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19 septembre 2018

De sa promenade, le chien ramène à la maison… des oeufs de Toxocara (et son maître aussi)

par Vincent Dedet

Temps de lecture  3 min

Une étude moscovite montre qu'un chien citadin ramène une fois sur cinq de sa promenade des œufs embryonnés de Toxocara accrochés à ses pattes…
Une étude moscovite montre qu'un chien citadin ramène une fois sur cinq de sa promenade des œufs embryonnés de Toxocara accrochés à ses pattes…
 

Sous les coussinets et sur les poils des pattes du chien revenant de promenade, il y a des œufs embryonnés de Toxocara, et cela vaut aussi, bien qu'avec une moindre fréquence, pour le maître l'ayant accompagné. Telle est la conclusion d'une étude simple dans laquelle deux parasitologues moscovites ont lavé les pattes et les semelles de ces promeneurs à leur retour… Car le sol est le réservoir par excellence des formes de résistance de Toxocara (T. canis comme T. cati), de manière cosmopolite, comme le confirme une autre étude publiée sur le sujet cet été (voir la carte ci-dessous).

Une méta-analyse de 109 articles sur la prévalence d'œufs de Toxocara dans les espaces publics a permis à ses auteurs de dresser un état des lieux mondial de cette prévalence, dans une étude publiée cet été (Fakhri et coll., 2018)

 

Prélèvement mensuel

Les auteurs se sont attachés à huit chiens (labrador, golden retriever et airedale terrier), en bonne santé et vivant en appartement. Aucun des chiens n'était excréteur fécal d'œufs de Toxocara. L'étude a duré 9 mois (de mars à novembre) en 2017, à Moscou. Les chiens étaient promenés quotidiennement dans les espaces verts publics ou privés (parcs de résidences) de la ville. Juste après le retour de promenade, leurs pattes étaient rincées à l'eau tiède dans une bassine. La même opération était réalisée à partir des semelles de leur promeneur, mais aussi d'autres personnes (n=6), qui n'avaient pas de chien et marchaient essentiellement sur des voies asphaltées. Chaque opération était réalisée à un mois d'intervalle, 4 à 5 fois pour les chiens, 7 à 8 fois pour les maîtres, 4 fois pour les “témoins”.

Une promenade sur cinq

Le contenu de chaque bassine était laissé à sédimenter pendant une demi-heure, avant d'éliminer la partie supérieure et de prélever le fond (0,5 l environ) et l'amener au laboratoire de parasitologie, pour « coprologie », dans les heures suivant le prélèvement. Les prélèvements réalisés sur les semelles des “témoins” (n=24) n'ont fourni aucun œuf de Toxocara. En revanche, une fois sur 5 pour les chiens et une fois sur 10 pour le maître, il y avait détection d'œuf de ces helminthes (voir le tableau ci-dessous).

Fréquence de la détection des œufs embryonnés de Toxocara canis et T. cati sur les pattes des chiens et semelles de leur maître au retour de promenade (LeFil, d'après Panova et coll., 2018).

 

T. cati en tête

Dans les prélèvements positifs, les auteurs ont identifié entre 1 et 8 œufs au plus et, en moyenne, il y avait deux fois plus d'œufs accrochés aux coussinets qu'aux semelles (2,8 et 1,9, respectivement)… Pour les auteurs, la fréquence de T. cati, double de celle de T. canis (83 et 42 % des prélèvements réalisés, respectivement), n'est pas une surprise : une étude polonaise à partir du sol urbain (terreux) avait déjà montré la prépondérance de cette espèce. Dans les deux espèces, environ 20 % des œufs contenaient une larve mobile, a priori directement infectante. Les auteurs signalent qu'ils ont aussi identifié : des œufs de trichures (à 3 reprises), d'ankylostomes et de Capillaria (à 2 reprises à chaque fois).

Coussinets efficaces

Ils ont aussi pesé les particules obtenues par rinçage : les pattes des chiens étaient plus propres que les semelles de leurs maîtres, mais elles ont pourtant fourni plus d'œufs. Pour ces parasitologues, « les chiens transfèrent les œufs d'helminthes plus efficacement » que les chaussures… Et ils soulignent qu'un faible nombre de larves « suffit à provoquer une pathologie sérieuse [chez l'Homme], comme un syndrome oculaire ». Vu la capacité de résistance dans l'environnement de ces œufs, et vu que la promenade du chien est quotidienne, il est probable que l'intérieur du foyer soit contaminé de manière cumulative… Ainsi, « même des animaux non excréteurs peuvent participer au cycle de transmission » des Toxocara. Tout dépendant ensuite de l'intensité du ménage pour les humains, et du léchage de ses pattes pour la recontamination du chien… Pour les auteurs, le ramassage des crottes de chiens en ville n'en devient que plus critique pour limiter le risque de transmission « domestique ».