thermomètre auriculaire vétérinaire (Pet Temp° pour animaux de compagnie),
  • Un thermomètre rectal digital,
  • Un thermomètre rectal au mercure (considéré comme l'outil de référence pour établir la température corporelle).

Pour les instruments auriculaires, deux mesures étaient successivement effectuées : dans l'oreille gauche puis droite.

Température inférieure de -1°C environ

Les résultats montrent une différence significative entre les températures mesurées avec les 2 types de thermomètres, les températures auriculaires étant inférieures aux températures rectales, d'environ 1°C en moyenne (1,06 à 1,19°C, voir figure ci-dessous).

Moyennes et écart-types de la température corporelle (en °C) mesurée chez les 27 furets à l'aide de 5 thermomètres différents, 3 auriculaires et 2 rectaux.

De gauche à droite le thermomètre rectal à mercure, le thermomètre rectal digital, les deux thermomètres auriculaires pédiatriques et le thermomètre auriculaire vétérinaire.

(*a, b désignent les différences significatives entre les mesures des thermomètres). Source Aguilar et al. J of Exotic Pet Med., 2019.

Ainsi, bien que plus confortable pour l'animal, le thermomètre auriculaire ne permet pas de mesurer avec fiabilité la température corporelle : il la sous-estime. Comme chez les rongeurs et les lagomorphes, finalement, pour lesquels la variation est potentiellement imputable à l'anatomie du canal auriculaire et/ou à une forte intolérance de ces animaux au dispositif. Les mêmes origines sont probablement en cause chez le furet.

Les auteurs de cette nouvelle étude rappellent également qu'une expérimentation chez le chien a mené à des observations similaires : des températures sous estimées avec un thermomètre auriculaire pédiatrique, en lien avec une anatomie de l'oreille différente de celle de l'enfant qui pourrait gêner le bon positionnement de l'appareil.

En tout état de cause, pour le furet, « l'usage d'un thermomètre auriculaire n'est pas approprié en remplacement d'un thermomètre rectal ».

Un recours possible en pratique

Les mesures prises par les deux thermomètres rectaux ne présentent pas de différence significative, et sont très bien corrélées chez les 27 furets.

Moins bien corrélées à celles du thermomètre à mercure, les mesures issues des trois thermomètres auriculaires ne présentent toutefois pas de différence significative entre elles. En outre, chaque appareil pris individuellement indique des résultats reproductibles, particulièrement le modèle vétérinaire. Ce qui amène ainsi les auteurs à conclure que la température auriculaire reste potentiellement intéressante chez le furet : « en pratique, sa mesure peut être utilisée à discrétion, en ajustant les valeurs selon la variation attendue de ± 1°C ».

Il reste bien sûr à valider ces observations, et cet écart de valeurs, en comparant les résultats de mesures effectuées chez des animaux malades, en état d'hypo ou hyperthermie avérée.